Fyctia
Chapitre 4
J’ignore ce que ce texte deviendra par la suite, mais dans une démarche de sincérité et dans un souci de transparence, je préfère avertir un lecteur qui tomberait par hasard sur ce récit quelque peu désordonné. J’écris comme ça me vient et il se peut même que ce journal se transforme en manuscrit inachevé.
Il faut bien comprendre que ce texte est destiné à Millie. C’est pour elle que j’ai pris la décision d’écrire notre histoire, aussi imparfaite soit-elle. Bien que je m’en serve également d’exutoire pour ma petite personne. Une thérapie pour combattre la culpabilité d’une part, et un remède contre l’oubli d’autre part. Maintenant, si je venais à disparaitre pour une quelconque raison, je voudrais que mon cri de détresse soit entendu par ceux qui souffrent des mêmes maux que moi. Que ce journal leur vienne en aide. Qu’ils puissent se dire : « Je me sens moins seul ».
Navré, mais nous allons encore voyager dans le temps et revenir à moins de deux mois avant que je prenne la décision de coucher mes mots (et mes maux) sur le papier. Soit un peu plus de trois mois après l’épisode du trou noir avec la sublime mauvaise chanteuse.
Alors que je me balade dans les rues de Manhattan, sans trop savoir ce que je fais, ni ce que je cherche, je pense à mes parents. La seule famille qu’il me reste. Ça fait un moment que je ne suis pas allé les voir. En même temps, c’est pas de ma faute s’ils ont décidé de s’exiler à Portland. Je comprends que ma mère ne se sente plus en sécurité ici, mais bon, qu’ils ne me reprochent pas de ne pas me taper plus de six-cents miles aller-retour tous les week-ends. En plus, c'est le Maine quoi ! Je crois bien que c’est le fief de Stephen King. Personnellement, je ne sais pas si je craindrais plus un mec qui attaque un centre commercial au fusil d’assaut ou un clown qui joue avec nos peurs les plus profondes pour nous ronger l’esprit. À choisir, je préfère celui qui existe vraiment. Je serais horrifié de devoir me confronter à mon propre subconscient.
Je déambule au gré de la surpopulation de cette ville et du bruit infernal des klaxons et des insultes. Quand je repense à la manière dont j’ai filé en douce au petit matin, ça me donne des regrets. Peut-être que ça aurait pu marcher avec cette fille. Mais je ne le saurai jamais. Je crois que j’ai eu peur de ne pas assumer. Assumer quoi ? Ça, je l’ignore, dans la mesure où elle ne m’a pas dit qu’elle voulait quelque chose de sérieux. En réalité, je pense tout bêtement que pour me poser réellement avec une femme, j’ai besoin d’avoir une étincelle presque divine. Comme si je pouvais affirmer sans douter : « Oui, ce sera elle. Elle sera ma femme et la mère de mes enfants. Et je me mettrai à nu devant elle ». N’ayant jamais eu de grand frère, j’avais tendance à écouter mes mentors et mes amis. Aujourd’hui, je sais que leur vision, c’est leur vision, pas la mienne. Néanmoins, avec du recul, il reste quelques vérités que j’ai prises en considération et l’un d’eux m’a dit un jour : « Jo, si tu veux être sûr que c’est la bonne, pose-toi une seule question… est-ce que tu la vois être la mère de tes enfants ».
***
À la nuit tombée, lorsque le soleil a cessé de donner l’espoir d’une vie sensée à la population new-yorkaise, il ne reste que la pénombre au creux des immenses tours de la ville, mettant en lumière tous les démons intérieurs que chacun a tenté de dissimuler. En somme, la journée sert à porter un masque d’impassibilité (à qui sera le plus convaincant…) et la nuit nous montre au naturel avec nos mauvais penchant.
Le mien de mauvais penchant, c’est cette appétence pour l’alcool, la fête et les femmes. Et ce soir, je ne vais pas déroger à la règle imposée par mes addictions. Elles ont gagné la guerre de mon esprit depuis longtemps. Après avoir passé une journée à tenter de combler le gouffre immense qui envahit mon être au quotidien, je vais réparer mon âme en allant oublier mes soucis dans le whiskey.
Ni une ni deux, j’enfile une tenue correcte, je dévale les escaliers de mon immeuble et je grimpe dans un taxi, direction le 230 Fifth Rooftop et sa vue imprenable sur New-York.
Une fois arrivé, je commande un verre et je m’approche du garde-corps qui entoure la terrasse pour admirer l’immensité de ce monde. Je profite de la brise fraîche qui me caresse le visage pour fermer les yeux. Je suis peut-être naïf, mais j’aime à croire que je suis capable de changer. Capable de devenir quelqu’un de meilleur…
— Y’a plus simple comme manière de mettre fin à ses jours.
Merde, j’ai parlé trop vite. Mes vieux démons me rattrapent. C'est le cercle vicieux.
— Ah ouais ? T’es une experte ? C’est quelque chose que tu expérimentes souvent, le suicide ?
— Non, mais je suis experte en mecs meurtris. Et tu fais partie de cette catégorie.
Bien qu'arrogante, je lui accorde du crédit et alors que je suis accoudé sur le garde-corps, je me décide à la regarder…
Wow !
— Et tu serais capable de soigner mes blessures ?
Elle a un petit rire charmant. Le genre qui me conforte dans l’idée que le changement, l’homme meilleur, c’est pas pour maintenant.
— Ça dépend de quel genre de blessure on parle…
— Profonde. Très profonde !
Lorsqu’elle porte son doigt à son menton en faisant semblant de réfléchir, je remarque que ses mains son parfaites. Il n’y a pas d’autre mot que la perfection pour désigner cette fille.
— J’aime bien relever les défis, rétorque-t-elle en s’approchant à quelques centimètres de moi. Mais toi, tu es prêt à être guéri.
La séductrice plonge ses yeux dans les miens et je sens son souffle chaud qui me chatouille les lèvres. C’est très déstabilisant, même pour moi. Je ne contrôle plus rien et mon regard vacille entre la couleur noisette de ses iris, l’intensité de ses pupilles, et sa bouche que j'imagine mordiller.
***
Dès notre arrivée dans son appartement, nous laissons exploser la tension sexuelle dont les prémices sont nées sur la banquette arrière du taxi qui nous a mené jusque-là.
Je bondis tel un fauve porté par la passion pour lui arracher son chemisier. « Dès que je t’ai vu, j’en avais envie » me dit-elle. Je marque une pause et admire sa beauté avant de lui mordre les lèvres (ça, c’est ce dont moi j’avais envie dès que je t’ai vue). Nos langues se glissent sensuellement l’une sur l’autre, tandis qu’elle caresse mon entrejambe et que j’attrape ses fesses bombées à pleines mains. Je referme ensuite la porte derrière nous, la pousse contre le premier mur à l’entrée avant de la retourner et d’entrelacer mes paumes chaudes contre les siennes. Alors je baisse mon pantalon d’une main, pendant qu’elle retire prestement sa jupe. La chaleur de nos corps et la puissance de nos expirations nous transportent vers l’évidence d’une unité. Oui, nous ne faisons qu’un !
Je pense que je le savais déjà à ce moment-là, mais je me voilais honteusement la face.
C’était elle, la seule, l’unique, mais j’étais trop bête pour le voir.
Millie, pardonne-moi...
35 commentaires
Mira Perry
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Il y a 9 mois
Jay H.
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Il y a 9 mois
MIMYGEIGNARDE
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Il y a 9 mois
Marie Andree
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Il y a 9 mois
Jay H.
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Il y a 9 mois
clecle
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Il y a 9 mois
clecle
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Il y a 9 mois
Jay H.
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Il y a 9 mois