Fyctia
Prologue
Je l’ai aimée.
Elle était belle. Différente.
Elle s’est approchée.
Fragile. Aimante. Douce amante.
Je l’ai aimé. Un peu.
Il était beau. À sa façon.
Sa couleur était le bleu.
Bleu de beauté. Bleu d’oubli. Bleu de passion.
Je l’ai aimée. Beaucoup.
Elle souriait. Lunettes sur le nez.
Elle bâtissait le monde de gris. Des airs flous.
Monde gris de rêves qu’on a essayés de lui voler.
Je l’ai aimé. Passionnément.
Chacun de ses baisers m’envoûtait.
Je le voulais. Éperdument.
Repeindre le monde des couleurs qui nous allaient.
Nous nous sommes aimés. À la folie.
Effaçant le monde qui nous entourait,
Tout enlever. Pour un oubli.
Juste nous deux. Nous aimer.
Nous éloigner? Pas du tout.
Nous abandonner dans les bras l’un de l’autre.
Très loin de vous.
Créant un monde. Le nôtre.
Leurs mains tremblaient alors qu’ils couchaient leurs mots sur le papier, assis dans le froid avec seulement leurs corps pour les réchauffer. Leur écriture n’avait aucune fluidité. Ils écrivaient, tous les deux, dans les bras de l’un et de l’autre. Ils écrivaient tous les deux, dans l’amour et la poésie. Pour l’oubli.
Seuls, alors que le monde tournait et poursuivait sa route. Dans l’ignorance totale de deux êtres amoureux, éperdument. Personne n’allait s'arrêter pour eux. Personne et ça leur allait, ils pouvaient créer leur histoire, leur romance. Leur monde.
Ils étaient de ces couples torturés, successeurs de Roméo et Juliette. Torturés par l’interdiction de s’aimer. Interdiction extérieure, interdiction intérieure. Ils ne devaient pas. Ils ne pouvaient pas. Pourtant, ils l’avaient fait le jour où ses lèvres avaient atteint les siennes. Leurs lèvres, car ils ne savaient pas lequel des deux avaient cédé. Ils se souvenaient pourtant que c’était la demoiselle grisée qui avait ensuite réclamé un baiser. Ils se souvenaient de ne pas s’être repoussés pour encore s’embrasser. Ils avaient cédé, recommencé.
Alors qu’ils n’avaient pas le droit. Dans ce monde-là, tout du moins, qui les emprisonnait dans la douleur et les obligations. Dans les règles et la raison. Une raison qui leur hurlait de ne pas s’aimer, plus forte que leur cœur. Dans une prison mentale et physique que leur vécu avait créée, par des portes scellées leur retirant le droit de s’aimer. Ils ne devaient pas, ils étaient surveillés. La réalité : Il était engagé, elle était bloquée. Dans la cage d’un premier amour, la cage d’une famille sans amour. Pourtant, l’un avec l’autre, ils s’étaient trouvés. Il avait redécouvert ce qu’était aimer, amoureusement, passionnément. Et elle, elle avait voulu s’évader pour se réfugier aux creux de ses mains, dans les pages d’un carnet qu’ils forgeaient.
L’un et l’autre. Elle et lui.
Elle, c’était Cheryel. Une future jeune femme aux cheveux gris, d’un gris comme la vie, comme sa vie. Comme ses jours d’orage, comme la fumée de son incendie, de son monde perdu dans une routine qu’elle aurait aimé effacer.
Au même titre que Gabriel. Lui, un homme aux cheveux noir de bleu. Comme sa réalité, celle du temps passé où il avait cessé de rêver. Comme la mer le soir qu’il espérait un jour voir, comme le ciel de nuit où ses pensées venaient s’envoler gardant le secret de ces habitudes qui commençaient peu à peu à le perdre dans un autre qu’il devenait.
Elle et lui. Gabriel et Cheryel. Bleu et Gris. Et ils allaient poser l’histoire de deux couleurs non complémentaires, deux couleurs à l’opposé du monde, deux couleurs impossible à marier car éloignées dans cette vie. Ils l’écriraient et ils le construiraient. Ce monde, leur monde à deux.
Leur monde à part, pourvu que la réalité ne les rattrapât jamais.
5 commentaires
Nina-lbt
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Il y a 2 ans
MesMotsDazur
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Il y a 2 ans
Hajarsbookishworld
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Il y a 2 ans
MesMotsDazur
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Il y a 2 ans