Fyctia

Cela faisait maintenant quelques jours que le corps de Wen avait été retrouvé. Joe ne s’attendait pas à ce que la mort d’un homme qu’il avait côtoyé si peu de temps puisse le bouleverser autant. Une carrière tronquée, une vie effacée. Les derniers mots que Wen avait prononcés à son égard étaient justes et ils l’avaient profondément touché. Joel en avait de la chance, il était en vie, libre de faire ce qu’il voulait et après tout il était peut-être encore temps de réussir une vie rangée. Joe sortit de ses rêveries devant sa porte. Quand il voulut entrer chez lui, il remarqua immédiatement que la porte avait été défoncée. Le montant en bois était arraché et elle ne tenait plus dans ses gonds.

Joe poussa la porte vers l'intérieur de son appartement et s'annonça prudemment.

— Y'a quelqu'un ? lança-t-il.

Il alluma la lumière et ce fut le choc. Tout avait été retourné. Les coussins éventrés, les tiroirs ouverts, le canapé déplacé, la vaisselle renversée. Des traces de pas sales dans l’entrée. La cuisine sens dessus dessous. Sa chambre n’était pas épargnée. Tous ses vêtements par terre, les armoires ouvertes, le lit soulevé, les valises fouillées. Même ses caisses d’électronique avaient été ouvertes. Rien ne manquait. On avait fouillé partout, mais sans rien emporter.

Il hésita un instant sur le seuil de la chambre de Wen. Il n’y était entré qu’une fois, après sa mort. Curiosité mal placée. Il avait fouiné quelques minutes, cherché des indices. Comme dans un film noir, il avait espéré trouver un ticket de métro, une boîte d’allumettes, un numéro griffonné. Mais rien. Rien que des syllabus bien rangés, deux pulls pliés, et un lit fait au carré. Puis, il était très vite ressorti, fouiller dans les affaires d’un mort lui avait semblé morbide.

Cette fois, la chambre était méconnaissable. Comme dans le reste de l’appartement, tout avait été retourné. On avait sorti les vêtements, vidé les tiroirs, déplacé le sommier. Le matelas était à moitié éventré. On avait cherché quelque chose. Minutieusement. Joe s’approcha du bureau. Vide. Il fronça les sourcils. Il aurait juré qu’il y avait un ordinateur, la dernière fois. Un petit portable gris. Il en était quasiment sûr, il l’avait vu posé là. À part ça, Wen n’avait pas grand-chose. Des fringues, quelques livres, des cours. Pas de photos, pas de souvenirs. Joe resta là un moment, à regarder le désordre vide. Puis, il referma la porte derrière lui.