Fyctia
Chapitre 1 (1/2)
Je me tiens devant la vieille maison de mes parents, les yeux fixés sur la porte. Il n’y a plus de bruit ici, plus de vie, juste le froid, l’ombre et les souvenirs. La neige tombe en petits flocons discrets, couvrant lentement le sol, rendant chaque pas plus lourd, plus imprégné de nostalgie.
Le village que j’avais quitté, il y a des années, semble figé dans le temps. Les maisons sont identiques à celles que j’ai laissées derrière moi. Les mêmes toits de chaume recouverts de neige. Le même moulin abandonné au bout de la rue principale. C'est comme si tout avait arrêté de tourner ici après le départ de mon père, après sa mort.
Je me souviens de cette maison. De mes premiers pas dans cette ville, de la chaleur de la cheminée et de l’odeur du thé que ma mère préparait chaque après-midi. Mais tout cela semble maintenant appartenir à une autre vie. Ce n’est plus la maison chaleureuse que j'ai connue. C’est un souvenir, un fantôme.
Je pousse la porte, et le grincement qui me répond me semble aussi douloureux que le froid qui envahit la pièce. La poussière recouvre chaque meuble, chaque photo, comme si le temps n'avait pas seulement suspendu son vol ici, mais l’avait arrêté complètement. Je monte à l'étage, là où se trouvent encore les affaires de mon père. C’est pour ça que je suis venue : récupérer ce qu’il reste de lui. Ce qui peut me donner un peu de lui, un peu de ce passé qui m’a façonnée. Cela fait un peu plus d’un an qu’il est parti, et la douleur est toujours là, toujours aussi présente même si j’ai fini par apprendre à vivre avec.
Je m’approche de la bibliothèque. Mes mains frémissent en caressant les reliures des livres qu'il avait toujours laissés là, dans cet ordre parfait. Mais quelque chose attire mon attention, un carnet qui dépasse d’un tiroir. Je l’ouvre délicatement.
C'est un carnet de croquis, des dessins de Noël, les mêmes que mon père avait dessinés pour moi quand j’étais enfant. Il y en a plusieurs, des sapins aux guirlandes étincelantes, des maisons enneigées, des étoiles brillantes. J’ai l'impression d’entendre sa voix résonner dans ma tête, me demandant pourquoi Noël était si important pour les Anglais. Il avait toujours posé cette question, la répétant sans cesse, cherchant à comprendre cette tradition qui n’était pas la sienne. Ma mère, elle, répondait en lui expliquant avec passion. Ces dessins… ils étaient la preuve de sa curiosité et de son amour pour cette fête, une fête qu’il n’a jamais pu pleinement adopter.
Je souris doucement, une douleur sourde envahissant ma poitrine. Il n’avait jamais pu faire entrer Noël dans sa propre vie, dans cette maison. Et pourtant, il n’avait jamais cessé de s’interroger sur ce mystère. J’enferme le carnet contre mon cœur, comme pour y cacher cette tendresse que j’ai longtemps oubliée.
En continuant à fouiller dans les affaires de mon père, je n’entends pas d’abord les pas qui s’approchent, jusqu’à ce qu’une voix grave me fasse sursauter.
— Tu es revenue.
Sa voix grave fend le silence comme une lame. Je me retourne brusquement.
Dev.
Il se tient là, droit comme une statue, les bras croisés, appuyé contre le chambranle de la porte. Même sous les ombres de la pièce, je distingue ses traits que je n’ai jamais vraiment oubliés. Il a grandi, s’est affermi. Plus rien chez lui ne rappelle l’adolescent arrogant et suffisant que j’ai connu. Son visage s’est durci, anguleux, avec une mâchoire marquée, légèrement ombrée par une barbe de quelques jours. Ses cheveux noirs, autrefois toujours bien coiffés, sont légèrement en bataille, comme s’il n’avait pas pris la peine de les discipliner. Et ses yeux… toujours aussi sombres, perçants, empreints de cette même intensité dérangeante.
Il porte un long manteau épais, noir, encore saupoudré de neige. Un pull de laine sombre dépasse de l’ouverture, contrastant avec sa peau mate. Même sous ses vêtements hivernaux, on devine la carrure solide, celle d’un homme habitué au travail physique, bien loin du garçon raffiné qu’il semblait vouloir être autrefois.
Il me jauge un instant, puis son regard descend vers le carnet que je tiens entre mes mains. Une ombre traverse son visage.
— Je pensais que tu n'avais pas l'intention de revenir.
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