Thory TALES Let it snow, Let him go (ou pas) Chapitre 3 - Hugo (2/3)

Chapitre 3 - Hugo (2/3)

Je me réveille bien avant l’aube, ce qui, dans mon univers personnel, est une seconde nature. Mon cerveau a sans doute oublié qu’il n’est plus à Manhattan et qu’aucune réunion stressante ne m’attend dans un gratte-ciel de verre. Ici, la seule chose qui me guette, c’est le silence. Et une cafetière trop vieille dans une cuisine commune trop bien décorée.


Je sors du lit, avec précaution, comme si faire du bruit pouvait réveiller mes doutes. Je passe un pull gris que j’ai ramené "au cas où", un jean, mes baskets blanches flambantes neuves. J’ouvre la porte sur un couloir qui sent la cannelle tiède et le bois ciré. Connie a laissé une guirlande allumée sur la rampe d’escalier. Même ses décorations dorment avec grâce.


Je n’ai qu’une envie : respirer de l’air froid. Ma nuit a été hanté de souvenirs de mon enfance, de mon adolescence. Me traînant de moments de joie en moment de doute ; Liam intervenant par flash successif dans ma nuit. Bref j'étouffe.


Quand je mets le nez dehors, le choc est immédiat. L’air est sec, vif, brutal. Il me claque les narines comme un reproche bien senti. La neige a cessé de tomber, mais elle couvre tout. Un tapis immaculé. Un silence blanc. Une beauté insupportable.


Je marche sans but. Les mains dans les poches. J’essaie de me convaincre que je profite juste du calme matinal, que je ne suis pas en train d’espérer croiser quelqu’un. Que ce n’est pas pour ça que je suis sorti à une heure indécente avec les cheveux en bataille et l’esprit encore un peu noué.


La rue principale est vide. Parfait. Les vitrines dorment encore, les enseignes sont éteintes, et les décorations suspendues entre les lampadaires oscillent à peine dans le vent léger. C’est paisible. Et légèrement flippant. Comme si le décor était prêt mais que les acteurs n’avaient pas encore pris place.


Et puis je le vois. Liam. Parce que bien sûr. Il est là, debout devant un café déjà ouvert, en train de discuter avec une femme en tablier de Noël. Il a un gobelet fumant à la main, et il rit. Pas un rire tonitruant, non. Un petit rire discret, presque tendre. Un truc que je n’avais encore jamais entendu sortir de sa bouche.


Et mon cœur fait ce truc idiot. Il bondit. Comme un gamin trop content de voir quelqu’un. Je déteste ça.


Il tourne la tête. Il me voit. Et son sourire… s’efface à moitié. Pas totalement. Juste assez pour me rappeler qu’il n’est pas ravi de me voir. Et c’est normal. Je suis le type venu mettre fin à tout ce qu’il protège.


Je lève la main. Un geste neutre. Pas trop enthousiaste. Genre “Salut, je ne suis pas une menace même si j’ai l’air de sortir d’un cabinet d’audit international.”


Il s’excuse auprès de la femme, lui rend la clé, puis s’avance vers moi.


Et là, mon cerveau panique. Mon cœur panique. Mon estomac panique. Tout mon être décide de me trahir.


Je cherche désespérément une réplique neutre, détachée, élégante. J’en trouve une… complètement stupide.


— Je pensais que les ours hibernaient en hiver. Pas les maires.


Bravo, Hugo. Subtilité niveau zéro.


Il fronce à peine les sourcils, puis répond avec ce ton tranquille qui me fout en vrac :


— Je pourrais dire pareil des types en costume. T’as pas un vol retour à prendre ?


Touché. Je souris, même si je suis à deux doigts de me vaporiser hors de cette ville.


— Trop tôt. J’ai encore quelques dégâts à faire avant de partir.


Il secoue la tête, boit une gorgée de son café, puis me tend le gobelet.


— Tu veux goûter ? C’est le meilleur cappuccino de la ville.


Je le regarde. Suspicion activée.


— C’est aussi le seul café de la ville, non ?


— Exact, dit-il avec un demi-sourire. Mais le sarcasme du client n’annule pas la qualité du produit.


Je prends le gobelet. Mes doigts frôlent les siens. Et c’est… rien. Une demi-seconde. Une chaleur. Un frisson. Et pourtant, ça me marque.


Je bois une gorgée.


— Okay, je l’admets. Pas mal. T’as gagné un point, M. le maire.


Il hausse un sourcil.


— Je note. Un point pour moi, moins vingt-trois pour le type qui veut raser mon passé.

Je rends le gobelet. Il le récupère sans rien dire.


Un silence s’installe. Pas pesant. Pas gênant. Juste… là. Je regarde la vitrine du café.


— C’est joli, ici.


— Ouais. C’est chez nous. Enfin si tu considères encore cette ville comme la tienne.


Et moi, je ne dis rien.


Pas encore.


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7 commentaires

Flopinette

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Il y a 21 jours

C'est seulement au début de ce chapitre que j'ai remarqué la couverture. Du coup, j'ai imaginé des personnages très différents de ces 2 quasi-jumeaux de la couv, qui ressemblent vaguement à Ryan Gosling. En particulier, j'imaginais Liam un peu plus... charpenté (il faut résister au froid tout de même). Je suis contente d'avoir une image un peu différente (j'aime imaginer les personnages)

Bérengère Ollivier

-

Il y a 25 jours

Dis donc il est cool le maire, moi je ne laisse pas cracher tout le monde dans mon cappuccino, surtout si c’est le meilleur de la ville

nedra08

-

Il y a un mois

Raaalala! Mais qu'est-ce qu'il s'est passé entre eux ?!?
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