Fyctia
4. De l'eau a peut-être (p2)
J’envisageai brièvement l’utilisation d’un alias pour échapper à cette avalanche de questions – j’étais bonne menteuse. Mais alors que j’étais sur le point de lui répondre, la porte de la piscine s’ouvrit et l’équipe de natation au complet déboula dans notre périmètre, l’air crevé mais satisfait de leur matinée d’entraînement. Ils étaient une dizaine, tous plus ou moins connus sur le campus. Il y avait les têtes que je reconnaissais sans mal – Mathieu et Alex, qui avaient fait une campagne publicitaire pour Adidas quelques mois auparavant, et Isaac, réputé pour organiser les soirées les plus démentielles de la région, si bien que même les étudiants d’autres facs se bousculaient pour y assister – et il y avait les autres, qui me disaient vaguement quelque chose mais que j’aurais été bien en peine de replacer.
Et puis il y avait Hunter, bien sûr, surplombant le reste de ses coéquipiers du haut de son mètre quatre-vingt-dix. Pendant que les nageurs rejoignaient leur copine ou débriefaient entre eux la séance, il parlait avec animation à l’entraîneur de l’équipe, lequel n’avait pas l’air d’apprécier le contenu de leur discussion.
— Hunter ! Oh, Hunter ! le héla Constance, offrant à l’entraîneur une chance de s’éclipser sans se faire prier. Il faut absolument que tu nous présentes ta copine. Elle a l’air a-do-rable.
— Tu vas devoir faire les présentations à ma place, répondit Hunter, une lueur moqueuse dans les yeux. Je n’étais pas au courant que j’avais une copine, mais je serai ravi de la rencontrer.
— Tu es un idiot. Elle est là, voyons, fit-elle en me désignant d’un geste de la main.
Il tourna la tête dans la direction qu’elle lui indiquait et ses yeux se posèrent sur moi avec curiosité. Je discernai le moment exact où il me reconnut. L’expression jusque-là ouverte de son visage se ferma brutalement.
Il me dévisagea d’un air incrédule.
C’était une chose étrange à dire, mais Hunter était le genre de personne qu’il fallait voir en vrai pour comprendre l’étendue de son magnétisme. Ce n’était pas comme si j’avais passé trois ans sans le voir du tout : il faisait plus de campagnes publicitaires que n’importe quel autre nageur de l’équipe, éviter son image était quasiment impossible. Combien de fois avais-je vu son visage parfait sur un papier aussi glacé que ses yeux, ses biceps finement ciselés dans un spot publicitaire pour des montres connectées ou ses cheveux bruns foncés artistiquement décoiffés dans un article sur la fortune considérable de la famille Hunter ? Je n’aurais su le dire.
Ce dont j’étais sûre, en revanche, c’était que rien de tout ça ne faisait justice à l’aura qu’il dégageait lorsque je me trouvais face à lui. J’avais l’impression qu’il m’irradiait. Être au centre de son attention était aussi effrayant qu’exaltant.
— Toi, m’accueillit-il fraîchement.
— Moi, confirmai-je avec plus de bravoure dans la voix que je n’en avais réellement. Hum. Surprise ?
— Tu as raconté à Constance que tu étais ma copine ?
Il semblait plus stupéfait que réellement accusateur. Si j’avais été à sa place, je me serais senti insulté que Constance s’imagine que nous étions ensemble.
— Bien sûr que non. Pourquoi est-ce que je ferais ça ?
Il haussa les épaules, mais je vis sa posture se détendre légèrement.
— J’ai renoncé à savoir pourquoi les gens racontaient tels ou tels mensonges, répondit-il en plissant les yeux, le ton de sa voix lourd de sens.
Puis il se tourna vers Constance - laquelle avait l’air complètement confuse par notre échange – et lui jeta un regard interrogateur. Je constatai avec une pointe de satisfaction cruelle qu’elle n’avait toujours pas percuté. Je n’arrivais pas à me rappeler si elle était aussi stupide à l’époque où nous vivions dans le même monde. Il ne me semblait pas. Ou peut-être que je l’idéalisais un peu - c'était une fille jolie et plus âgée, et j’étais tristement influençable.
— Hey s’insurgea-t-elle, furieuse. C’est elle qui m’a dit que –
— Que je voulais te parler, la coupai-je – je ne tenais pas à entendre sa voix plus que nécessaire. C’est au sujet de Nora.
Il y eut un court moment où Hunter ne réagit pas, si bien que je craignis qu’il ne me réponde ‘qui ?’ et que je fus contrainte de lui envoyer mon pied dans le genou. Par chance, ce ne fut pas ce qui arriva. Il cligna plusieurs fois des yeux puis, une fois totalement remis de mon apparition, acquiesça.
— Nora, répéta-t-il. Je ne la connais pas très bien mais elle est cool, ouais. On a parlé un peu ce week-end. Qu’est-ce qu’elle a ?
— Rencard avec toi, voilà ce qu’elle a, sifflai-je, incapable de me contenir plus longtemps. Je te connais, Eddie Hunter, et je t’interdis de lui briser le cœur.
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Meg Archeion
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Serahne
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GwendolineBrument
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Diane Of Seas
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Quentinn
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Scarlett G.
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