Fyctia
Chapitre 1 (1/2)
Pour toutes celles et ceux qui gardent des démons au fond d'eux.
Ma playlist de Noël résonne dans toute la voiture et j'imagine sans bien mal les plaintes de Lucile me suppliant de baisser le son ou d'au moins arrêter de chanter. Elle dirait surement qu'elle ne comprend pas tout cet engouement envers Noël et Maria Carey et que, je cite, "vivement l'été". Un sourire se dessine sur mes lèvres à la pensée de ma meilleure amie qui est certainement en train de profiter de ses jours de congé sous la couette, collée à son copain devant Netflix, pendant que je me rends dans ma ville natale que j'aime autant que je la déteste. Je suis très heureuse de revoir mes parents et de pouvoir de nouveau arpenter les rues enneigées, pourtant je sais qu'une ombre plane au-dessus de ce paradis. Une ombre que je n'ai pas oubliée et qui me marque toujours autant six ans après.
Les paysages montagneux défilent les uns après les autres, me faisant tous regretter de ne pas être du côté passager pour les admirer paisiblement. J'ai toujours apprécié contempler les arbres habillés de blanc qui, quand j'étais petite, étaient synonymes de fête et de magie. Maintenant, j'ai grandi et le côté magie a quelque peu disparu, me laissant encore ce goût amer d'une innocence perdue.
Quand j'aperçois enfin la pancarte de mon village, je suis immédiatement empli d'un soulagement mêlé à une certaine crainte. Je rentre dedans comme si cela ne faisait pas six longues années que je m'étais absentée. Rien n'a changé, que ce soit ce petit café dans lequel je passais mes après-midis hivernaux ou bien ce banc qui a connu tant de secrets et d'émotions.
Les maisons sont déjà toutes décorées, nous plongeant encore plus dans l'atmosphère de Noël. Lorsque je vois la maison de mes parents, je n'ai qu'une envie : rentrer, me blottir au chaud avec un chocolat chaud.
Je me gare devant la grande bâtisse sans un regard pour celle d'en face. De toute façon, il a dû partir faire sa vie, non ?
Mon poing s'abat sur la porte et il ne faut pas dix secondes pour qu'elle s'ouvre sur le visage réjoui de ma mère.
— Tu es enfin arrivé ! s'exclame cette dernière en me prenant dans ses bras.
— Tu m'as manqué, souffle-je en me blottissant dans ses bras toujours aussi réconfortants.
— Allez, ne reste pas là, tu vas attraper froid. Gorge ! Viens prendre les affaires de Coline !
Mon père apparait avec le même sourire chaleureux qui n'a pas changé depuis mon enfance. Il m'embrasse sur le front avant de se diriger vers ma voiture.
— Attends, je vais t'aider, commençai-je.
— Laisse, tu sais comment réagira la patronne si tu n'écoutes pas, répond-il en levant les sourcils vers ma mère.
Cette dernière lève les yeux au ciel avant de m'entrainer dans le salon.
C'est fou comme je me suis déjà réhabituée à cet endroit. Je n'y ai pas mis les pieds depuis plus de six ans, pourtant j'ai l'impression de faire un bond dans le passé et de rentrer d'une de mes longues journées de cours. L'odeur de cannelle embaume toute la maison, me faisant rapidement deviner que ma mère m'a fait ma pâtisserie préférée : le cinnamon roll. Je tourne la tête vers elle avec un sourire enfantin qui a le don de la faire rire au même titre que mon père déjà revenu les bras chargés de mes valises.
— Ma princesse que je n'ai pas vue depuis si longtemps revient enfin après une longue absence, je me devais bien de te faire quelque chose que tu aimes.
Je me revois petite à demander des cinnamon rolls à chaque occasion, peu importe la saison. Se souvenir a le pouvoir de me faire sourire, sourire qui fane bien vite en repensant à la personne qui me l'a fait découvrir.
— Merci maman.
— C'est normal, chérie. Bon, monte tes valises pendant que je prépare la table.
Je m'exécute et monte les marches, suivi de mon père. Une fois qu'il a déposé mes valises, il descend aider ma mère. Tout est encore à sa place, mes doigts caressent la multitude de photos accrochées sur un tableau de liège, toutes représentant des moments heureux de ma vie avec les personnes les plus importantes pour moi. J'ai un pincement au cœur en voyant certains visages que j'ai délaissés sans aucune explication. Son visage.
À l'époque, mon départ était si précipité. J'avais à peine dix-huit ans, je venais d'avoir mon bac et, en pleine nuit, j'ai préparé un petit sac avec le strict nécessaire, j'ai écrit un mot que j'ai laissé sur la table et je suis partie. Un taxi est venu me prendre pour me déposer à la gare et j'ai déserté sans regarder derrière moi. Le lendemain, mes parents m'ont appelé une cinquantaine de fois, il m'a appelé une centaine de fois. J'ai répondu à mes parents que tout allait bien, mais que j'avais besoin de temps, et à lui, je n'ai rien dit. Je l'ai bloqué et ai essayé de l'oublier. Si quelqu'un m'avait dit que je reviendrais dans cette ville, je lui aurais sûrement ri au nez. Je lui aurais dit que, moi vivante, cela n'arriverait jamais. Mais parfois, nous n'avons pas le choix. À l'époque, j'ai fui pour m'éloigner de mes problèmes, et aujourd'hui j'ai fait la même chose, bien que les raisons soient totalement différentes.
Mon téléphone sonne, me sortant de mes pensées.
3 commentaires
loup pourpre
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Il y a un mois
Elisa Daven
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Il y a un mois