Felicia 🖤 Les feuilles s'envolent en automne 11.2

11.2

Suite :


Je m’installe sur l’une des chaises de cuisine, qui j’en suis sûre a connu des jours meilleurs. Cookie en bouche et un verre de lait à la main, je profite de ce temps calme pour envoyer un sms à ma mère et à Ellie.


Les notifications en attente de mes amis me sautent immédiatement aux yeux. Je scroll rapidement les messages, ils veulent que l’on se fasse un appel tous ensemble dans la semaine, visiblement Margot a quelque chose de très important à nous annoncer. Inconsciemment, je dévie sur le numéro de Liam, mon coeur semble s'être arrêté de battre dans ma poitrine, il a vu les messages mais n’y a pas répondu. Mes épaules s'affaissent.


Une part de moi peut s’empêcher de se demander ce qu’il fait, où il est et avec qui. Je suis incapable de renoncer à cette douce torture parce que c’est bien plus simple d’avaler le poison et de se laisser mourir que d’essayer d’y survivre.


Un instant plus tard, je suis scotché à une vidéo de nous deux en train de dévorer une barbe à papa dans le London Eye. Ça date de l’été dernier, juste avant qu’on emménage ensemble. Je déglutis et remonte encore plus loin jusqu’à atteindre les photos où nous étions adolescents. Je sens mon cœur ou du moins ce qu’il en reste, se fendiller dans ma poitrine.


J’ai toujours pensé que lui et moi c’était pour la vie, ne dit-on pas que le cap le plus dur est celui des trois ans ? C’est vrai quoi…On s’accordait à la perfection.


Il parlait beaucoup, j’aimais l’écouter. Il aimait cuisiner, j’aimais tout dévorer. Il était toujours détendu, j’étais la stressée de service. Il était sociable, j'étais timide. Il dormait du côté droit du lit et moi du gauche.


Parfois, il nous arrivait de parler de notre séparation en riant, il me disait que jamais je ne retrouverais quelqu’un d’aussi merveilleux que lui et je répondais qu'aucune femme ne voudrait d'un homme aussi têtu.


Des coups frappés à la porte retentissent à nouveau. Je manque de recracher ma boisson par le nez et me lève d’un bond.


— Où est-ce qu’il faut aller se perdre pour avoir un peu de tranquillité dans ce bas monde ? je gronde avant de prendre conscience que j’ai certainement parlé trop fort.


Je malmène la porte, à bout de nerfs, le vent s’engouffre dans la maison, je m'apprête à balancer le discours que j'ai eu le temps de préparer dans le laps de temps qui séparait la cuisine de l'entrée de la maison mais les mots se meurent lentement sur ma bouche. Mon regard croise un autre, chocolaté, chaleureux et déjà connu au bataillon. Il suffit que je me plonge un peu trop longtemps dans ces yeux pour que les évènements de la veille me reviennent en tête. Je sens mes joues s’échauffer dangereusement, mes mains deviennent moites d’embarras, je les frotte le plus discrètement possible contre mon jean.


— Encore vous... ? je bafouille, déstabilisée.


L'homme me dévisage avec un léger rictus au coin de ses lèvres pleines.


— Toujours aussi agréable à ce que je vois.

— Qu’est-ce que vous fichez ici ?


Qu’elle était la probabilité pour que je retrouve au lendemain de cette soirée catastrophique cet homme à la peau mate qui m’a sorti du terrible bourbier dans lequel je m’étais mise ? Pour qu’il se pointe devant chez ma grand-mère avec son sourire aguicheur et son air rieur ? Nulle. Elle aurait dû être nulle cette probabilité vous m’entendez ? À moins que…


Quelque chose fait soudainement tilt dans mon esprit, l'homme entrouvre la bouche mais je ne lui laisse pas le temps en placer une.


— Vous êtes un publicitaire et vous faites du porte à porte c’est ça ? Vous n’avez pas honte d’essayer d’arnaquer ma grand-mère, cette pauvre femme qui vit seule et sans défense et qui…

— Je suis son infirmier, me coupe-t-il. Maintenant est-ce que je peux rentrer avant d’être complètement trempé ?


Ses paroles ont l’effet d’un court-circuit sur mon cerveau. Je reste debout, estomaquée, les bras ballants à essayer d’additionner deux et deux.


Son infirmier ?


Un silence de mort s’étire entre nous seulement entrecoupé par les gouttes de pluie qui martèlent la toiture.


Son putain infirmier ?


Mais enfin ma grand-mère n’a pas d’infirmier !


Mes yeux se posent sur le grand sac qu’il tient à bout de bras, ça suffit alors à semer le doute en moi. Je m’écarte de la porte d’un pas incertain.


— C’est pas trop tôt, marmonne-t-il en se déchaussant dans l’entrée comme s’il en avait l’habitude.


Ses boots en cuir retombent lourdement sur le carrelage.


— Où est votre grand-mère ?


Il circule jusqu’à la cuisine et je le suis, ignorant la sensation étrange qui me grignote l’estomac. Il dépose son sac sur la table et se tourne vers moi avec les sourcils froncés lorsque je lui réponds qu’elle est dehors en train de nourrir des canards.


— Vous l’avez laissé sortir par ce temps ?


Sa réprimande me donne l'impression d'être une enfant inconsciente. Je croise les bras contre ma poitrine, vexée.


— Vous êtes sûr que vous connaissez ma grand-mère ?

— Oui, je travaille pour elle depuis trois ans maintenant.

— Alors vous devriez savoir que personne ne peut rien lui interdire, je rétorque.


Fière de ma répartie, je le contourne, m'approche à grands pas de l'évier, récupère mon verre de lait qui trainait par là et le termine d’une traite. Je me félicite intérieurement d’avoir pensé à prendre une douche et à m’habiller correctement. La situation aurait été d’autant plus embarrassante si je l’avais accueillie en pyjama.


— Vous voulez boire quelque chose ?

— Non merci.


Je pivote vers lui, la mine renfrognée et l'examine, j'essaye encore de savoir s'il dit la vérité. Mamie ne peut pas avoir d'infirmier, je le saurais si quelque chose clochait avec son état de santé. Pourtant, il semble tellement à son aise, on croirait qu'il est déjà venu cent fois ici et j'imagine mal quelqu'un mentir sur un sujet aussi sérieux. Et puis ça expliquerait bien des choses, par exemple, pourquoi il trainait aux alentours de la maison hier soir...


Son regard plane longuement sur moi, c'est là que je me rappelle avoir enveloppé ma tête dans une serviette de bain en sortant de la douche, elle me semble tout d'un coup très lourde.


Je m’empourpre et m’empresse de m’en débarrasser. Mes cheveux humides retombent en cascade jusqu’au milieu de mon dos. Il suit le mouvement des yeux et comme il ne cesse de me reluquer je décide d’en faire de même.


Inutile de l’observer trop longtemps pour comprendre que c’est quelqu’un qui prend soin de lui. Sa peau est aussi lisse qu’un galet poli par la mer, il a des pommettes saillantes et un nez imposant pour son visage tracé. Des cheveux noirs et frisés ornent son front et resplendissent sous la lumière du jour. Sa dentition parfaite me rappelle que je n’ai pas encore pris le temps de laver mes dents ce matin. Je fais la moue et grogne dans ma barbe.


— Vous ne ressemblez pas à un infirmier, je lui reproche après avoir posé les yeux sur son pantalon côtelé et son épais pull marron.



A suivre...

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9 commentaires

C. E. Rivetto

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Il y a un an

aaah c'était sur ! Ravie d'avoir rattrapée mon retard, j'aime toujours autant ton histoire et le caractère de beth

Felicia 🖤

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Il y a un an

Merci haha :)

Carl K. Lawson

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Il y a un an

A jour 🥰

Kate-Lorens

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Il y a un an

A jour 😊

GwendolineBrument

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Il y a un an

Les retrouvailles 🥰 Hâte de découvrir la suite !

Felicia 🖤

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Il y a un an

Hautes en couleur comme on dit haha

Diane Of Seas

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Il y a un an

💚

Emma Eichen

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Il y a un an

😘

KBrusop

-

Il y a un an

💕🙏
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