Fyctia
11.1
BOURTON ON THE WATER
8 octobre 2023
Je vois mes espoirs de grasse matinées s’envoler aux alentours de huit heure et demie du matin lorsque des coups brutaux retentissent au rez-de-chaussée. Ils me semblent tellement lointain que je crois tout d’abord à une hallucination mais plus je me concentre sur ce bruit, plus il devient réel. J’arrache mon masque qui me bloquait la vue et me redresse lentement dans le lit, j’analyse la chambre dans laquelle je me trouve, déconcertée avant de me rappeler où je suis et ce que je fais ici. Je passe une main dans mes cheveux emmêlés et frotte péniblement mes paupières. Ça faisait une petite éternité que je n’avais eu de nuit aussi complète, l’envie de la prolonger me traverse l’esprit lorsque les coups en provenance du bas reprennent de plus belle.
Je soupire et me lève avec fénéantise, je descends les escaliers et abat ma main sur la poignée de la porte. Un vent violent s’engouffre dans la maison, des gouttes de pluies s’abattent sur mon pyjama, tout propre. Je frissonne, grogne comme un animal mal léché et lève les yeux vers la femme âgée qui me fait face sur le seuil. Au premier abord, elle a un look vraiment surprenant qui me fait me demander si je ne suis pas encore en train de dormir. Un turban multicolore est noué sur ses épais cheveux blancs, de grosses créoles dorées sont suspendues à ses oreilles et des bagues faites de pierres ornent ses doigts. Elle porte un pantalon large avec des bottes hautes fermées par-dessus.
Ses yeux s’écarquillent quand elle m’aperçoit, comme si elle était surprise de ma présence. Puis, des mots se mettent à sortir de sa bouche avec entrain alors que je suis toujours en train de loucher sur ses drôles de vêtements. Je m’oblige à me reconcentrer sur ses lèvres surmontées d’un trait épais de rouge à lèvre rose fuchsia. Eh, bien on peut dire qu’elle ne passe pas inaperçu.
Je me gratte la tête et papillonne des yeux dans l’espoir que mon esprit encore somnolent sorte enfin de sa torpeur. Je crois qu’elle est en train de me dire qu’elle me reconnait, que je ressemble à ma grand-mère et qu’elle a beaucoup entendu parler de moi. Au bout d’une très longue minute à la laisser s’extasier sur mes cheveux, je me force à marmonner un truc :
— Vous cherchez Mildred ?
— Oui, je viens lui rapporter son plat à gâteau.
Elle me montre l’objet en question et c’est à ce moment que mon regard se pose sur le post-it jaune qui était pendant tout ce temps accroché sur le cadre de la porte, presque sous mes yeux.
Partie nourrir les canards à l’étang, je serai de retour rapidement.
— Euh… elle n’est pas là, je bafouille mais donnez, je vais vous le prendre.
— C’est gentil ma petite.
Je souris et coince le plat sous mon bras. J’attends qu’elle s’en aille mais elle n’en fait rien. À la place, elle se contente de me fixer, le temps s’étire à tel point que ça en devient gênant. Il y a quelque chose qui me dérange dans ses yeux vairons mais je serai bien incapable de dire ce que c’est. Je lutte contre-moi-même pour ne pas refermer la porte et retourner me coucher. Je n’ai pas envie de passer pour une malpolie.
— Vous avez besoin d’autre chose ? je demande avec une pointe d’impatience dans la voix.
Elle secoue la tête et comme si un filtre qui était posé sous ses yeux disparaissait, son regard devient moins trouble.
— Du tout. Dites à Mildred que je passerai la voir dans la semaine. À bientôt Bénédicte.
Puis elle s’éloigne sans plus de cérémonie. Je soupire et referme la porte d’un coup de pied.
Après avoir déposé le plat sur la table de la cuisine, je décide qu’il est encore trop tôt pour être debout un dimanche matin. Je regagne ma chambre, le chat est allongé au milieu de mon lit, dans mes draps, à MA place. Je n’ai même pas le temps de poser un orteil sur le matelas que Petit con se met à me cracher dessus de la plus vilaine des manières. Je grimace et recule d’un bond.
— Ça va, j’ai compris, c’est ta chambre.
Ses oreilles se redressent après que je me sois éloignée, il se toilette au milieu de mes draps pour me narguer.
Je pioche des vêtements au hasard dans ma valise, une nouvelle sonnerie stridente se fait entendre au rez de chaussée. Je lève les yeux au ciel, comprenant qu’il s’agit du téléphone fixe. Je pensais que plus personne n’utilisait cette vieillerie.
— Allô ?
— Allô Mi ?
Cette fois c’est un homme.
— Non c’est Beth, je suis sa petite fille, Mildred est sortie ce matin.
— Oh ! C’est vrai nous sommes dimanche, quelle tête en l’air je fais ! Bon tu pourras lui dire que j’ai appelé ?
— Oui mais euh… vous êtes qui ?
— Roger, le voisin du bout du chemin.
— D’accord, je lui dirai alors.
— Bonne journée.
— À vous aussi.
Je raccroche en me disant que ma grand-mère a décidemment une vie sociale plus active que la mienne. Non pas que ça me dérange, loin de là.
Une vingtaine de minutes plus tard, je sors de la douche toute pimpante. Mes cheveux sont propres, mon corps est recouvert d’un léger lait hydratant et une odeur de cerise flotte partout dans la salle de bain. Mildred n’est toujours pas revenue et c’est avec une faim d’ogre que je me rends dans la cuisine. Là, sur le frigo, je découvre un nouveau post-it
Cookies, sers-toi mais gardes-en deux pour Henry !
Henry ? Mais bon sang qui c’est celui-là ?
Certainement un ami à elle, je me demande s’il compte passer ici ou si elle va lui rapporter sa part un peu plus tard dans la journée. Vu que c’est la deuxième fois qu’elle me parle de lui, il doit être vachement important, je suis impatiente de le rencontrer.
A suivre...
7 commentaires
François Lamour
-
Il y a un an
Hopeless_
-
Il y a un an
GwendolineBrument
-
Il y a un an
Felicia 🖤
-
Il y a un an
Emma Eichen
-
Il y a un an
Diane Of Seas
-
Il y a un an
KBrusop
-
Il y a un an