Fyctia
Chapitre 4
Le plancher craque fortement au-dessus de sa tête alors qu’elle est en train de scruter attentivement chaque recoin du salon, balai à la main, pour exterminer la vermine. Pour sûr, les filles sont montées au grenier. Elle leur a répété une vingtaine de fois de ne pas y aller, que c’était dangereux, mais le poids de son autorité est aussi minime qu’une cendre dans une urne funéraire. Est-ce que ça la mine ? C’est un euphémisme. Hâte que Nicolas rentre à la maison, il va leur filer une bonne raclée aux morveuses, "et plus à la grande j’espère".
Céline croit apercevoir la bête se faufiler sous le canapé, puis maintenant sous la table basse. Elle tente de l’appâter avec un raisin sec qu’elle balance sur le tapis. Son museau apparait, et illico elle brandit son arme de destruction massive et frappe fort. Merde, elle l’a raté. Manquait plus que ça, il la nargue et va se loger sous le meuble TV en prenant tout son temps. Du genre "essaie de m’avoir blondasse !". OK elle est blonde, mais elle ne se trouve pas stupide. Pas particulièrement intelligente non plus, mais dans la moyenne quoi.
Une idée lui traverse l’esprit, ni une ni deux elle se dirige vers la cuisine, attrape la bombe d’insecticide et court à l’étage chercher une couverture. Faut faire vite si on ne veut pas qu’il sorte prématurément de sa cachette. Lorsqu’elle arrive à l’étage, direction la chambre parentale (ou plutôt la chambre monoparentale), elle se saisit de la couette et ressort quelque peu essoufflée. Elle pose un pied pour redescendre et s’arrête net. Du chahut, des cris, des rires. Ça provient de la chambre des filles. Céline s’empresse d’aller ouvrir la porte, ce sont bien elles. Les deux gamines, l’une sur l’autre en train de jouer à la bagarre. Elle referme la porte et écoute attentivement … le plancher craque toujours au-dessus de sa tête.
Céline commence à flipper et à grommeler des propos incompréhensibles destinés à se rassurer. Mais ça ne la sécurise pas. Que faire ? Elle a peur de monter, elle ne voudrait pas se retrouver nez à nez avec un intrus. Appeler la police ? Le temps qu’elle débarque, l’indésirable aura déjà pris la poudre d’escampette. Est-ce que Nicolas est encore loin ? Normalement, il part du chantier à 20h00 et rentre vers 20h30. Avant de monter, il était 20h14. Oh, qu’est-ce qu’elle hait quand il part bosser un dimanche !
OK. Céline se dit qu’elle n’a finalement pas beaucoup d’options, elle prend son courage à deux mains, lâche aussi sec la couette, garde l’insecticide au cas où, et grimpe les quelques marches d’escalier. Dès qu’elle arrive au bout, la porte en bois est entrouverte, elle la pousse délicatement, ça grince, "et merde !". Elle est habituée à subir et contenir les émotions fortes, elle l’a toujours fait, mais là c’est différent, elle redoute le moment où elle va devoir se défendre alors qu’elle en est incapable.
Ça ne manque pas, elle l’avait prédit, la voilà qui se retrouve dans la pénombre en face d’un homme petit et frêle, avec un sweat à capuche qui masque son visage. Seuls ses yeux sont éclairés par un faisceau de lumière provenant de l’étage inférieur. À deux doigts de tourner de l’œil, elle se fige, paralysée par la peur. "Les filles sont juste en-dessous !". Elle ne peut ni reculer, ni avancer, ni hurler.
À sa grande surprise, l’homme balance l’objet qu’il tenait dans la main et se précipite vers l’unique petite fenêtre qui donne sur l’extérieur. Elle n’a même pas le temps de réaliser, que l’intrus a déjà pris la fuite.
Le cœur lourd et serré, Céline reprend rapidement ses esprits, allume le grenier et se dirige vers l’encadrement de la fenêtre que cet abruti a brisé pour rentrer. Elle se fout à quatre pattes et le voit dans le jardin en train de s’échapper en boitillant. Pour sûr, il est mal tombé dans sa chute. Le voilà qui finalement escalade la clôture et disparait dans l’abime de cette nuit pluvieuse et froide.
Pendant qu’elle y pense : "Pour sûr, le rat des champs s’est barré lui aussi !".
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Koryn Bay
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