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L'expérience de Weller. -1-
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— L’expérience de Weller ?
— Le Professeur Baltus Karl Von Weller, un scientifique Allemand des années trente. Il a étudié des cas de conscience modifiée auprès de certaines tribus d’Amazonie, chez lesquelles les Chamans utilisaient deux plantes aux puissantes propriétés hallucinogènes. Ces tribus les employaient pour des rituels symbolisant le passage de leurs congénères à la vie d’adulte. Ils racontèrent à Weller, leurs visions fantastiques. Plus tard, il les expérimenta personnellement sous différentes formes car certaines tribus les inhalaient alors que d’autres les buvaient après une décoction. Il passa deux années en Amazonie au milieu de ces tribus puis Weller rentra de son expédition en mille neuf cent trente-trois. Il put mettre en place un procédé d’affinage et de décantation de ces deux plantes produisant ainsi une solution concentrée et beaucoup plus puissante que le végétal d’origine. L’arrivée des nazis au pouvoir au début de cette année là et la pression exercée sur lui pour utiliser ce narcotique à des fins peu orthodoxe le décida à quitter son pays au cours de l’été pour se réfugier en Autriche où il resta jusqu’à la veille de l’Anschluss. Puis il passa en Suisse le onze mars mille neuf cent trente-huit. Bien entendu il avait emporté avec lui tous les résultats de ses expériences de ce que lui avaient rapportés ses patients. Il appela le lieu où ils disaient s’être rendus « Réalités subjectives ». Mais par la suite ces réalités marquèrent d’une forte empreinte psychique certains de ses sujets.
En se tournant vers le Professeur Thaubh et en le montrant de sa main, le Professeur Bernard continue à relater.
— Karl a travaillé avec son compatriote au début des années soixante-dix. A la mort de Weller en mille neuf cent quatre vingt cinq, il a hérité de toutes ses études. Il y a quelques années nous nous sommes rencontrés aux Etats unis lors d’un congrès sur la physique quantique. Nous avons échangé nos points de vue sur la réalité virtuelle et nous avons finalement commencé à travailler ensemble au début des années quatre-vingt-dix. Depuis, nous avons organisés une vingtaine d’expériences de groupe avec en moyenne à chaque fois une quinzaine de sujet. Ces personnes proviennent de tous les pays. Ce n’est qu’à nos dernières expérimentations à Vancouver que nous avons été interpellés par le « vécu » de deux personnes ayant eu des visions similaires. Nous pensons qu’ils ont pénétré tout à fait accidentellement ce monde-là. Et puis aujourd’hui, il y a vous, la troisième personne qui me fait le récit du même monde dans lequel les deux patients de Vancouver ont fait une incursion. Vous comprenez pour quelle raison j’ai été troublé. Voilà Pierre vous savez tout.
Le Professeur Thaubh reprend la discussion.
— De notre côté nous souhaitons vous aider à comprendre pour quelle raison cette réalité est aussi intrusive que cela. Nous aimerions vous accompagner avant que ce monde n’interfère trop sérieusement dans votre existence propre.
Carole qui demeure sceptique reprend
— Jean, que sont devenus les deux personnes qui ont voyagé dans le soi-disant même monde que Pierre ?
— Ils sont rentrés chez eux et vivent tout à fait normalement.
— Pourrions-nous les rencontrer pour échanger avec eux, leurs propres expériences ? Car personne mieux que Pierre ne saurait reconnaître s’il s’agit vraiment de ce monde.
— Hélas, non ma petite Carole. Nos sujets d’expérimentation doivent demeurer anonymes C’est la condition à laquelle nous nous engageons.
Carole demeure dubitative. Elle fait cette moue caractéristique en fronçant les sourcils et en dessinant avec sa bouche une forme de « cul de poule ». Puis elle se tourne vers Pierre.
— Pierre, je ne la sens pas cette expérience. Suppose que ce soit un véritable monde, enfin ! Je veux dire aussi réel que celui-ci. Et tu as insisté pour nous le décrire comme tel. Alors suppose, qu’à force d’incursions tu finisses par ouvrir une porte entre ce monde et le nôtre, tu comprends, comme un passage qui demeurerait ouvert en permanence ! Dans l’état de nos connaissances actuelles, nous sommes comme de pauvres petites fourmis à ne pas connaître notre monde au-delà de notre fourmilière. D'après ce que tu en décris c’est un monde de chaos, un monde de terreur, un monde de folie. Pierre, mon chéri, si ces êtres-là tel qu’ils sont, pénètrent d’aventure dans notre monde ce sera la fin.
Pierre et Carole se regardent les yeux dans les yeux.
— Tu comprends ce que je veux te dire ? La fin de notre civilisation. Et à supposer que ce scénario tragique ne se produise pas, qui nous dit, qui peut nous affirmer qu’à un moment ou à un autre de tes incursions, tu ne demeures pas prisonnier dans ce monde …, comment l’appelle-tu déjà ?
— Le monde Noir.
— Oui, c’est cela le monde Noir, je veux dire prisonnier physiquement ou même psychiquement. Tu comprends ? Et si l’expérience que ces hommes veulent te faire subir crée dans ton esprit une fracture irrémédiable ? Tu es déjà diagnostiqué schizophrène, doublé d’une paranoïa compulsive. Rien que cela Pierre !
Carole finit sur un ton ironique.
— Jusque là tes transferts se produisaient, on peut dire naturellement. Désormais ces hommes veulent le provoquer de manière artificielle. Cela peut affecter de plus belle ton affection mentale.
Agacé depuis le début de la plaidoirie de Carole le Professeur Bernard a tenté à plusieurs reprises de lui couper la parole, puis il réussit enfin à reprendre l’initiative.
— Ma petite Carole, je t’en prie… Carole s’il te plait … ECOUTE MOI BON SANG !
Finit-il agacé d’un ton élevé et tranchant.
Tout le monde demeure stupéfait de cette réaction du Professeur Bernard. Cet homme qui jusqu’à présent semblait si enjoué, si sympathique, si plaisant.
— De quoi parles-tu Carole ? Tu ne sais rien de ces expériences. Crois-tu que nous mettrions en danger la vie de nos sujets. Mais enfin, soyons sérieux, nous sommes peut-être à la veille d’une découverte déterminante. Nous pourrions être les Christophe Colomb des mondes parallèles. Nous savons ce que nous faisons, que diable !
D’un air méprisant Carole lui répond.
— Vous ne savez rien, vous êtes comme des enfants perdus dans la nuit. Vous jouez aux apprentis sorciers, tel que Mickey dans Fantasia. Jean, jusqu’à présent tu m’amusais, j’arrivais même à te trouver sympathique et eut égard aux relations que tu as entretenus avec Papa et en tant que vieil ami de la famille je vais tacher de ne pas être trop grossière. Mais là ! Tu m’emmerdes! Tu m’emmerdes avec déférence, avec souplesse, avec diplomatie ! Mais TU M’EMMERDES !! Tu parles à l’homme que j’aime, bon sang ! Toi, tu t’en moques de Pierre sauf pour tes expériences à la con !
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11 commentaires
Sand Canavaggia
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Il y a 6 ans
Journey
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Il y a 6 ans
Tinkoubébéchou Haddock
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Il y a 6 ans
Opi-Pro
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Il y a 6 ans
ManuG
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Il y a 6 ans