Fyctia
Vers les mondes adjacents. -2-
…
— « Ce monde parallèle », nous allons le nommer ainsi, fonctionne grâce à des connexions subtiles de notre psyché, formant des vases communicants. Comme des dieux en devenir, nous engendrons la création mais nous le faisons d’une manière inconsciente. De cette manière inconsciente, nous fabriquons ces mondes aussi surement que lorsque nous fabriquons consciemment des produits manufacturés. Pour nous protéger, les sociétés humaines à travers les âges ont créé des codes que nous avons appelé coutumes. Ces rites ont évolué vers des pensées créatrices plus sophistiquées que nous avons nommées religions. Tout cela a formaté, en quelques sortes nos comportements, nos règles de pensée.
Pierre et Carole suivent la course des mots du Professeur Bernard ébahis.
— Elles sont devenues ce que nous appelons communément des « formes de pensée », générant nos préjugés. Nous l’avons fait méthodiquement, consciencieusement, créant un filtre déformant, nous donnant une vue étriquée du monde dans lequel nous évoluons. En vérité, notre réalité se projette au-delà de ce que nous percevons. C’est précisément ce que je vous expliquais samedi dernier. Je travaille avec un confrère et ami Karl Thaubh, un scientifique allemand, de grande renommée. Un physicien comme moi, mais lui, s’est spécialisé dans le domaine des particules virtuelles et par conséquent des êtres virtuels. Il développe une théorie qui consiste à penser qu’il existe d’autres univers, des réalités qui suivent leur propre évolution. Elles ne sont pas éloignées de la nôtre en termes de distance. Mais il faut les imaginer comme des milliers de systèmes de connexions étroitement enlacés, mais différentes dans leur monde de communication et là, est le facteur de la distance.
Nous sommes interrompus par l’intrusion d’un homme dans le bureau sans s’être préoccupé d’annoncer son arrivée en tapant à la porte. Je comprends alors que les deux hommes se connaissent familièrement. Le professeur s’exclame.
— Ah, vous voyez Pierre ! C’est le Professeur Karl Thaubh qui arrive de Leipzig et dont je n’attendais pas la visite aujourd’hui. Vous allez appeler cela une coïncidence car vous n’avez pas l’explication. Moi, j’appelle cela une connexion étroite dans un champ d’informations.
Les deux hommes se congratulent, il y a dans cette scène quelque chose de comique, presque de grotesque, ils sont tous les deux barbus et ventripotents. Je ne voyais pas les personnages mais deux gros ventres rentrés en collision ! Puis le Professeur Bernard se tourne vers moi.
— Karl, permet-moi de te présenter Pierre…. Oh fait je n’ai pas retenu vôtre nom de famille ?
— Maurel, Pierre Maurel.
Le Professeur Thaubh me serre la main vigoureusement.
— Je suis sûr que Jean était en train de vous parler des champs de réalité virtuelle et des influences relatives qui interfèrent entre les différents mondes.
— Figure-toi que justement c’est ce que j’expliquais à Pierre. Nous parlions de toi et des théories que tu soutiens, et voilà que tu apparais. Le hasard est curieux et il nous réserve bien des surprises.
Le professeur Thaubh reprend.
— Eh bien tu ne crois pas si bien dire Jean. Imagine-toi que je devais venir vendredi. Je me suis décidé au dernier moment de prendre le train aujourd’hui.
Le regard du Professeur Bernard s'assombrit.
— Karl, j’aimerais t’entretenir en particulier. Pierre, Carole vous m’accordez quelques instants ?
— Oui bien sûr Professeur Bernard.
Les deux hommes sortent alors du bureau pour parler plus tranquillement. Le professeur Bernard saisit le bras du Professeur Thaubh et s’approchant très prés de lui comme pour une confession, il lui relate l’expérience que Pierre a vécu sur un ton teinté de gravité. Karl Thaubh écoute très attentivement, puis interrompt l’explication de son confrère.
— Putain Jean ! Cela ne te rappelle rien ?
Ils s’observent d’un regard complice.
— Karl, j’aimerais que l’on fasse passer des tests à Pierre.
— Les tests de Weller ?
— Oui, pour situer où se trouve son esprit durant ses incursions dans l’autre monde.
— Tu veux que l’on fasse passer le test que l’on a fait passer au groupe de Vancouver ?
Demande le professeur Thaubh. Sans attendre la réponse de son collègue, il ajoute.
— Ce test est dangereux, tu en connais les risques ? Deux de nos patients ont terminé dans un hôpital psychiatrique et ils y sont encore !
— Oui mais les douze autres mènent désormais une vie normale, débarrassées de ces multiples crises qui venaient hantées leurs jours et leurs nuits. D’autres part, nos recherches ont considérablement avancé dans ce domaine grâce aux nombreuses observations rapportées par ces personnes.
— Tu sais les deux personnes qui sont internés ? Ils nous ont rapporté des faits semblables à ceux de Pierre.
— Oui mais nous n’en avons pas assez appris, j’aimerais en connaître un peu plus.
— Jean, connais-tu l’état de santé actuel de ces deux patients ?
Et sans laisser répondre Jean, Karl continue.
— Ils sont alternativement en état de délire et de catalepsie permanents. Ils sont victimes de crises d’hystérie, de paniques et phénomènes tout à fait mystérieux, ils sont marqués régulièrement par l’apparition sur tout le corps de plaies profondes et purulentes. On pourrait les assimiler aux stigmates des chrétiens. Ces plaies se referment tout autant mystérieusement pour renaître l’instant d’après à des endroits différents. On les tient depuis, attachés solidement en camisole de force !
Jean demande à Karl.
— Dans la séance d’hypnose profonde tu veux te faire assister par qui ?
— Par Levy c’est le meilleur.
— Je n’osais y penser, car il n’est pas facile de le trouver disponible.
— Oui mais pour le cas de Pierre qui est assimilé à nos deux participants de Vancouver, je sais qu’il sera accessible rapidement.
Les deux hommes retournent dans le bureau pour exposer la situation. Mais ils cachent l’essentiel.
Karl Thaubh explique à Pierre l’intérêt de l’avancée scientifique dans le domaine de l’exploration des réalités parallèles et la contribution qu’il pourrait y apporter.
— Bon Pierre, Jean vient de me parler des phénomènes qui vous perturbent. L’année dernière à Vancouver nous avons travailler avec un groupe de quatorze personnes vivant à peu près les mêmes événements que vous, mais deux d’entre eux, nous ont rapporté précisément des faits similaires à ceux que vous avez vécu. Ce qui est troublant, je dois vous l’avouer
Pierre semble à la fois surpris et rassuré, il se sent désormais moins seul.
Le Professeur Thaubh reprend.
— Vous pouvez considérer que votre conscience a trouvé un chemin de connexion, tout à fait par hasard, avec un champ de conscience complexe, en l’occurrence, le monde que vous nous avez décrit. Nous nous sommes concertés avant de vous demander si vous souhaitez vous soumettre à nos recherches avec une technique particulière que l’on appelle l’expérience de Weller.
— Cela consiste en quoi Professeur Thaubh ?
...
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