Fyctia
Chapitre 3
C’est le choc !
Et je ne parle pas de mon coup à la tête, mais plutôt de ces mots qui résonnent en moi comme un écho compact et massif.
En plus de ma vision brouillée et de mon amnésie évidente, ce sont mes autres sens qui se retrouvent ébranlés par cette nouvelle. Je n’ose même plus essayer de fouiller à l’intérieur de mon cerveau, par peur de me déclencher un autre trauma important.
— Combien de temps ?
— Combien de temps quoi ?
— Hmm hmm ! Combien de temps suis-je resté dans le coma ?
Mon interlocutrice ne répond pas. Elle semble hésiter, comme si elle considérait que la vérité serait trop pesante pour ma cervelle endommagée. À travers le voile blanc qui parasite ma vue, je crois deviner qu’elle baisse la tête et triture ses ongles.
— Un peu plus de quatre mois, se décide-t-elle à m’avouer avec une tonalité fébrile et chevrotante.
Quatre mois ? Quatre mois !
L’écho se transforme désormais en un magma qui se balade aux quatre coins de mon esprit pour le ravager de questions. Que m’est-il arrivé pour me retrouver aussi longtemps dans le coma ? Qui suis-je bordel ? Suis-je une espèce de petit caïd qui devait rendre des comptes à de mauvaises personnes ? Ou est-ce que je me suis bêtement cogné la tête après avoir chuté d’une échelle ?
Aïe ! Je me félicite d’être parvenu à me redéclencher une migraine.
Un petit massage des tempes pour tenter d’atténuer la douleur. L’impression qu’on vient m’enfoncer des aiguilles à un rythme défini et régulier. La bonne nouvelle c’est que je commence à retrouver ma vue. Ce n’est pas encore ça, mais je vois déjà un peu plus nettement le plumard dans lequel je suis allongé. Il n’y a pas de barreaux, j’en déduis donc que ce n’est pas un lit d’hôpital. Je n’aperçois pas mes jambes car je suis recouvert d’un plaid de couleur verte. Je regarde un peu plus loin et, bien que le décryptage soit plus compliqué, je m’aperçois que la pièce est grande, très grande, car le mur se trouve à plusieurs mètres du lit.
— Où est-ce que je suis exactement ?
— Vous êtes dans une maison de convalescence.
— Une maison de convalescence à la sortie d’un coma ?
— Euh … commence-t-elle, comme déstabilisée, surprise par la lucidité dont je fais preuve après quatre mois de sommeil profond (en toute modestie). Pour ce genre de questions, je préfère laisser le Docteur vous répondre. Il vous expliquera les choses bien mieux que moi.
Mouais. Argument moyennement convaincant. J’esquisse un rictus et la regarde. Son visage m’apparait maintenant plus clairement. Elle a l’air assez jolie en fait. Des yeux verts, un nez cléopatrâl et une bouche en cœur. De quoi me faire instantanément tomber sous le charme. Bien que ses propos soient plutôt équivoques depuis le début.
— Et vous, c’est quoi votre rôle ici alors ?
— Je suis infirmière, me répond-elle avec un sourire radieux.
— Je vois … et c’est quoi votre prénom ?
— Marianne.
Je lui tends la main, histoire de faire les présentations en bonne et due forme. Elle me rend la pareille et c’est étrange parce que lorsque nos paumes se touchent, je ressens une chaleur agréable. J’ai la sensation de la connaître depuis longtemps, voire depuis toujours.
— Évitez de me planter vos ongles cette fois (j’ignore encore qui je suis, mais je suis poilant comme type).
— Je suis désolée, dit-elle en riant, je crois que je me suis un peu trop immergé dans votre cauchemar.
Cette fois-ci, c’est à mon tour de sourire à pleines dents. Ce petit grain qu’elle a dans la voix me fait littéralement craquer. Néanmoins, je me demande si ce n’est pas l’effet « première personne que je vois après une longue absence cérébrale ».
— J’ai simplement noté que vous passiez aisément de la tendresse à la violence.
En disant cela, je commence à me demander si je ne suis pas dans un mauvais remake de Misery.
— Je vais chercher le Docteur, répond-elle en balayant ma remarque.
Ouf ! Me voilà rassuré ! À moins que je ne sois dans un scénario encore plus complexe où j’ai été kidnappé par un groupe de personnes qui veulent me soutirer des informations capitales. Malheureusement pour eux, je serai dans l’incapacité de leur dire quoi que ce soit.
— Merci, Marianne.
J’ignore si c’est de nature, mais je me surprends à avoir une voix rauque, un brin séductrice. Peut-être que je n’ai aucun souvenir de ma vie passée, seulement une chose est sure, j’aimais les femmes.
La voilà qui se lève et se dirige vers la porte à l’extrémité de la pièce. Avant de sortir, elle me jette un dernier regard et affiche un petit sourire en biais dont je ne saisis pas forcément le sens.
Je suis maintenant seul face à mes pensées. Je cogite, je cogite, sans pour autant essayer de remuer ma mémoire. Je me demande comment se fait-il que je me souvienne de Joe Cocker et de Misery alors qu’il m’est impossible de savoir ce que j’ai fait pendant toute une vie. Je vais tout de même tâcher de rester positif car je suis sur une bonne lancée. Ma vue revient, ma gorge est un peu moins irritée et je n’ai plus ce mal de crâne incessant qui me donnait envie de m’auto-décapiter (OK, j’avoue, un peu excessif). Oui, je vais me concentrer sur cet aspect encourageant plutôt que de me morfondre. Était-ce un pan de ma personnalité ? La positive attitude ? Je l’espère ! Parce que désormais, je vais devoir réunir tout le courage nécessaire pour lutter contre le néant. Pour réunir toutes les pièces du puzzle et avancer dans ce labyrinthe aux issues invisibles. Mais voilà, je suis pleinement éveillé, ma capacité à réfléchir est intacte, je vais me contenter de ça pour l’instant.
C’est bon, je me sens prêt !
Presque prêt à affronter l’inconnu.
97 commentaires
Marie Andree
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Il y a 10 mois
Jay H.
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Il y a 9 mois
clecle
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Il y a 10 mois
Jay H.
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Il y a 10 mois
Eva Boh
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Il y a un an
Jay H.
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Eva Boh
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Jay H.
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Jay H.
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Il y a 10 mois