Fyctia
Chapitre 2
« Jonathan ? »
C’est alors cette douce voix qui vient m’extirper du tunnel sombre et sinueux dans lequel j’étais coincé.
Il m’est impossible de comprendre ce qu’il se passe, j’ai mal à l’arrière du crâne, une terrible migraine cogne ma nuque et mes tympans. Mes yeux sont encore recouverts d’un voile opaque, j’aperçois un filet de lumière qui amplifie d’autant plus la douleur et je peine à ouvrir mes paupières lourdes et pesantes.
« Doucement. Prenez votre temps pour ouvrir les yeux. Vous avez dormi longtemps. »
Soudain, je commence à distinguer un semblant de silhouette auquel je peux rattacher cette tessiture apaisante.
Mon Dieu, qu’est-ce qu’il m’arrive ? Où je suis bordel ?
Je tente de parler mais le son qui sort de ma bouche ressemble plus à un bougonnement tout juste audible et absolument incompréhensible. De l’eau ! Ma gorge est sèche, elle me gratte, je m’efforce d’avaler le peu de salive qu’il me reste. Mes lèvres, elles, sont gercées, et lorsque j’y passe ma langue, je ressens de minuscules craquelures.
Où est passé la silhouette ?
Aïe ! Mais merde, qu’est-ce que j’ai ? Je n’arrive pas à bouger mes jambes. C’est d’ailleurs mon corps entier qui est immobilisé, enfoncé dans un matelas dont j’aurais pu apprécier la souplesse dans une autre circonstance.
— Tenez, prenez ça.
La jolie voix féminine est de retour, je l’entends qui dépose quelque chose tout proche de moi.
— Attendez, je vais vous aider à vous redresser.
La voilà qui glisse délicatement une main derrière mon dos et qui agrippe mon bras (avec bienveillance). Je suis surpris par la fermeté avec laquelle elle me soulève malgré sa délicatesse. Mes yeux sont toujours voilés et je ne parviens pas à prononcer le moindre mot, ni même à articuler correctement mes pensées.
— Je … Hmm …
— Ne forcez pas trop pour l’instant, me répond-elle d’un ton autoritaire. Avalez-ça.
Lorsqu’elle s’exprime, elle a ce petit grain très agréable pour mes oreilles sensibles. Moi qui me demande encore dans quel endroit j’ai atterri et surtout, pourquoi je suis sonné comme ça. J’imagine que c’était une sacrée cuite, mais c’est le trou noir, impossible de me souvenir de ce que j’ai fait la veille. D’ailleurs … qu’est-ce que j’ai fait les jours précédents ? Aïe ! Mon crâne bordel !
— Qu’est-ce … Hmm … Qu’est-ce que c’est ?
Allez là ! J’arrive à parler, c’est magnifique ! Seulement, ça me demande un effort surhumain, pas sûr que je puisse tenir une vraie conversation pour l’instant.
— Un antalgique pour la douleur.
— Hmm … Un antalgique ou un analgésique ?
Je ne sais même pas d’où me vient une telle question, mais elle me vient. Elle, laisse un blanc avant de rétorquer :
— Quelle différence ? L’essentiel, c’est de faire passer la douleur.
Sa réponse est tout aussi étrange que ma question. Je me suis peut-être réveillé dans un monde parallèle, va savoir. Je m’exécute, je pose le cachet sur ma langue, puis elle me donne à boire tel un gosse de deux ans ou un invalide. Lorsque qu’elle penche ma tête en arrière, mes paupières s’ouvrent en grand. C’est alors que je commence à distinguer le décor qui m’entoure. Le plafond, l’extrémité du verre d’eau, ses cheveux blonds coiffés en chignon. En revanche, je ne perçois pas encore les détails de son visage, l’image est floutée, j’ai l’impression d’être de retour à l’adolescence à tenter de regarder un film interdit sur une chaîne cryptée.
Après m’avoir abreuvé non sans mal, elle repose le verre sur un meuble et me fixe. Je ne vois pas ses yeux, je les devine à travers le rideau de pixels qui s’interpose entre nous. Je crois d’ailleurs qu’ils sont bleus, mais je ne pourrais pas l’affirmer.
La voilà maintenant qui s’assied à mes côtés. Elle pose lentement sa main sur le revers de la mienne, puis se met à chuchoter :
— Comment vous vous sentez ?
— À vrai dire, hmm, maintenant que j’ai bu, un peu mieux, mais, hmm, j’ai une forte migraine. Ça cogne fort.
C’est dingue, dès que je m’exprime à voix haute, j’ai l’impression que le fantôme de Joe Cocker habite mon corps.
— C’est normal, vous avez eu un gros choc à la tête. Vous vous souvenez de ce qu’il s’est passé ?
Hallucinant ! Dès que j’essaie de faire travailler mon cerveau, c’est ma tête entière qui en pâtit, comme si j’essayais de nager sans bouée dans un océan abyssal et interminable. Mon esprit est obstrué par la pénombre et je ne sais pas comment me sortir de ce bourbier.
— Hmm … Non. Je ne suis même pas sûr de pouvoir me rappeler ce que j’ai fait durant ces dernières heures.
— Votre prénom, votre âge, peut-être ?
Je décèle dans le ton qu’elle emploie une forme d’amusement, je suppose qu’elle cherche à me taquiner gentiment. Je peux quasiment arriver à déchiffrer un rictus au coin de ses lèvres.
— Je crois que je m’appelle (oh merde !) … Hmm ! Jonathan !
— Oui, c’est ça. Du moins, c’est ce que disent vos effets personnels.
Elle marque une pause, puis reprend.
— À votre réveil, vous étiez très agité, en sueur. Vous avez fait un cauchemar ?
Wow ! Alors là ! Je n’arrive pas bien à cerner si cette femme cherche à m’aider ou à m’achever. Déjà, pour le commun des mortels, se souvenir d’un rêve, c’est compliqué, alors pour moi !
— Vous m’en demandez trop là …
Au moment même où je prononce cette phrase, je regarde ses cheveux et ça fait tilt !
— Attendez … Hmm, je me rappelle d’une chose oui. Je rêvais d’une jeune femme.
— Une femme ?
— Oui, hmm (j’en ai ras-le-bol de devoir m’éclaircir le gosier à chaque phrase !), une belle femme. Très belle même ! Mais je crois qu’elle mourait et que je ne pouvais pas la sauver … Aïe, bordel !
Je retire ma main d’un geste spontané et je tente de faire disparaitre les picotements. La vache ! Elle a de sacrés ongles !
— Désolée, rétorque-t-elle comme une enfant qui aurait bravé un interdit. Je crois que j’étais en train de vivre le cauchemar avec vous.
La voilà qui émet un petit rire pour accompagner ses paroles. J’ignore si c’était embarrassé ou simulé, mais quoi qu’il en soit, ça n’avait rien de naturel.
— Vous pouvez me dire où je suis ?
— Euh … vous êtes dans une clinique privée.
— OK. Et comment j’ai atterri ici ?
— Vous ne vous souvenez vraiment de rien alors ? Absolument rien ?
Je me pince les lèvres et secoue la tête. Si je pouvais me remémorer ne serait-ce qu’un début de détail, je sortirais d’ici pour faire la fête. Quoi que, vu mon état, peut-être pas !
— Nous ne savons pas comment cela s’est produit, mais vous avez reçu un choc violent à la tête. Vous êtes resté un moment dans le coma, puis vous vous êtes progressivement réveillé … jusqu’à ce qu’on vous transfère chez nous.
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