Fyctia

J'arrive en avance, 6h. Je rassemble une immense table et un grand tableau bien en face. Je colle des chaises tout autour, je suis prête.

J'ai ramené des Thermos de café dignes de ce nom et j'ai demandé à Sandy de venir avec des croissants et des pains au chocolats. Je lui ai fourni la recette de pâte feuilletée de ma grand mère et elle était déjà aux fourneaux à 5 heures quand je me suis levée. Je ne sais pas ce que je ferai sans elle !

Les premiers arrivent.

— Entrez et installez-vous, j'ai un coup de fil à passer.

Je sors sur l'esplanade et choc : Anton est en train d'arriver.

Purée qu'il est beau et impressionnant ! Le charisme, l'assurance, tout ce que je n'ai pas. C'est pas juste d'être favorisé comme ça par la nature ! Mais c'est vraiment pas le bon moment !

- Anton ? Mais qu'est ce que tu fais là ?

- Lila, tu as besoin de moi, alors je viens !

- Non, non non ! Faut pas que les gars te voient ! S'il te plait, vas-t-en ! Je veux pas qu'ils pensent que je fais rappliquer le patron à la moindre anicroche ! Tu peux pas me faire ça ! Oui j'ai besoin de toi, mais juste de te parler. Je veux gérer ! Je dois gérer !

- Non, Lila, je vais les recadrer et vite fait. Sandy m'a raconté.

— Alors c'est pour ça que son téléphone sonnait occupe ?

Je le regarde, furieuse. Il n'est pas question qu'il vienne jouer les sauveurs après m'avoir envoyée au casse pipe.

— Je croyais que tu me faisais confiance Anton ! Il n'est pas question que tu sois présent à cette réunion, vas-t-en immédiatement, sinon c'est moi qui rends mon tablier !

— Lila, je te fais confiance. Maintenant que ça se complique, tu as le droit de me passer le relais.

— Je ne suis pas d'accord du tout ! Tu peux pas me donner les rênes juste pour pouvoir me les reprendre comme ça.

— Je suis ton boss Lila. Je fais ce que je veux, et je n'accepte pas que quiconque s'en prenne à toi. Mais puisque tu insistes...Je te laisse mener, mais j'écouterai.

— Non, tu rentres dans 30 minutes seulement, et interdit de parler, sauf si c'est moi qui t'adresse la parole.

Je bous de fureur et de déception.

Il me soulève le menton et plonge ses grands yeux marrons dans les miens soulevant une vague de sensations troublantes. J'avais oublié son magnétisme et l'effet qu'il me faisait.

— Lila... me souffle-t-il, Je ne supporte pas qu'on puisse te faire du mal. Tu es trop précieuse... et c'était un excellent prétexte pour te revoir... ici.

Je suis retournée.

Je recule, en secouant la tête. Non... je suis bien toute seule, à gérer, enfin à peu près. Et euhhh, là, c'est pas tout à fait la raison à laquelle je m'attendais pour justifier sa présence.

Je me tourne sans rien ajouter.

Hayden nous observe de loin.

Super, bon timing

— Bonjour à tous !

Sandy a préparé un merveilleux petit déjeuner, elle a fait les croissants à partir de la recette de ma grand mère et je compte bien sur ces petites merveilles pour que vous convaincre que tout ce qui est français n'est pas forcément bon à jeter ! Alors si vous vous régalez, évitez de ne pas me dévorer avec !

Je souris d'un air de les supplier.

Je les voie s'ébrouer. Ok, ça détends un peu l'atmosphère.

Bon, merci d'être là. Comme vous le savez, un certain nombre de soucis ont été remontés par Hayden.

Hayden nous fera un résumé.

Ensuite, on va travailler ensemble sur leur résolution.

Hayden ?

Au bout de 3 heures de réunion, une grande partie du plan a été révisée. Certaines équipes bosseront différemment. Je prends des notes de tout ce qui a été décidé, la manière dont les choses ont été solutionnées pour améliorer le résultats en respectant le cahier des charges environnemental. Quelques concessions ont été faites, mais dans la majorité, un consensus a été trouvé.

Je sors avec des courbatures. J'ai emmagasiné une tension phénoménale dans chacun de mes muscles. Je suis épuisée. Je m'étire en sortant. Souriant aux gars qui sortent avec moi.

Anton m'attends dehors, après avoir serré la paluche de tous les gars présents, glissé un mot à chacun d'eux. Il est en terrain conquis. Les gars lui parlent comme à un des leurs, et moi je me sens minable.

Je m'éloigne en direction de ma voiture, je n'en peux plus. Je n'ai même pas envie de lui parler.

— Lila, je viens vous chercher ce soir à 20h, on va diner ensemble.

Les gars ont tout entendu. Putain, je le déteste ! Il va laisser croire qu'il y a un truc entre nous et que je suis pistonnée pour des faveurs peu respectables anéantissant toute la confiance que j'avais gagnée.

Hayden semble me regarder avec mépris et me lance un regard très sombre. Il me tourne le dos et pars en direction de son pickup les épaules remontées.

Mince, je voulais aller le remercier en plus. Il peut pas repartir fâché comme ça !

— Anton, OK. Mais attendez-moi une seconde s'il vous plaît. Je dois parler à Hayden.

Maintenant c'est lui qui a un regard noir. Ben super... moi qui voulais arranger les choses. Je me retrouve avec deux problèmes au lieu d'un.

— Hayden ?

— Quoi encore !

— Je voulais vous remercier. Je n'osais pas espérer qu'on arriverai à démêler autant de problèmes en une seule séance et c'est clairement grâce à vous si on a autant avancé. Je n'ai pas forcément été très sympa, mais je vous assure que ça m'a touchée. Merci.

— Ouais, comme ça vous saurez désormais qu'on est des mecs civilisés et pas juste des connards bas du plafond. Allez manger avec votre boss, vous pourrez lui faire les yeux doux, on dirait bien que ça marche avec lui !

— Si c'est la seule chose qui vous rassure pour justifier qu'une femme de mon âge puisse piloter un tel projet, libre à vous. Je venais juste vous dire merci. Bonne soirée à vous aussi. J'espère bien en profiter pour ma part.

— Ouais, moi aussi je pense bien profiter de ma soirée. Vous n'êtes pas la seule gonzesse en ville et la chair fraîche locale n'a rien à vous envier !

— Oui, c'est ça, vous êtes bien un homme des cavernes à considérer les femmes comme de la viande ! Bien heureuse de ne pas passer la soirée avec vous !

La voix grâve d'Anton me fait sursauter :

— Lila, un problème ?

— Non, je crois qu'on s'est tout dit. Bonne soirée Hayden.

Anton me pousse vers sa voiture en posant une main sur mon épaule. Je m'éloigne brusquement pour me dégager.

En fait, je ne veux pas qu'il montre à Hayden de quoi justifier une quelconque suspicion de promotion canapé. De plus, je veux pas que Anton crois qu'il est en terrain conquis. Sauf qu'Anton semble vouloir croire et faire tout le contraire.

J'entends le moteur de la voiture d'Hayden rugir et il s'éloigne dans un nuage de poussière.

OK, ça fait beaucoup trop de testostérone pour moi. Je n'ai qu'une envie, c'est d'aller me coucher, mais je dois encore parler à mon boss.