Fyctia
Belle étoile
— Allez c'est par là.
OK, donc, en gros, faut pas le contrarier...
Nous débouchons enfin près du lac. Des roseaux nous cachent encore la vue, et je sens que cela va être magique.
La lumière du soleil d'automne, les feuilles jaunes et rouges des arbres, le scintillement du lac et le sable fin qui le borde, c'est totalement irréel. L'air frais m'a donné des couleurs et j'ai les yeux qui brillent.
Les bruits des oiseaux, le vent dans les roseaux, le clapotis du lac avec un léger ressac. j'ai aussitôt envie de courir, de ramasser un bout de bois pour dessiner ce qui me passe par la tête, de toucher l'eau, de contempler en silence... Tant d'envies, tant de plaisir en même temps et je découvre que mon coeur fait des gros boums.
Je ne sais pas ce qui me prends mais je saisis subitement sa main et la pose sur au dessus de ma poitrine pour qu'il le sente. Ce qu'aucun mot ne peut exprimer...
Oui, je ne peux pas prononcer un mot et c'est le moyen le plus évident de lui faire comprendre ce que je ressens.
Il semble surpris de mon geste. Sa main chaude est sur mon pull, mais le bout de ses doigts touchent ma peau. Il la carresse de manière imperceptible.
Il me prends lui aussi la main et la pose aussi sur son torse.
— Vous sentez aussi ? Ca me fait la même chose, à chaque fois que je viens.
Enfin, il bat juste un peu plus fort aujourd'hui.
Je suis face à lui, à côté de ce lac gigantesque et nous écoutons battre nos coeurs...
Je recule. Je ne pense pas etre allée trop loin. Mais on peut pas rester comme ça, ça va devenir louche.
— Tu veux me montrer les bâtiments ? Je sais que ce n'est pas ça, dis-je en désignant le paysage, mais il faut que je les voie.
— A vos ordres, vos désirs sont les miens.
Sa voix rauque me fait frissonner.
Purée, mais arrête ! Il arrive à me chambouler à un point !!! Et puis il est sérieux, il me fait des avances ?
Nous retournons sur nos pas, et j'en profite pour admirer les arbres, les plantes qui y poussent. Chaque plante est un indicateur de la qualité du sol, de sa composition, des combats qui y sont menés par chaque être vivant qui y habite. Cet endroit est encore sauvage, et il est essentiel d'éviter qu'il ne soit pollué. Comment nettoyer les traces humaines sans le piétiner ?
— Anton ?
— Oui ?
— Nous restons combien de temps ?
— Celui qu'il faudra.
Bon, ben s'il a décidé de répondre de manière aussi précise à toutes mes questions, je sens que ça va être très très compliqué !
Je décide de le suivre et de me laisser porter. Ce sera la seule fois du projet; hors de question de laisser faire ensuite si je veux gérer. OK, il est le boss, OK il décide, mais c'est moi qui mène.
Nous avons fait le tour des bâtiments, il m'a évoqué les grandes lignes de ce qu'il imaginait, et surtout les grands principes : Dépollution et ne pas laisser de trace. Redonner la place à la vie sauvage, et y gouter avec respect.
Il se fait tard, 19h et le soleil est vraiment en train de se coucher; Les minutes d'or, celle où la lumière devient irréelle sont déjà passées depuis un moment. Je frissonne un peu.
— Il est temps de rentrer tu ne crois pas ?
— Tu n'as pas faim ?
— Euh, si ! On a oublié de manger à midi.... c'est vrai.
— Reste là, on retourne à la plage de tout à l'heure, j'arrive.
Le voici qui repars en direction du pick-up, un panier et un gros sac à dos avec lui.
Je le suis, intriguée et un peu inquiète... on en a pour 40 minutes aller-retours puis 3 heures de route... On sera de retour à l'agence vers 23h30 au mieux et demain j'ai une présentation à toute l'équipe. Je voulais être en super forme.
Je le suis en silence.
Il sors une frontale, et nous débouchons enfin sur la plage.
Il me tends une autre frontale : du bois s'il te plaît !
OK ! Je pars en expédition à la recherche de branches mortes et bien sèches. J'en prends de toutes les tailles et reviens au bout de 20 minutes bien chargée.
Il me regarde :
— Bien, je vois que tu sais faire un feu ! c'est parfait.
Il s'active, il avait déjà créé un foyer avec des pierres, il sors un trépieds de son sac, une gamelle qu'il suspends et vide une gourde de soupe dedans.
Il s'active, il avait déjà créé un foyer avec des pierres, il sors un trépieds de son sac, une gamelle qu'il suspends et vide une gourde de soupe dedans
je souris amusée. Il avait tout prévu !
— Sympa !
— Tu dors à la belle étoile cette nuit.
— Hein ? Quoi ? toute seule ?
— Tu veux pas t'imprégner ?
— Mais....
— Ah Ah Ah ! tu devrais vraiment tenter. Je l'ai fait la dernière fois, c'était, certes un peu humide, mais génial.
— Je suis un peu inquiète quand même. Ca ne craint pas ?
— Non, y 'a pas de grizzlis ici ! Juste quelques pumas...
— Donc tu me fais dormir dehors avec les bêtes sauvages pendant que toi tu es où ?
— Avec toi Lila. Je vais pas te laisser toute seule !
Je sais pas si c'est le soulagement ou si c'est l'idée de me retrouver seule la nuit avec lui, mais j'ai le ventre qui fait des vagues.
— Tu sais que je n'ai pas pris de brosse à dent ?
— tadaaa
— et un duvet ?
— tu penses que je n'y ai pas pensé ?
Allez, viens, on va s'installer.
Une fois les couvertures installées, à distance respectable l'une de l'autre, mais un peu trop proches à mon gout quand même, je m'assois posant ma tasse de soupe sur mes genoux, et nos regards se perdent dans les lueurs du feu.
Plus besoin de parler, on savoure et cela suffit.
— Merci Anton
Les mots sont sortis en français, sans que je ne m'en aperçoive.
Il me regarde plissant légèrement les yeux. Son regard est intense et je me sens tout à coup me liquéfier. Je perds mes moyens.
Je détourne mes yeux vers le feu et ne dis plus rien pendant de longues minutes. Je ne sais pas s'il me regarde ou s'il est perdu dans ses pensées.
— Au dodo ! Demain, tu as une présentation. Il faut que tu assures.
Je me glisse dans le duvet, il a son odeur. Les étincelles s'envolent dans le ciel, et progressivement les étoiles se révèlent. Les oiseaux et autres animaux de la nuit se font entendre, et le silence s'installe. Je n'ose pas bouger d'un millimètre. le bruit du duvet romprait le charme.
Je le sens qui ne dors pas non plus. Mes sens sont en alerte, je n'arrive pas à dormir.
Tant de sensations !
il remue un peu, j'entends les graves de sa cage thoracique lors de sa respiration. C'est imperceptible, mais il raisonne et je le sens vibrer à travers le sol.
Je voudrai tendre la main pour qu'il la prenne, qu'on partage ensembles ce moment. Mais je n'ose pas, il garde la distance, c'est mon patron.
Et moi je veux rester professionnelle... Je m'endors finalement.
15 commentaires
FleurDelatour
-
Il y a 3 ans
iris monroe
-
Il y a 3 ans
Morgane Rigan
-
Il y a 3 ans
ElsaBianchi
-
Il y a 3 ans
Mary Cerize
-
Il y a 3 ans
Amandine L.B.
-
Il y a 3 ans
ElsaBianchi
-
Il y a 3 ans
Amandine L.B.
-
Il y a 3 ans
ElsaBianchi
-
Il y a 3 ans
Andrée Martin
-
Il y a 3 ans