Fyctia

Sa voiture, forcément un pickup m'a vraiment surprise. Pas du tout pickup de luxe, mais plutôt pickup tout terrain, ayant pas mal voyagé. Au fond, ce genre de véhicule, bien que gros émetteurs de CO2 est un vrai utilitaire et je suis pas là pour faire des ronds de jambes mais parcourir un parc de plusieurs dizaines d'hectares avec lui afin de bien comprendre les atouts.

Un gros gobelet de café m'attends à côté du sien.

— Je vous ai pris un café, il y a aussi un peu de crème chantilly et du cacao amer.

— Oh merci, je ...

J'hésite, je vais gouter, mais si je déteste, il va le prendre mal, il n'y a que les français pour dire vraiment ce qu'ils pensent quand ce n'est pas bon. je peux prétexter n'aimer que le thé, mais il m'a vu avec du café que j'avais ramené de chez moi, pas terrible, j'ai pas encore trouvé le bon équipement.

Je trempe mes lèvres après avoir dit merci.

Etonnamment le fumet qui sors de la tasse est délicieux. De surprise je dis :

— Il est bon !?

— Ah ah ah ! J'espère bien qu'il est bon, c'est moi qui l'ai fait ! Je ne l'aurai pas avoué si vous n'aviez pas aimé... Alors, le cacao amer ?

Je rougis, léchant la crème chantilly sur mes lèvres. Je vois ses yeux regarder et s'attarder sur ma bouche. Je rougis encore un peu plus.

— Le problème c'est que vous allez devoir m'en faire un tous les matins maintenant !

— Je crois que je vous donnerai la recette plutôt. Vous pourrez essayer de m'en faire un de votre cru la prochaine fois.

— Dans ce cas, vous me direz où vous avez trouvé votre cafetière ou votre machine parce que je désespère. Sans un bon café, je ne suis vraiment pas au top de ma forme.

— Vous passerez chez moi, je vous montrerai.

Je le regarde avec surprise, mais il est attentif sur la route, et ne rajoute pas un mot.

— Anton, vous savez si le chef de chantier sera là aujourd'hui ?

— Non, juste nous deux. Il n'y aura personne d'autre. Vous rencontrez John plus tard. Je veux que vous vous imprégniez des lieux. Je veux que vous puissiez ressentir profondément en vous leur magie, que vous puissiez voir comment garder le souvenir des jeux d'enfants qui s'y sont déroulés, comment les native americains qui habitaient sur ces terres ont pu vivre pendant les siècles précédents. Vous devez trouver l'alchimie qui redonnera vie à ce lieu pour en créer un véritable lieu de joie et de partage, et que chaque visiteur puisse s'y sentir chez lui. Je veux que vous sentiez les odeurs, que vous goutiez cette terre, que vous fassiez connaissance avec la faune.

Vous adapterez ensuite les plans pour faire passer ça. Ce sera la touche finale, celle qui doit convaincre nos clients.

J'espère que vous avez pris des vêtements chauds, on va passer notre temps dehors.

— Oui, bien sûr !

Je n'ose plus rien dire. Oui, c'est un programme incroyable. Non mais quelle chance j'ai !

Nous ne sommes que tous les deux. Son assistante Chelsea a disparu de la circulation depuis maintenant deux semaines, soit juste une semaine après mon arrivée. Personne n'a fait de commentaires.

Ce silence m'a surprise, généralement il y a toujours des motifs qui circulent, mais là, rien. Pas un mot.

Soit ils ne l'aimaient pas et ne savent pas la raison de son départ, soit ils le savent mais ne peuvent en parler... ordre du big boss ?

Bon, résultat, je suis seule avec mon boss, un mec d'un charisme de dingue, en route pour découvrir un lieu de vacances abandonné et "m'imprégner"... énorme !

J'ai bien l'intention d'assurer, il faut que je prenne les choses au sérieux, et surtout pas me laisser tenter par le charme du type.

Sa mâchoire, sa pomme d'Adam et son nez.. oui, il doit être clairement bien outillé, surtout si on voit aussi la taille de ses mains.

Non mais arrête ! j'ai dit on bosse ! c'est ton boss ! foire pas tout !

Sauf que la voiture est remplie de sa testostérone et que je dois probablement lui envoyer instinctivement toutes mes phéromones dans la tête... L'atmosphère est... chargée.

Au bout de 3 heures de route, nous arrivons enfin. On a discuté de tout, de rien. Il m'a raconté son parcours, que des sujets pros et pas très essentiels, c'était fluide. Au fond, il est accessible et sympa.

La voiture s'engage sous un grand porche en bois. Un chemin en caillou large nous emmène jusqu'à une esplanade où on distingue de grands bâtiments en bois, des hangars derrière, et une série de baraquements alignés un peu plus loin. Le tout, donnant sur le lac Michigan.

Je le regarde et je lui dis :

— Ca va faire long les allers-retours... Il faudra peut-être que je prévoie un endroit pour dormir et rester plusieurs jours. Ca évitera de perdre trop de temps en trajets. Et euh, ça veut dire qu'on va rentrer tard si on veut avoir fait un minimum le tour de cet endroit.

Il me regarde, et il me dit :

— Chut... Déstressez ! Respirez ! Ecoutez !

OK OK.... Pour le moment, la magie des lieux n'opère pas beaucoup sur moi. Trop de signes de civilisation, de travail en perspective...

Il prends ma main, et m'entraine.

— Venez, je dois commencer par là avec vous.

Une petite étincelle traverse mon ventre lorsque je sens sa main chaude m'enserrer le poignet. Il me tire derrière lui, et nous avançons sur un petit sentier dans les arbres. Il me lâche et nous poursuivons notre chemin. Il marche bien. Je le vois parce qu'il sait poser ses pieds et avance avec une très grande régularité, en puissance. Je devine le lac à travers les arbres, et je sens que je vais adorer ce que je vais voir.

Nous traçons la route encore pendant près de 20 minutes.

— C'est encore loin ?

Il se retourne légèrement mécontent.

— Un peu de marche, c'est trop difficile pour vous ?

choquée par sa question orientée, je lui rétorque aussitôt :

— Pourquoi ce le serait ?

Il s'arrête brusquement et je le percute. Il me retiens par les bras, me recule pour mieux me jauger.

Oh mon dieu, oh mon dieu... j'ai dis une connerie.. 2 fois. Et il me tient dans ses bras...