Fyctia
Chapitre 8.1
11 juillet 2011, GWEN
Après avoir passé encore deux bonnes heures dans l’eau, à chercher je ne sais quoi, je suis retournée m’asseoir sur mon siège d’avion trempé et tout abîmé suite à la chute d’une bonne centaine de mètres d’altitude. Je m’étais “confortablement” installée dessus, avais plongé la main dans l’une des poches d’un petit sac à dos que j’avais dégoté pour en sortir un semblant de barre de céréale. L’emballage ne ressemblait plus à grand-chose mais le contenu était encore bon. L’eau salée de l’océan n’était pas parvenue à pénétrer le papier. Après l’avoir délicatement ouverte, je la mangeai. Elle était plutôt bonne, il y avait du chocolat ainsi que des fruits secs tels que des cacahuètes et des amandes. Mon oléagineux préféré – la noix – ne s’y trouvait pas, malheureusement.
C’est à cet instant, que je me suis rendue compte qu’on avait dérivé, j’apercevais ce qui pouvait ressembler à de la terre. J’y trouverais peut-être de l'aide, qui sait ? Si c’était ce que je croyais, j’allais probablement m’en sortir.
Je me suis mise à ramer avec les mains de plus en plus vite. Je ne voulais pas lâcher le siège, car tout ce que j’avais pu récolter, y était posé.
Je ramais sans relâche, mes muscles commençaient à me faire souffrir, je devais certainement être rouge écarlate à cause de l’effort, j’avais la tête qui allait exploser. Au plus j’avançais, au plus l’eau se réchauffait. Elle se réchauffait jusqu’à atteindre une température plus ou moins supportable. J’avais comme l’impression de revivre. Ce peu de chaleur me faisait déjà un bien fou.
Vingt minutes plus tard, je posais le pied sur la plage. J’ai aussitôt enlevé mes chaussures et mes chaussettes qui étaient plus que mouillées pour plonger mes pieds nus dans le sable qui commençait à devenir chaud. Quelle sensation incroyable. Je n’avais qu’une envie, me jeter dans le sable.
L’île était extrêmement petite, d’ailleurs, je ne sais même pas si l’on peut appeler cela ainsi parce que là, c’était juste un petit bout de terre. J’ai ensuite rassemblé les dernières forces qu’il me restait pour sortir le siège de l’eau et le poser sur la plage à l’abri de la mer, des vagues mais aussi de la marée. Car je ne savais pas vraiment jusqu’où l’eau pourrait monter. Je me suis donc repérée grâce à une légère marque dans le sable. Qui, il me semble, indiquait la hauteur maximale de l’eau.
À bout de force et complètement épuisée, je me suis effondrée sur le sable et je me suis aussitôt endormie.
Ce n’est que lorsque le soleil commençait à toucher l’horizon, que j’ai ouvert les yeux.
J’étais anéantie, il n’y avait pas d’autres mots, j’avais perdu les deux seuls parents qui comptaient à mes yeux. J’étais seule, désespérée et en plus de cela, je ne savais même pas si j’allais m’en sortir. Je me suis alors assise sur le sable, les jambes recroquevillées contre la poitrine, ma tête plongée dans mes genoux et mes bras qui entouraient mes jambes. Je ne bougeais pas, j’étais immobile. Comme si on avait fait pause.
Après deux bonnes minutes à être restée dans cette position à pleurer, je me suis enfin décidée à relever la tête. Toujours avec les gouttes qui coulaient à n’en plus s’arrêter. J’avais mal aux joues tellement mes larmes irritaient ma peau à force de les essuyer. J’ai alors regardé droit devant moi, ce magnifique ciel bientôt étoilé et c’est là que je lui ai parlé pour la première fois depuis mon réveil dans l’eau glacée de l’océan Atlantique. J’ai donc relevé la tête plus haut dans le ciel et je me suis adressée à mon père.
− Salut papa, …
Ces mots avaient été si durs à prononcer qu’ils étaient à peine sortis de ma bouche. Je les ai presque murmuré. Même moi, je n’étais pas sûre de les avoir dis, de l' avoir sorti de ma bouche, j’ai comme l’impression de simplement les avoir pensé. J’ai fini par reprendre :
− … je ne sais pas si tu y es déjà. Dans l’au-delà j’entends…
Je ne sais même pas si il en existe un, j’essayais juste de me rassurer comme je pouvais.
− … mais j’espère que tu as pu enfin retrouver maman, la femme de ta vie. J’espère aussi que tout va bien, où que tu sois.
J’ai dû reprendre mon souffle quelques secondes avant de reprendre.
− je pense fort à toi, j’ai sans arrêt ta voix dans ma tête qui ne cesse de me répéter en boucle cette phrase que tu m’as tant dite durant toutes ces années passées auprès de toi. « ça va aller Gwen, sois forte, tu peux le faire ! ». c’est ce qui me pousse à continuer, à rester en vie. Si je fais tout ça, c’est pour toi, pour maman et pour Marie aussi évidemment.
Je t’aime, je vous aime tous tellement. Je ne cesserai jamais de vous aimer. Vous étiez tout ce que j’avais. C’est horrible de dire ça, mais j’aurais tellement voulu mourir avec vous parce que c’est tellement difficile de vivre avec la mort de trois proches, la mort des trois personnes qui comptaient le plus pour moi. Je n’arriverai jamais à vivre sans vous, comment pourrais-je y arriver ?
Je pleurais tellement, j’avais beaucoup de mal à respirer, je tombais à court d’oxygène. Il fallait, j’avais besoin de reprendre mon souffle. Environ cinq minutes plus tard, après avoir retrouvé un rythme cardiaque et une respiration plus ou moins normale, je repris.
− J’ai peur tu sais papa. Très peur. Tout m’effraie ici. Mais je tiens bon et j’y arriverai. Pour toi !
Un long silence s’installa mais je finis par continuer.
− Je sais que ça n’a pas été facile tous les jours, aussi bien pour toi que pour moi. Tu avais perdu une épouse et moi une mère. Je sais aussi que je n’ai pas dû être une enfant facile non plus. Je le reconnais et je m’en excuse. J’aurais dû faire plus d’effort pour toi, pour tes besoins, être plus attentive à toi et plus à l’écoute. Je suis désolé papa, si tu savais comme je suis désolé. Désolée pour toi, pour maman, pour Marie, pour toute cette fichue histoire. Je m’en veux papa, si tu savais comme je m’en veux. Ça n’aurait pas dû être vous, ça aurait dû être moi, pas toi, pas Marie, moi…
Mes larmes coulaient à flot.
− C’est dur ici, j’ai peur, peur de ne pas m’en sortir, peur de justement m’en sortir et de me retrouver seule. Sans rien, ni papa, ni maman, ni vie comme les autres, RIEN. J’ai besoin de toi, si tu savais à quel point. Alors s’il te plaît, sors moi de là.
Je m’étais tue et cette fois, pour de bon. Je me suis à nouveau allongée, j’ai fermé mes yeux lourds d’émotion et je me suis endormie jusqu’au petit matin.
* * *
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Mlle_Saarah_
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