Fyctia
Chapitre 4 partie 1
— MÉLODY ! RÉVEILLE-TOI, TU VAS ÊTRE EN RETARD !
Je grogne en m’enfonçant un peu plus sous ma couverture, refusant catégoriquement d’affronter la réalité. Je veux juste disparaître, mourir en paix sous ma couette, loin de ma honte et de l’envie irrépressible de m’enterrer vivante qui m’a empêchée de dormir toute la nuit.
— MÉLODY ! hurle à nouveau Coraly, comme si elle n’était pas déjà collée à mes oreilles.
Je pousse un gémissement plaintif, me demandant comment cette femme —qui est accesoirement ma soeur— parvient à avoir autant d’énergie le matin. Sérieusement, qui peut bien se réveiller avec l’envie de brailler comme une hyène affamée depuis la nuit des temps ? Visiblement, Coraly.
Je soupire et sors lentement la tête de sous ma couette, croisant le regard inflexible de ma soeur. Avec la meilleure bouille boudeuse que j’ai en stock, je bats des cils et adopte ma voix la plus enfantine :
— Je ne veux pas y aller. J’ai peur.
Coraly arque un sourcil, impassible face à ma tentative désespérée d’éveil de compassion. Sans la moindre pitié, elle arrache la couverture d’un geste sec, me condamnant à l’air glacial de la chambre.
— Bordel, il fait un froid de pingouin ici ! m’indigné-je en ramenant mes genoux comme ma poitrine, cherchant à conserver un semblant de chaleur corporelle.
Si j’avais besoin d’une excuse supplémentaire pour rester cloîtrée chez moi, la météo vient de me l’offrir sur un plateau d’argent. L’option chocolat chaud, plaid et auto-apitoiement me semble largement plus alléchante que d’affronter la catastrophe ambulante qu’est ma vie en ce moment.
On pourrait croire que je viens de me faire larguer comme une vieille chaussette trouée —vous savez, celles qu’on accroche à la cheminée dans un élan de mauvais goût ?—, mais non. Mon cas est bien pire. Bien plus critique. Ma vie est littéralement en jeu.
— Cesse de faire l’enfant, Mel’ ! s’impatiente Coraly en tapant du pied. Tu vas prendre tes responsabilités, assumer tes nombreuses erreurs et tout rentrera dans l’ordre… d’ici dix ans. Avec un peu de chance, il aura oublié d’ici là.
Je secoue frénétiquement la tête, tentant d’imaginer le scénario catastrophe qui m’attend si je me pointe au travail. Même un film d’horreur ne serait pas aussi terrifiant.
Qu’est-ce que je suis censée faire, franchement ? Débarquer comme une illuminée —plus que je ne le suis déjà—, donner une tape dans le dos de mon tyran de patron et balancer un joyeux “Oh, hier ? Juste une blague ! Poisson d’avril !” ?
Déjà, on est en décembre. Ensuite, Noël approche dangereusement. Et surtout, il ne me croirait jamais.
— MÉLODY KATLYN RUBY CARTER !
Oh, merde. Quand Coraly dégaine mes trois prénoms enchaînés à mon nom de famille avec sa voix de sergent-chef, ce n’est jamais bon signe. Jamais. Ça sent le roussi, la mise à mort, la fin d’une ère.
Je maudis mon statut de petit soeur —celle qu’on sermonne toujours, celle qui subit les humiliations familiales—. Dans un soupir digne d’un condamné à mort, je me lève d’un pas traînant, presque fantomatique, et me dirige vers la salle de bain sous le regard sévère de Coraly, qui épie chacun de mes gestes comme un vautour prêt à fondre sur sa proie.
— Tu n’es pas obligée d’alerter tout l’immeuble, tu sais, tenté-je, l’air faussement détendu. Tu leur gâches leur grasse matinée ! Si j’étais eux, je…
— Tu ferais quoi ? me coupe-t-elle, les bras croisés et les sourcils froncés. Tu attendrais qu’ils se déguisent et que tu ne les reconnaisses pas pour leur dire leurs quatre vérités en pleine tronche ?
Je me fige et mon regard la transperce.
— Coup bas. Un véritable poignard dans le dos ! Par ma propre soeur, en plus ! Honte à toi !
Sur ces mots, je claque la porte de la salle de bain et me réfugie sous l’eau bouillante, espérant qu’elle lave ma honte et réchauffe mon corps congelé.
4 commentaires
Mapetiteplume
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Il y a 12 jours
Zatiak
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Il y a un mois
ElisaCB13
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Il y a un mois
leysa
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Il y a un mois