Fyctia
Chapitre 9 (2)
Je sursaute. Moi qui pensais avoir été discret !
— Euh… j'invente à toute allure. Je cherche ma jumelle, Morgane. Oh, je viens de la trouver. Elle est là. Coucou Morgane.
J'agite la main en direction de ma sœur, même si elle ne peut pas m'entendre. Il se trouve cependant qu'elle tourne la tête juste à ce moment-là et m'aperçoit. Elle m'adresse alors un sourire éclatant et me fait signe à son tour avec enthousiasme.
À mes côtés, Jérémie reste bouche bée, ses yeux rivés sur Morgane comme tous les garçons qui ont un jour eu le malheur de croiser sa route. À croire qu'elle dégage une sorte de magnétisme qui les attire sans aucun effort.
— C'est ta sœur ? me demande-t-il sur un ton qui me paraît incrédule.
Je soupire.
— Oui.
Il est vrai que Morgane est magnifique tandis que je suis plutôt banal. J'espère tout de même que mon colocataire se contentera de l'admirer de loin. Je dis cela pour son propre bien. Elle ne ferait qu'une bouchée de lui.
Je baisse la main et Morgane s'intéresse à nouveau à ses nouvelles super copines. Une envie désagréable me tord l'estomac. J'aimerais être aussi à l'aise qu'elle.
Après cela, je n'ose plus tourner la tête. Bon, ce n'est pas non plus comme si je voulais admirer en douce le loup-garou de tout à l'heure. Non non. Je souhaitais juste m'assurer qu'il n'était pas en train de raconter à tout le monde qu'il avait été agressé dans la salle des douches par un garçon fée portant un caleçon avec des cœurs. Je ne tiens pas plus que cela à me faire convoquer par l'administration dès le premier jour, ni passer pour un pervers auprès de tous mes petits camarades.
Jérémie s'attaque avec appétit à la truite entière qu'il a déposée sur son assiette, faisant craquer les arêtes sous ses dents. Je grimace et me concentre sur ma ratatouille qui est bien moins bonne que celle de Maman.
Ma gorge se serre lorsque je songe à la maison. Je peux presque ressentir l'odeur des légumes mijotés, les éclats de rire de ma famille et les bavardages incessants de Mélusine. Je me traite d'idiot. Je ferais mieux de profiter de mon temps ici plutôt que de me laisser aller à la nostalgie. Je suis un grand garçon, pas un bébé comme Oriande.
Jérémie me donne soudain un coup de coude.
— Les profs arrivent, regarde !
Un groupe d'adultes pénètre en effet dans la cantine en défilant avec une certaine solennité.
Quand j'étais au collège, les professeurs avaient droit à une salle à part pour déjeuner tranquillement. Cela ne semble pas être le cas à Excalibur où ils doivent se contenter d'une table ronde qui leur est réservée au beau milieu de la cantine, comme s'ils étaient les acteurs principaux d'un quelconque film. Je me sens autorisé à les observer avec curiosité. Comme les élèves, ils sont issus de diverses créatures et se partagent les matières. Il y a même un vampire dans le lot. D'après Jérémie, dont la sœur aînée est au lycée depuis deux ans et lui a donc transmis toutes sortes d'informations, il enseigne les mathématiques et n'est pas commode. Bon, je n'ai jamais encore rencontré de prof de maths commodes, mais savoir que celui-là peut nous mordre si nous ne sommes pas assez appliqués ne me rassure pas vraiment. Même si je suppose que mordre les élèves est probablement interdit par le règlement intérieur. Du moins, je l'espère.
Puis mon regard est attiré par un homme encore jeune qui discute avec animation avec une vieille fée à l'air revêche. Pour une raison étrange, il me paraît vaguement familier.
— Tu sais qui est ce type ? je demande à mon colocataire.
— Je crois que c'est M. Marlin, le proviseur, me glisse Jérémie qui est passé au dessert. Il paraît qu'il est l'un des magiciens les plus puissants de notre génération ! Il est trop cool ! Comme j'aurais aimé être un mage moi aussi !
Curieux, j'observe notre proviseur plus attentivement. Je m'étais fait une image mentale de lui bien différente. Je pensais qu'il était âgé, alors qu'il ne doit même pas avoir dépassé de beaucoup ses trente ans. Il est plutôt beau de sa personne, avec ses yeux d'un vert étincelant. Je comprends pourquoi Maman était tombée sous son charme.
Je chasse cette idée de ma tête.
— Tu es un triton, je dis à mon coloc. C'est cool aussi.
Jérémie fait la moue.
— Les tritons n'ont pas de pouvoirs magiques. Mais toi si, puisque tu es une fée !
Il me regarde avec une admiration que je ne mérite pas. Mes doigts se resserrent autour de ma fourchette.
— Euh… oui, je réponds, mal à l'aise.
Je préfère ne pas lui préciser en quoi consiste mon seul et unique don. Il finira bien par l'apprendre un jour ou l'autre. Le plus tard sera le mieux.
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cedemro
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Herrade_Riard
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Anthony Dabsal
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