Fyctia
Destin funeste
Je laisse tomber le poignard que je tiens en fixant mon adversaire d’un regard dépourvu d’émotion. Celui-ci agite lamentablement ses pieds qui flottent à plusieurs dizaines de centimètres du sol. Ses ébats futiles se poursuivent ainsi quelques secondes jusqu’à ce que je referme la main qui le maintient par la gorge.
Encore un de moins...
L’esprit embrumé par la frustration de devoir répéter encore et toujours cette routine de violence, je lance le cadavre avec force contre le mur terminant ce corridor.
Si au moins il existait une sortie.
Après tout ce temps passé ici, je doute qu’il en existe une en fait. J’ai exploré le moindre recoin de cet endroit lugubre et je n’ai même pas trouvé la trace d’un quelconque mécanisme permettant d’entrer ou de sortir. La personne qui a conçu cette prison est un architecte de génie, ça je dois le reconnaître. Grâce à lui, je peux considérer mon destin comme étant scellé : je ne sortirai jamais d’ici.
Voilà un constat bien funeste, mais à quoi bon entretenir un vain espoir.
Résigné, je me penche pour récupérer une énième ration dans la besace de l’homme que je viens d’abattre lorsque j’entends un son que je n’avais pas entendu depuis très longtemps : la détonation d’un coup de feu !
Si je considère à quel point le bruit était étouffé, cela s’est produit très loin de mon emplacement actuel. Toutefois, il est hors de question que je laisse passer une telle chance. Aucun participant à ce jeu sanguinaire n’a jamais eu d’arme à feu en sa possession. Je peux donc supposer que cette personne est spéciale.
Et pour moi, tout ce qui sort de l’ordinaire est une chance de changer ma destinée.
Me fiant à ma connaissance des lieux et à mon ouïe développée, je me précipite en direction de l’endroit où s’est produit l’événement inattendu. Imaginez un peu : je cours à la rencontre d’une personne qui possède une arme capable de m’abattre comme la bête que je suis, or cela est pour moi une source d’espoir…
Dans mon empressement, je ne porte plus aucune attention aux corridors que je traverse et aux différentes salles que je croise sur le chemin. Mon objectif est clair : la section ouest du labyrinthe. De plus, avec tout le matériel que je transporte avec moi, je ne peux pas dire que je suis discret et il est évident que l’on peut m’entendre venir de loin.
Malheureusement pour moi, c’est sûrement ce qui s’est produit puisqu’un formidable coup me percute en plein visage, alors que je passe une arche menant à l’une des nombreuses salles. Malgré ma corpulence, la force de l’impact est telle que tout mon corps bascule vers l’arrière. Le choc de ma tête contre le sol de pierre est phénoménal et des étoiles dansent l'espace d’un instant devant mes yeux.
Plusieurs rires sadiques me rappellent toutefois rapidement à l’urgence de réagir à cette attaque qui m’a pris par surprise. Il est très rare que les combattants dans ce jeu collaborent entre eux puisque seule une personne peut sortir vainqueur. Or, malgré l’étourdissement qui bousille tous mes sens, je peux compter pas moins de cinq attaquants qui se groupent autour de mon corps étendu.
Évidemment, chacun est armé et leur attirail est varié: couteaux, simple bâton, barre de fer et même une batte cloutée. Ce minable se croit dans la série Walking Dead ! Pendant que ses copains continuent de se moquer de ma position de vulnérabilité, c’est justement l’homme à la batte qui décide de faire le premier assaut.
Les yeux rivés dans les miens, il lève le pied et le descend brusquement sur ma main qui repose contre la pierre froide du plancher. Ravi qu’il soit aussi stupide, je contracte les muscles de mon bras et les tendons de ma gigantesque main et ce bien avant l’impact de sa lourde botte.
La douleur est certes intense, mais elle est requise pour assurer un effet de surprise maximum. Le grognement que j’émets n’a rien d’un cri de douleur. C’est l’annonce de la mort de ces imbéciles qui croient m’avoir vaincu.
D’abord, je saisis de ma main ouverte le pied qui voulait la briser et je soulève sans peine le corps de mon agresseur qui bascule à son tour vers le sol. Je relaĉhe aussitôt son pied et agrippe son arme ridicule. Arrachant l’objet de ses doigts, qui se brisent certainement dans la volée, je le balance avec force et rapidité dans les jambes de ses acolytes qui ne réalisent pas encore leur sort.
Le son des rotules qui éclatent et des tibias qui se fracturent précède les hurlements de souffrance qui déchirent la toile de silence qui règne habituellement en ces lieux. Un seul de mes opposants est resté debout, évitant de peu le balayage de la batte.
Le pauvre brandit vers moi un vulgaire bâton et recule, tremblant, parmi les corps de ses compagnons qui se tortillent sur le sol. Sans plus attendre, je bondis sur mes pieds et m’avance d’un pas dans sa direction. Méfiant, je cherche du regard les deux couteaux que j’ai remarqués un peu plus tôt. Après tout, ce sont les seules armes réellement menaçantes, si j’oublie celle que je tiens à la main.
À mon grand étonnement, je remarque que tous les hommes cessent progressivement de se débattre et qu’une mousse blanche s’écoule de leurs bouches.
Du poison !
D’abord le coup de feu, puis maintenant du poison. Il semble que les organisateurs viennent de changer la mise et cela ne semble pas être en ma faveur.
Devant moi, l’homme tremble à présent de tout son corps et il va même jusqu’à jeter son gourdin de fortune sur le sol afin de tendre les bras, les mains levées en signe de reddition.
— Je vous en prie, ne me tuez pas ! chiâle-t-il à mon endroit.
Franchement, je ne sais même pas de quand datent les dernières paroles que j’ai prononcées et la colère qui gronde en moi me supplie de mettre fin à la vie de cet individu.
Voilà quelques secondes, celui-ci riait à gorge déployée de mon impuissance. Il mérite donc de mourir.
À l’opposé, le peu qu’il me reste de conscience me suggère qu’il peut contribuer à me faire sortir de cet endroit s’il en sait un peu plus sur cet endroit.
Pesant le pour et le contre, je fais un pas de plus vers la mauviette. Celle-ci émet alors un hoquet d’horreur et je constate qu’une tache sombre grandit rapidement sur son pantalon jusqu’à former une petite flaque à ses pieds.
Le con s’est pissé dessus !
Si je doutais encore de l’effet que j’ai sur les gens, voilà une belle confirmation… Dégoûté, je lance un regard choqué à mon adversaire, puis je décide soudainement de lancer la batte au sol, faisant du coup sursauter la demi-portion.
— Écoute-moi bien petite merde, commencé-je d’une voix grave à laquelle j’ajoute volontairement un vibrato bestial, tu vas me dire tout ce que tu sais sur cet endroit. Si j’ai la moindre impression que tu me mens, je te broie les os un par un. Compris ?
— Je… je ne sais rien…
Afin d’appuyer ma menace, je retire brusquement son bâton et saisit ses doigts dans mon immense main. À peine ai-je serré un minimum que l’homme commence à pleurer comme un bébé.
15 commentaires
Horliana
-
Il y a 3 ans
cedemro
-
Il y a 3 ans
Livia Tournois
-
Il y a 3 ans
cedemro
-
Il y a 3 ans
VirgileD
-
Il y a 3 ans
cedemro
-
Il y a 3 ans
Gottesmann Pascal
-
Il y a 3 ans
cedemro
-
Il y a 3 ans
Sabrina A. Jia
-
Il y a 3 ans
cedemro
-
Il y a 3 ans