Gottesmann Pascal Le corbeau Je retire ma plainte

Je retire ma plainte

Le verre d’eau fut apporté au jeune homme qui, après environ une minute passée à s’abreuver en silence, repris son récit où il l’avait laissé.


- En sortant de prison, je suis allé vivre dans un foyer et, puisqu’il fallait que je travaille pour me réinsérer, je fus mis en rapport avec une société de nettoyage. Toutes les nuits, j’allais nettoyer des bureaux et je dormais dans la journée. Je n’étais pas malheureux, je ne voyais presque personne mais ça ne me gênait absolument pas. Après mon séjour en prison, je m’étais mis à ne pas aimer les gens En plus, après un an à voir que des mecs, je me retrouvais dans un milieu presque exclusivement féminin ce qui n’était pas pour me déplaire. Par contre je ne pouvais pas supporter de voir en prenant le bus pour aller au boulot ou en revenir, l’immeuble où se trouvait mon ancien appartement et celui de mon prétendu ami qui m’avais envoyé en prison. Il fallait que je me venge de lui mais je ne savais absolument pas comment faire.

J’avais la preuve qu’il vivait toujours ici, ou du moins je pensais l’avoir, puisque son nom figurait toujours sur l’interphone.


- Je sais, dis je en l’interrompant, je n’ai pas encore pensé à le changer pour mettre le mien. Ceux qui viennent chez moi appellent sur mon portable quand ils sont en bas. Il va falloir que je mette une étiquette à mon nom maintenant.


- Cela aurait évité les lettres de menace en effet. Parce que ma haine contre Thomas s’était muée en désir de vengeance. Ma seule obsession était devenue de faire payer mon année de prison à celui qui m’y avait envoyé. En fouillant par hasard dans une poche d’un de mes blousons j’y trouve la clé de la porte d’entrée de l’immeuble qui avait du se détacher du trousseau puisque je l’avais rendu. Je me rends compte que, avec cette clé, je peux accéder à la porte d’entrée de Thomas. C’est là que me vient l’idée des lettres de menaces. Je commence, à partir de dimanche, à les installer sous le paillasson à mon retour du travail, sur les coups de six heures du matin ?


- Six heures ? Ma voisine a certifié avoir entendu son chien aboyer à une heure et demi dans la nuit de lundi à mardi.


- Il avait du entendre quelqu’un d’autre sur le palier parce que, en ce qui me concerne, je n’ai pas entendu de chien aboyer et j’ai d’ailleurs toujours été le plus discret possible. Je ne voulais surtout pas être découvert. J’ai souvent eu envie de sonner à la porte pour confronter Thomas en face à face mais je ne l’ai pas fait, je ne savais pas quoi lui dire et me serais contenté des coups.


- Vous auriez pourtant bien fait de sonner, vous auriez bien vu que je ne suis pas Thomas.


- En somme, dit le policier, c’est une méprise, une regrettable erreur.


- Je n’aurais pas mieux dit, une regrettable erreur. Mais comment aurais je pu savoir.


Je regardais Dylan, qui semblait si paumé et désolé de sa méprise. Après avoir passé un an en prison il allait encore avoir des ennuis avec la police à cause d’un quiproquo absolument idiot. Il ne le méritait pas et il fallait que je me montre grand seigneur.


- Je retire ma plainte, dis je alors que Dylan me regarda avec de grands yeux étonnés.


- Vous êtes sur, dit l’agent de police.


- Absolument certain. Monsieur Krasky a bien assez souffert comme ça. Il est temps qu’il oublie cette affaire à présent et reparte d’un bon pied.


- Je suis d’accord avec vous, dit le policier. Donc, si je comprends bien, monsieur Kraksy, vous pouvez partir tout de suite, vous êtes libre.


Dylan et moi sortons ensemble du commissariat. Nous marchons quelques pas, côte à côte, comme si nous nous connaissions bien alors que ce n’est le cas que depuis moins d’une heure.


- Merci, me dit il soudain. Je ne connais pas beaucoup de gens qui feraient ce que tu as fait.


Hors du commissariat, le tutoiement lui avait paru naturel puisque nous avions, à quelques années près, le même âge


- Je t’en prie, c’était tout naturel. Tu ne méritais pas d’avoir de nouveau des ennuis à cause d’une rancune très compréhensible. Même moi, qui suis l’homme le plus pacifique du monde, j’aurais eu envie d’écrire ces lettres de menace si quelqu’un m’avait fait ce que t’a fait Thomas.


- Il ne me reste plus qu’à le retrouver ce salaud et à lui faire payer ce qu’il m’a fait


- Il ne te reste plus qu’à oublier toute cette histoire et à essayer d’être heureux, dis je d’un ton plus ferme. C’est tout ce que je peux te souhaiter.


Merci, répondit il avec un sourire.


Je regardais Dylan s’éloigner sur le trottoir, nos routes se séparaient et le satané corbeau ne croasserait plus. Je m’imaginais un dangereux mafieux, un pervers sadique et je m’étais retrouvé devant un pauvre jeune paumé et touchant.


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24 commentaires

Sonyawriter

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Il y a 4 ans

Il n'était finalement pas si horrible cet harceleur. Juste une personne qui a souffert... Tant mieux

Gottesmann Pascal

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Il y a 4 ans

En effet, un jeune homme qui a souffert injustement.

Val Kyria

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Il y a 4 ans

On s'attend à une brute épaisse et finalement c'est un jeune homme en colère.

Gottesmann Pascal

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Il y a 4 ans

Et oui. Il faut un peu surprendre les lecteurs lectrices

Alexenrose

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Il y a 4 ans

Comme quoi, il ne faut vraiment jamais se fier aux apparences

Gottesmann Pascal

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Il y a 4 ans

Et non. C'est toujours dangereux.

Lyaminh

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Il y a 4 ans

Zut alors déjà fini ! Dylan a eu de la chance de tomber sur un gentleman, mais qui donc traînait sur le palier à 2 h du matin ??? Suspense là 🤔

Gottesmann Pascal

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Il y a 4 ans

Encore un chapitre mais, oui, l'enquête est finie. Quand à l'homme à deux heures du matin, certainement le voisin rentrant de soirée.

Sissy Batzy

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Il y a 4 ans

Ne jamais se fier aux apparences ! Très belle leçon

Gottesmann Pascal

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Il y a 4 ans

Toute la leçon à retirer de mon histoire.
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