Fyctia
Vers l’échafaud
Le jour de l'exécution vint. L'huissier m'annonça de nouveau la sentence. Le bourreau m'attacha les mains dans le dos. Le coiffeur me rasa, à la tondeuse les cheveux, pour favoriser le passage de la lame à travers mon cou saillant. L'huissier, de nouveau, m'annonça que ma condamnation était avancée d'une heure, midi trente-et-un précisément. Je lui demandai, s'il y avait du monde, il me répondit que oui. Toute la ville était là pour admirer la bête de foire, sans tête, que je serai dans quelques heures. Le bourreau, encore, m'attacha une pancarte autour du cou, avec mon numéro de prisonnier et ma condamnation. Il me demanda de nouveau mon nom et comme à l'habitude je lui répondis : « Bardamu ». Le ballet continua. Marie m'envoya un billet, dans lequel elle me disait qu'elle me rejoindrait au paradis. Je m'en moquai. Elle m'abjura aussi d'accepter l'aumônier dans ces derniers instants, pour faciliter mon ascension au ciel. Plutôt mourir. Quant à Céleste, il me demanda de rester digne, bien qu'en pareille circonstance se ne soit point facile et m'envoya un Paris-Brest, dans le but de me donner un peu de courage, avant le moment décisif. Les heures étaient si longues et si lentes, qu'elle me paraissait des siècles. La foule bourdonnait déjà de hurlements, elle voulait de la chair et du sang. Je repensai à mon ami et comment l'avais-je tué, quand tout à coup le bourreau déclara : « C'est l'heure ». Je le suivis, sans résister. Il y avait Emmanuel au premier rang et à contrario de la foule, il m'acclama et me regrettait déjà. Marie, au deuxième rang, paraissait inconsolable dans les bras de Céleste, bien qu'elle m'envoyait des baisers. Les gens tapaient des pieds et me jetaient des tomates pourries, pour accélérer ce spectacle, qu'ils avaient déjà vu, avec d'autres acteurs éphémères. La scène continuait et devait continuer malgré tout. La mort au bout de l'échafaud, j'aurais voulu tourner de l'œil. Or, l'huissier se présenta à moi comme la faucheuse qui revient en continue, pour vous traquer, jusqu'au moment où vous vous livrez à elle. Il répéta la sentence du tribunal à la foule et moi, éreinté, j'aurais voulu me jeter sous la lame. Le bourreau me vit bouger dans tous les sens comme une bête en rut et me dit tout bas pour me calmer : « Patience, la mort approche ». Il était habitué. Tout à coup, tout s'arrêta et voilà le fracas du silence que j'attendais. L'huissier me demanda, comme l'accordait la loi, si je voulais dire quelques mots. Pendant ce temps, le bourreau me déliait les mains et les pieds.
2 commentaires
Borodine
-
Il y a 7 ans
Nine C
-
Il y a 7 ans