Fyctia
CHAP.1 ~ Sleigh Ride ♬
18 Décembre
Le parfum agréable du pain d'épice et des sablés vanillés, a envahi la maison. Je sautille et réalise quelques pas de danse lorsque « Sleigh Ride » chantée par Mariah Carey, retentit pour la millième fois, dans l'enceinte Wi-Fi posée sur l'ilot central de la cuisine.
Noël est la fête que je préfère. Le temps semble suspendu à cette période de l'année. En général, je me régale avec les téléfilms, les illuminations et les repas familiaux interminablement agités.
— Maman ! Est-ce que je peux prendre un biscuit, s'il te plait ?
— Non Keziah. Ils sont encore trop chauds. Enlève tes petits doigts de là, s'il te plaît !
— Mais si je souffle dessus, ça sera plus chaud ? Je peux alors ?
— J'ai dit non. Sois patient mon amour.
Mon fils affiche une moue boudeuse. Il croise les bras avec humeur et fait demi-tour jusqu'à la table basse sur laquelle trônent ses affaires. Ça lui passera...
Soudain, la minuterie du four émet un signal strident. Il est temps pour moi de sortir le dernier plateau. Je dispose un à un les biscuits brulants en forme d'étoiles et de sapins sur la grille, ce sera plus facile d'appliquer le glaçage après.
En jetant un coup d'oeil par la fenêtre, je constate que la neige chute de plus en plus fort. Ils n'avaient rien prévu de tel à la météo. C'est rare qu'il neige autant par ici et je m'inquiète pour Bailey qui doit être sur le chemin du retour. Au moment où je saisi mon téléphone pour le joindre, celui-ci franchit le seuil de notre porte d'entrée :
— Bonsoir mon chéri, j'allais justement t'appeler, fais-je en brandissant mon portable vers lui.
— C'est infernal dehors. T'as pas idée !
Bailey retire ses chaussures et son manteau couvert de neige et me rejoint dans la cuisine, frottant ses mains l'une contre l'autre pour se réchauffer.
— Où est Keziah ?
— Là-haut. Je lui ai demandé de ranger le chaos qui règne dans sa chambre. D'ailleurs, en parlant de chaos Doc', quand comptez-vous rétablir l'ordre dans notre garage, Hmm ?
— Wouai, je sais, j'avais dit que je le ferais le week-end dernier.
— Et le week-end d'avant...
— Tu marques un point ma chérie.
— Vas-tu le ranger un jour ? Ou dois-je m'en occuper ?
— Viens par-là, fait-il en m'agrippant les hanches. Je te promets qu'avant Noël, tu retrouveras ton garage rangé au carré. Ça te va ?
— Noël ? Mais c'est dans six jours, Babe !
Bailey picore mon visage avec quelques baisers, avant de répondre :
— Compte sur moi, Maïra. Ce sera fait.
— Promis, Babe ?
— Juré !
— C'est pas beau de juré Bailey, je n'arrête pas de te le répéter. Sept ans de mariage et tu ne l'as toujours pas intégré ?
Mon mari recule et éclate de rire. J'aime voir ses grands yeux noirs se remplir de bonne humeur. Il faut dire que depuis que son associé est parti à la retraite, le rythme des consultations augmente en même temps que sa fatigue s'accroit. Alors le voir détendu comme cela, me fait vraiment plaisir.
— Oh Maï ! T'es pas croyable. T'es au courant que je ne suis pas ton fils, au moins ?
— Permets-moi d'en douter, Babe !
Il m'étreint à nouveau. Je niche ma tête dans son cou et le respire profondément.
Je l'aime tellement !
— Et sinon, qu'as-tu prévu pour le réveillon ?
— Tout ce qui a de plus classique ! Des fruits de mer, une dinde bien assaisonnée, accompagnée de légumes de saison et de pommes duchesse.
— Ok. Et pour le dessert ?
— Buche à volonté, évidemment !
— Parfait ! Ta mère viendra ?
— Oui, avec ma soeur et mon frère. Et, ton père a confirmé que ton frère serait des nôtres. Pourvu qu'il se tienne à carreau cette fois-ci.
— Tout se passera bien, ne t'inquiète pas ma chérie.
— Il n'y a que toi qui y croit, Babe !
— On verra bien. Ce dont je suis certain en revanche, c'est que ta mère va apporter ses pâtés créoles et son Anisette* qui mettra tout le monde d'accord.
— M'en parle pas ! Elle apporterait tout Haïti, si elle pouvait.
— Papa, t'es là ! se réjouit Keziah, interrompant notre conversation.
Bailey me lâche pour accueillir notre fils dans ses bras. Ces deux-là se ressemblent tellement ! En plus du désordre qu'ils sèment partout où ils passent, ils ont les mêmes yeux en amandes, le même teint noir et lumineux, la même démarche. Je les regarde s'en aller dans la véranda pour reprendre le Puzzle géant de Lebron James, commencé quelques jours plus tôt.
Est-ce donc ça, le bonheur ?
Pendant qu'ils s'affairent dans leur coin, je file à l'étage. Avec un enfant de cinq ans dans les pattes, ce n'est pas toujours évident d'avoir du temps pour soi.
J'entre dans la salle de bain, ouvre le tiroir dans lequel j'entrepose mes produits de beauté, pour attraper la boîte qui contient le graal. Je sors mon test de grossesse et c'est parti ! Je retiens mon souffle quelques minutes tout en fixant l'écran digital avec beaucoup d'appréhension.
Seigneur pitié, fais que ce soit Positif.
3.2.1... J'accueille le résultat avec une joie contenue. Celui-ci est identique à ceux d'hier et d'avant-hier :
« Enceinte 2-3 semaines »
J'envisage une seconde, de l'annoncer à Bailey, mais je me ravise. Pour l'instant, aucun symptôme ne trahit l'arrivée de notre petit lutin, alors je choisis de conserver mon secret jusqu'à Noël.
Depuis l'étage, j'entends les garçons rire dans le salon. Je ne sais pas ce qu'ils fabriquent mais ça a l'air amusant. J'enfile l'un de mes pyjamas préférés – le rayé vert est rose avec des rennes de Noël.
À coup sûr, Bailey va me dire combien il déteste cette tenue et cette simple idée me tire un sourire. Avant de redescendre, je m'arrête devant le miroir plain-pied qui trône sur le palier. Je soulève mon haut et prend le temps d'admirer ma silhouette encore bien plate. Mon visage s'illumine lorsque j'imagine la tête de mon mari, le jour où il saura que j'attends ce deuxième enfant dont on rêvait tant.
Cinq ans après notre 1er Bébé...
De retour dans la cuisine, je m'active pour terminer le dîner. Les hits de Noël défilent toujours et je chantonne en éminçant un oignon blanc. Les garçons me rejoignent et dressent la table. Bailey s'arrête et me fixe en grimaçant :
— Quoi ? Qu'est-ce que j'ai fais de mal ? Lui demandé-je alors.
— T'as ressorti ce vieux pyjama moche !
Il est si prévisible !
— Moche, si tu veux, mais de saison ! Et il est très confortable en plus.
— Et bien, j'espère que le Père-Noël t'apportera quelque chose de plus... Sexy !
— Bailey ! Ton fils est là, peux-tu faire un effort, s'il te plaît ?
— Pas la peine de me servir tes grands yeux Maï... Vivement qu'il aille se coucher, si tu vois ce que je veux dire, susurre-t-il à mon oreille.
— Bai-ley !
— Ben quoi ? T'as pas hâte toi ?
— Vas donc doucher ton fils, au lieu de dire des bêtises. Nous allons bientôt dîner.
— Mais on va manger quoi, Maman ?
— Que des bonnes choses !
— J'espère que t'as pas fait des brocolis. Je déteste les brocolis et là, ça sent le brocoli.
— File te doucher, j'ai dit !
— Allez hop Fiston ! On obéit à Maman.
* Anisette : Boisson sucrée légèrement alcoolisée à l'anis étoilé et au rhum.
2 commentaires
Justine_De_Beaussier
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Il y a un jour