Fyctia
Chapitre 12
Harry m'observe sans ciller, je me sens dénudée quand il me regarde ainsi. A mesure qu'il s'approche, mon coeur panique, ma poitrine se soulève. Une mince prière pour s'échapper de cette situation et la vibration d'un téléphone stoppe Harry.
Sauvée par le gong, je retiens le soupir de soulagement qui chatouille ma gorge. Harry se redresse et tape ses poches, il sort d'abord mon téléphone, me le tend mais je n'ai reçu aucun appel. Il prend à son tour le sien et observe l'écran. De nouveau, l'appareil s'agite, indiquant un numéro inconnu. Mon ami plisse les sourcils, pivote sur ses points et décroche dans la foulée. Je distingue vaguement la conversation :
— Oui Maitre, vous savez ce que vous avez à faire, je vais voir ce qu'ils veulent.
Le visage de Harry trahit beaucoup d'anxiété. Je me demande qui est la personne à l'autre bout du fil. Ça a l'air important.
— J'ai un contretemps, je vais devoir écourter notre promenade, m’annonce-t-il.
Au même instant de gouttelettes tombent au sol, une d'elles s'écrase sur ma joue. Je relève la tête et distingue un immense nuage gris menaçant.
— Lui aussi va écourter notre balade, annoncé-je en levant la main vers le ciel.
— Je suis désolée, on reviendra pour les lanternes sur le Loch bientôt. Il faut se dépêcher de reprendre le prochain ScotRail pour rentrer.
Alors que le temps se guette, nous reprenons le chemin du retour. Dans le train, nombreux ont eu la même idée que nous et nous nous retrouvons debout au milieu de l'allée. Je me tiens à un dossier et observe l'eau ruisseler sur les vitres, les formes tentaculaires m'intriguent. Mes pensées sont perturbées par un Harry qui se ronge les ongles bruyamment.
— Tu veux en parler ? demandé-je en me tournant vers lui.
— Non, je préfère te tenir éloigné de tout ça.
— Je peux comprendre quand même, soupiré-je.
— Je sais mais c'est compliqué... conclut-il en regardant ailleurs.
Ça a le mérite de plomber l'ambiance, je me sens frustrée. Moi qui m'attendait à un superbe séjour, quand il ne pleut pas, nous jouons au roi du silence. Et Harry est très bon à ce jeu. J'ai l’irrépressible envie de rentrer, retrouver Raven et m'éclater dans les clubs comme je le faisais avant. J'attrape mon téléphone, tente de scroller mon fil d'actualité en vain. Le réseau est catastrophique ici.
Le chemin jusqu'à la voiture de Harry se fait dans le plus grand calme, je déteste cette sensation d'étouffement. Une boule d'angoisse s'est formée au creux de mon estomac et impossible de la déloger. Je sens une telle tension électrique se répandre dans l'habitacle. Harry se cramponne au volant, ses doigts tapotent sans cesse, me rendant encore plus nerveuse.
Le regard perdu à l'horizon, je distingue des lumières bleues percer la grisaille. Je me redresse légèrement dans mon siège et lorsque Harry s'approche, il lâche une injure en frappant le volant. La violence de son geste est si puissante que j'en sursaute dans mon siège. Sans faire attention à ma présence, il tire le frein à main et l’arrêt brutal nous propulse contre le pare-brise.
J'inspire puis expire rapidement, les yeux grands ouverts et le cœur palpitant. Nous sommes encore loin, mais la scène me surprend tant que j'en ai le souffle court. Des voitures de polices sont garées autour du manoir, les gyrophares m'éblouissent et la pluie n'arrange en rien la vision stressante. Harry passe sa main dans son col, des gouttes de sueurs perlent sur son front. Il retire précipitamment la clef et s'échappe à l'extérieur.
Je le suis à mon tour, la pluie froide me fige sur place. Harry entend ma porte s'ouvrir et fait volte-face les poings serrés. Je vois dans son regard que cela l'énerve davantage.
— Reste dans la voiture ! me hurle-t-il dessus.
— Je viens avec toi ! renchéris-je
— Ernestine retourne immédiatement à la voiture !
Le ton est sec, aussi glaçant que la pluie. Pendant un bref instant, j'ai l'impression de me retrouver face à mon père, m'incendiant comme jamais quand je refusais d'obéir. Je ne me laisserai plus jamais faire de la sorte. J'avance, la tête haute, défiant Harry du regard. Personne n'a le droit de me donner des ordres. Sauf que mon ami n'est plus qu'un torrent déchaîné et il se moque bien de ma rébellion d'adolescente.
— Arrête de faire la gamine !
— Je n'y retournerai pas ! craché-je en arrivant à sa hauteur.
Un éclair passe dans les yeux de Harry, une veine est apparente sur son front. Mon dieu, mais qu'est-ce qu'il se passe ? Malgré la crainte qui grandit en moi, je ne perds pas pied. Et je réalise que je joue à un jeu dangereux lorsque Harry me saisit brutalement le bras. Il m'enserre tellement fort que je lâche un cri de douleur. Je me débats, mes poings frappent son torse. Quand je comprends que je viens de lui faire mal, Harry devient fou. Mon corps est propulsé contre la voiture, ma cage thoracique vibre sous le choc.
— Arrête ! crié-je à m'en casser la voix.
Une douleur atroce se répand dans mon dos, je suis secouée de soubresauts tant je pleure. Harry me fusille du regard. Comment peut-il être aussi doux et devenir si mauvais à la moindre contrariété ? Que font ces voitures ici ? Qu'est-ce qu'il cache ? Qu'est-ce qu'il le rend aussi nerveux ?
— Attends-moi ici, je viendrais te chercher... insiste Harry en essuyant une larme sur ma joue.
Je suis figée, incapable de bouger. Je ne sais pas si je dois l'accompagner ou le repousser. Un hoquet et un regard noir en guise de réponse, Harry se contente de ça avant de me libérer. Je ne montre aucune résistance cette fois-ci et m'engouffre dans le véhicule.
Assise sur la banquette, j'éclate en sanglot, je tousse, mon buste me faisant un mal de chien. Mais qu'est-ce qu'il lui a pris d'agir ainsi ? Harry le garçon le plus doux que le monde ait connu. L'homme qu'Aloyse trouvait toujours si adorable et attentionné. Un gentleman dans l'âme. Quel était ce monstre qui m'a fait face ? Je n'arrive plus à arrêter le torrent de larme sur mon visage. Ma bouche tremblote, mon nez coule, ma poitrine tressaute parce que je n'arrive plus à retrouver mon souffle.
Il me faut quelques minutes pour me calmer, je m'enfonce dans mon siège. Je n'aperçois que des silhouettes s'agiter devant le manoir. Je ne distingue pas Harry, des autres. L'horrible sentiment d'oppression et la punition me rendent nauséeuse. Comme quand j'étais plus jeune, je me couche en position fœtale, ramène mes jambes contre mon buste et me laisser bercer par les sons alentours.
12 commentaires
Marine | Hugo New Romance
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EmilyChain
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SamanthaMorgan1711
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