Fyctia
Chapitre 1
Le vent s'immisce sous mes vêtements, je tremble de froid, resserrant les pans de mon trench pour garder le maximum de chaleur. La nuit est tombée plus rapidement que je ne l'avais imaginé. La pluie ne cesse plus, elle est glacée et les fines gouttes glissent dans ma nuque. Le duvet de mon dos s'hérisse. Mes bottes s'enfoncent dans la boue fraîche, mes pieds restent ,par moment, collés au sol
Mon parapluie s'est retourné une énième fois, il a finalement rendu l'âme. Je porte contre ma poitrine les vestiges de ce qu'il en reste. Pendant une seconde, je regrette d'avoir quitté les îles, ma vie étudiante, paisible sous les cocotiers. Sans contrainte, sous un soleil de plomb. Cela fait bien longtemps que je n'avais pas troquer mon maillot de bain contre un pull épais. Sauf que j'avais besoin de les voir.
Trois ans. Trois ans que je n'ai gardé que des brefs contacts avec mes deux meilleurs amis. Ceux qui m'ont poussé à partir, prendre le premier vol pour finaliser mes études devenue si contraignantes à Londres. Je leur serais reconnaissante à jamais. Maintenant que le doux rêve ensoleillé a pris fin, un second émerge à l'horizon. Celui-ci, je veux le réaliser avec eux.
Le tonnerre gronde derrière moi, un orage approche. La mer des côtes irlandaise se déchaîne, les immenses vagues s'écrasent avec rage sur la falaise. Sans relâche, sans jamais fatiguer. Le déferlement est si puissant que l'eau peut bientôt atteindre les terres. Je m'arrête un instant pour observer ce spectacle. La pluie ricoche sur mon visage, mes cheveux sont trempés et dégoulinent sur ma veste. En dessous, les mailles de mon pull subissent le même sort.
Je n'ai eu que rarement l’occasion de venir en Ecosse. Mes amis et moi nous étions promis de nous retrouver, un jour, ensemble ici. L'heure des retrouvailles approche et je réalise que j'ai le trac. Comment peuvent-ils vouloir me revoir après toutes ces années de silence ? Je n'ai donné que très peu de nouvelles, désireuse d'oublier la vie monotone et sans goût que j'avais. Je traînais un quotidien sans faille, ennuyeux et morose.
Heureusement, ils étaient là. Harry et Aloyse. Et je m'en veux de ne pas leur avoir rendu tout ce qu'ils m'avaient offert. J'inspire et expire plusieurs fois. Ce sera de merveilleuses retrouvailles, que nous fêterons toute la nuit. Et même si je sais que je dormirais seule de mon côté, quand eux s'endormiront dans les bras l'un de l'autre, j'aurai retrouver mes deux rayons de soleil.
La lumière vive d'un éclair m'effraie, il est temps d'arrêter de rêvasser et reprendre la route. J'aperçois le manoir dont Harry m'avait fait l'éloge lors de son invitation, deux jours plus tôt. Derrière les immenses nuages gris, je ne distingue que les sommets des tours perçant le ciel. Le monstre de pierre règne en maître sur le haut de la falaise. Quatre tours délimitent l'énorme demeure. Des fenêtres par dizaine arpentent les murs noirs. Il n'y aucune lumière. L'endroit est plongé dans la pénombre totale. Un éclair jaillit, éclairant un bref instant le manoir. Je n'en suis pas certaine, mais je crois avoir aperçu une silhouette courir non loin de là.
Un frisson parcourt mon échine. Ma main se resserre autour de la poignée de la valise que je tire à bout de bras depuis trop longtemps. Mon estomac se tord de peur. Mon cœur s'emballe dans ma poitrine. Le souffle éradiquée et épuisée par cette montée, je tremble de froid. D'un pas peu décidé, je gravis les derniers mètres qui me séparent de la porte principale.
Je ne peux m'empêcher de jeter un dernier regard autour de moi, craignant de revoir la terrible silhouette d'avant. Le poing contre le bois usé, je songe à mes deux amis derrière . Me feront-ils un accueil surprenant ? Sont-ils plongés dans le noir, accroupi derrière un meuble tout aussi ancien que la bâtisse ? Alors que je toque faiblement, la porte s'ouvre. Un filet de lumière s'échappe, ce simple fait m'encourage et j'entre sans plus de cérémonie.
Mes yeux naviguent partout, entre les escaliers de marbres qui trônent au centre de la gigantesque entrée, et les magnifiques tableaux d'époques accrochées sur les hauts murs. Je stoppe mon admiration quand mon regard se pose sur une personne debout devant une vase de roses. Elle ajuste leur tenue. Habillée d'une chemise cintrée et d'une pantalon pince noir, je me demande de qui il s'agit.
Je me racle la gorge pour annoncer ma présence, la symphonie du vent derrière moi, porte grande ouverte n'ayant pas suffit. L'individu se tourne dans ma direction. Mon cœur rate un battement, je bouille intérieurement. J'entrouvre la bouche, les mots que je m'étais répétés sans cesse dans l'avion ont disparus. Deux iris bleus se fondent dans les miennes, je déglutis. Sous la surprise, j'en lâche ma valise qui s'effondre au sol. Le bruit résonne autour de nous et fait écho.
— Harry..., murmuré-je la gorge nouée par l'émotion et les yeux embrumés de larmes.
— Ernestine ? questionne-t-il, surpris à son tour.
Trois ans. Et il a tellement changé. Où est passé le garçon maladroit et bourru que je connaissais ? Cet homme fin et musclé ne ressemble pas à mon ami. Nous restons comme deux crétins, debout à quelques pas l'un de l'autre.
— Tu as tellement changé Erny... Tu es si...
Le surnom qui avait pour habitude de me donner me réchauffe le cœur. Je réalise que j'ai souffert de son absence et celle de sa petite-amie. La joie est si soudaine que je ne peux m'arrêter de pleurer. Harry fait le premier pas et je le suis pour m'élancer dans ses bras. Il m'enserre avec force contre lui, ses doigts se faufilent dans mes cheveux trempés. En réalité, je viens de ruiner sa chic tenue en me comprimant contre lui. Le visage enfoui dans son cou, je chuchote comme pour ne pas briser ce doux moment.
— Tu m'as manqué...
il nous faut quelques minutes pour retrouver nos esprits, l'empressement des retrouvailles a laissé place à l'excitation. J'ai tant de choses à leur raconter, mes mains dans les siennes, je cherche du regard Aloyse. Harry comprend et presse mes doigts, j'observe une légère grimace défigurer son sourire.
— Où est Aloyse ? fis-je remarquer.
— Elle arrivera plus tard.
Je fronce les sourcils, cherche à comprendre mais Harry ne laisse rien paraître. Se seraient-ils séparés sans m'en parler ? Un pincement me serre le cœur, le trio d'Erny ne peut pas exister sans eux deux.
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Laureline Maumelat
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