Fyctia
La forêt d’Antosir
Les compagnons prirent la route le lendemain matin dès le lever du soleil. Courage menait la petite troupe tandis que Delilah et Cortez devisaient sur les joies du mariage à quelques pas derrière le Dieu.
— Tu n’as jamais ressenti le désir de prendre femme Cortez ? demanda-t-elle en lui assénant un petit coup de coude complice dans le bras.
— Non, lâcha l’élégant après une courte réflexion. Pourquoi donc m’enchaînerais-je avec quelqu’un ?
Delilah poussa un soupir et secoua la tête devant son attitude désinvolte. Comment pouvait-il se comporter ainsi, lui qui n’était plus tout à fait dans la fleur de l’âge ? Elle ne parvenait pas à comprendre son point de vue, tout le monde ne souhaitait-il pas fonder une famille ? Sa main se crispa et elle chassa cette sombre pensée de son esprit.
— Tu ne sais pas ce que tu manques, décréta la mercenaire. Quel bonheur de se lever au côté de l’être aimé et de nourrir un nombre incalculable de projets avec lui !
Cortez grimaça et sembla prit d’un frisson étrange à l’évocation d’une telle possibilité.
— M’éveiller chaque matin en contemplant le même visage ? Quelle drôle d’idée !
— Aurais-tu peur de tomber amoureux Cortez ? minauda-t-elle avec un sourire en coin.
Cortez prit le parti d’en rire et lui saisit le bras comme pour la mettre dans la confidence.
— C’est tout l’inverse en vérité. J'ai bien trop d’amour pour me cantonner à une seule personne. Quoi que tu en pense, j’ai eu de véritables sentiments sincères pour chacune de mes conquêtes. Elles savaient toutes à quoi s’attendre et je ne me suis jamais caché de ma nature aventureuse.
Delilah ne concevait pas qu’une femme puisse s’accommoder d’une telle relation. Elle s’était consacrée à son époux jusqu’au bout et ne comptait pas le nombre d’années de pure joie que sa compagnie lui avait procuré.
— Alors tu n’auras jamais d’enfant ? demanda la femme d’une voix étrange.
— Ah douce Delilah, tu es si pure, si candide… constata l’homme en lui saisissant la main pour y planter un baiser. Je suis en réalité l’heureux géniteur de plusieurs enfants !
Un silence stupéfait accueillit sa déclaration. Delilah éclata de rire et Cortez en fit autant. Ils ne badinaient pas autour de sujet aussi sensible que l’enfantement d’ordinaire, Cortez ne souhaitant pas blesser son amie.
— Combien ? lui demanda-t-elle dans un souffle.
— Autant que le ciel compte d’étoiles belle dame. Pourquoi crois-tu que je n’aie jamais le moindre sou en poche ?
L’ambiance à l’arrière de la procession était bien différente. Atlhin et Leonhart ne pipaient mot, chacun gardant le regard rivé devant lui avec obstination. Le mage ne digérait pas que l’on eut outrepassé son avis. Il jugeait le choix catastrophique et était persuadé qu’ils couraient tous à la catastrophe. Descendant d’une famille noble jouissant d’une excellente réputation, le jeune homme n’avait pas l’habitude que l’on outrepasse ses recommandations. Dieu ou pas, il n’appréciait pas la situation et se faisait for de faire comprendre son mécontentement.
Athlin n’osait pas lui adresser le moindre mot. Cet homme le terrifiait bien plus qu’il n’aurait pensé cela possible. Son air maussade, son attitude souveraine et ses yeux à la couleur si particulière lui procurait une aura des plus étranges. Possédant un lien étroit avec la nature, il percevait quelque manifestation surnaturelle dans son être, une sorte de puissance qui n’avait rien à faire à l’intérieur de son corps. Le petit homme fit le choix d’ignorer cette singularité. Les enjeux étaient bien trop grands pour s’attarder sur un détail aussi trivial qu’une aura, aussi malsaine lui parut-elle.
Ils marchaient depuis plusieurs heures le long d’un chemin de terre tout juste praticable. Constellé de creux ainsi que tout autant de bosses et jonché de nombreuses racines traîtresses, les compagnons manquèrent plusieurs fois de perdre l’équilibre. Cortez jura lorsque sa cheville se tordit en lui provoquant une vive douleur lorsqu’il trébucha sur une pierre dissimulée par une épaisse touffe d’herbe. Bien que conscient qu’ils se devaient de voyager avec la plus grande discrétion afin de ne pas attirer l’attention, cela n’enlevait en rien la pénibilité d’un tel trajet. Seul Athlin se révélait à son aise. Aussi vif et agile qu’un cabri en dépit de son surpoids, le petit homme effectuait souvent de larges écarts afin de remplir sa sacoche d’une racine étrange ou d’un morceau d’écorce bien particulier, lorsqu’il ne se contentait pas de simplement renifler le parfum d’une fleur afin de s’imprégner de son essence.
Peu avant midi, les premiers arbres de la forêt d’Antosir se dévoilèrent à eux. Situé à trois lieues de leur départ, l’ancien bois s’étendait sur des centaines d’hectares en direction du Nord-Est. Une profusion d’arbres et de plantes – essentiellement des fagacées leur apprit Athlin – ainsi que bon nombre de fleurs sauvages tapissant le sol de tapis émeraude, ambré, azuréen ou encore vermeille formaient un ensemble d’une beauté à couper le souffle. Le lieu profitait en outre d’une quiétude exceptionnelle. Nul chemin ne le traversait et rien ne venait troubler la faune sauvage parcourant ce lieu paisible à la limite de l’onirisme.
Courage ordonna une halte et les compagnons se délassèrent sous les frondaisons d’un chêne de taille surprenante. Leonhart sortit de son mutisme en poussant un soupir de satisfaction. Delilah et Cortez en charge de la nourriture défirent leurs paquetages et distribuèrent des tranches de viandes séchées ayant peu ou prou la consistance du cuir et un gout de sel fort prononcé. La mercenaire déposa son imposant espadon contre le tronc avec le plus grand soin. Il s’agissait là de son bien le plus précieux, l’ultime témoignage d’une vie abandonnée à contrecœur.
— Combien de temps encore allons-nous devoir marcher ? demanda Cortez entre deux bouchées.
— Nous devrions pouvoir quitter le bois d’ici demain après-midi, lui répondit Courage avec son éternel sourire vissé sur son visage.
Son visage n’avait rien d’exceptionnel. Son nez était légèrement tordu et paraissait avoir été brisé à diverses reprises. Sa bouche était petite et fine, ses cheveux avaient l’apparence et la texture d’un tas de foin. Il était petit, plus encore qu’Athlin et ne devait sans doute pas dépasser les cinq pieds de haut. Sans être sujet aux rondeurs, son corps n’en était pas pour autant musclé. En dépit de son physique, son aura en imposait et il se trouvait toujours en première ligne quelle que soit l’occasion.
Leonhart la ressentie avant de la voir. Elle était là, sournoise et louvoyante entre les troncs, aussi gracieuse que mortelle. Il ressentait sa présence mais ne parvenait à la localiser avec précision. Le mage ferma les yeux et inspira profondément. L’image d’une crinière verte se dessina dans son esprit, bientôt accompagnée d’une paire d’ailes. Un sifflement sinistre résonna à ses oreilles et il ouvrit les yeux avec précipitation.
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Luna-Bella-Me
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Phaenna SH.
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Herrade_Riard
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Sand Canavaggia
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Claire Guilvaillant
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Véronique Rivat
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