Fyctia
Chapitre 2 : Adèle (3/3)
Deux heures plus tard je somnole appuyée de manière inconfortable contre mon siège, mon voisin ronflant à mes côtés et ayant glissé vers moi pendant son sommeil.
Un à-coup me pousse en avant et me réveille. Simultanément les lumières du wagon se mettent à clignoter avant de s’éteindre. Le wagon est plongé dans le noir le plus complet alors que le soleil brille au dehors. Je regarde autour de moi mais aucun des passagers ne semble avoir remarqué ce qu’il se passe.
Une espèce de voile gris glisse alors sous la porte du wagon et se dirige vers moi. La panique me submerge et je me colle encore plus contre mon siège et les vitres qui sont maintenant remplies de buée. Une fois arrivée à côté de mon voisin elle évolue jusqu’à former un visage que je ne connais que trop bien. Il me fixe intensément dans les yeux et sa forme s’efface progressivement, le nuage gris repartant d’où il est arrivé. La lumière se rallume aussitôt comme s’il ne s’était rien passé. Les autres passagers n’ont pas bougé. Quant à moi, je sens encore la terreur couler le long de ma colonne vertébrale et mes mains trembler de façon incontrôlée.
Le reste du trajet se passe sans anicroche mais je ne parviens plus à me détendre. Mon corps réagit comme une pile électrique chaque fois que j’entends un bruit. La musique que diffuse mes écouteurs n’arrive pas à venir à bout des tensions qui m’habitent.
Le message informant de la prochaine arrivée en gare d’Aviciennes me soulage autant qu’il m’angoisse sachant que la confrontation avec ma mère est imminente. Je laisse tous les passagers descendre du train avant de me diriger vers la sortie.
Je n’ai pas fait un pas dehors que Théodora me saute dessus pour me prendre dans ses bras. Elle m’étouffe de son affection et sa joie. Je prends sur moi de ne pas bouger pendant quelques secondes avant de reculer.
— Bonjour maman.
— Oh Adèle, je suis si contente de te voir malgré les circonstances.
Elle s’est toujours refusée à m’appeler Adie comme la plupart des personnes de mon entourage. Pour elle tout prénom a une signification particulière et doit être choisi avec soin.
Elle penche soudain la tête sur le côté et sa jolie bouche forme un « o » de surprise, la laissant un instant muette.
— Mais enfin qu’as-tu fait à tes cheveux ? Pourquoi sont-ils châtains ?
— Parce que j’avais envie de changement, mens-je avec plus ou moins de conviction.
— Je n’ai pas envie de débattre de ça maintenant mais je n’en ai pas fini avec toi !
— Maman…
Sans plus de cérémonie elle m’entraîne à sa suite pour regagner le parking et grimper dans sa petite coccinelle bringuebalante.
— Ne t’inquiètes pas Adèle, Winnie en a vu d’autres.
— Winnie ?
— Cette petite merveille! répond-t-elle en tapotant le tableau de bord de la coccinelle.
— Si tu le dis…
— Tu ne crains rien je lui ai jeté un sort de protection.
Je sais que ma mère se veut rassurante mais cette phrase a exactement l’effet contraire. Pense-t-elle réellement protéger sa voiture avec un bouquet de sauge ou autre plante du genre ?
Je ne vois pas quoi répondre à ce genre de réplique alors je la laisse babiller toute seule sur un fond de musique new age pendant que je tourne mon regard vers le paysage breton qui se dessine au fur et à mesure que nous nous dirigeons vers la maison de Théodora.
Winnie traverse la ville en toussotant puis, à la sortie bifurque sur un chemin en terre qui s’enfonce dans une forêt dense de châtaigniers et de hêtres.
Les branches des arbres et leurs feuilles multicolores ondulent au gré du vent, la lumière perçant ça et là pour se ficher sur des pierres couvertes de mousse. Je descends la vitre et laisse le vent caresser mon visage. Une espèce de chaleur pique agréablement ma peau.
— C’est beau n’est-ce-pas ?
— Oui c’est vrai.
— On l’appelle la forêt merveilleuse. Elle est magique.
— Tu vas me dire qu’elle abrite des lutins et des nymphes ?
Je suis mi-sérieuse, mi-amusée car je me rends compte que ma mère croit réellement à ce qu’elle me raconte. Même si tout ce qu’elle me dit est absurde je ne me sens pas le droit de la rabrouer.
— Bien sûr que non.
— Tu me rassures.
— Les lutins habitent sous terre.
Suis-je bête !
Au bout de cinq minutes, le chemin débouche sur une vaste clairière dont l’entrée est signalée par un panneau qui ne laisse plus de place au doute « Coven des sorcières élémentaires »
Je me tourne vers ma mère interloquée.
— Bienvenue chez moi !
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Laurie Lecler
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Siha
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eleni
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No_yra
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