eleni La Prophétie de l'Ether Chapitre 3 : Lucian (1/2)

Chapitre 3 : Lucian (1/2)

Je claque la porte de la maison et me passe le bras sur le front pour éponger la sueur qui coule sur mon visage, faisant par la même occasion scintiller le bracelet en métal toujours attaché à mon poignet depuis la terrible bataille d’A’aenahil.


Suite à ce massacre, Achlys m’a emprisonné pour avoir organisé la trêve. C’était un motif comme un autre car j’ai vite compris que sa seule intention était de me voir derrière les barreaux. Peu importe la raison, elle souhaitait me montrer que j’avais bafoué son autorité.


Aussi, j’ai été surpris quand elle m’a libéré un an après. En effet, Achlys ne fait rien sans raison.

Au début j’ai cru que c’était par lassitude.

Je n’ai compris que plus tard que j’étais très loin du compte. Elle savait très bien que la date de ma sortie faisait écho à Evanore, à sa mort. Ce message silencieux qu’elle m’envoyait n’avait d’autre but que de rouvrir des plaies qui peinaient à cicatriser.

J’ai quitté cette prison pour une autre bien plus effroyable. Sa Majesté m’a en fait relâché pour que je me retrouve entouré de villageois qui me vouent aujourd’hui une haine féroce, me rendant responsable de la mort de leur cheffe, mon seul amour. Ils ont totalement raison au demeurant, c’est moi qui suis la cause de ce désastre et ce qui en a découlé par la suite.


Aujourd’hui, la seule condition à ma pseudo « liberté » est de rester sur Idunara. Et c’est ce foutu bracelet qui me tient lieu de laisse. Si je m’éloigne plus loin que Thilnahil, le loch infernal, je suis téléporté chez moi avec pertes et fracas. Achlys en est aussitôt informée et ses hommes débarquent chez moi pour une séance de torture plus ou moins élaborée. Du fouet, aux poings en passant par les simples pierres, rien ne m’a été épargné. En témoignent les cicatrices sur mon dos et la balafre qui traverse ma joue gauche.


« Pardonne-toi ».

J’entends sa voix tous les jours. Chaque fois, elle me répète cette simple phrase et chaque fois je lui fais la même réponse :


— Oh, Evanore comment le pourrais-je? Quand j'ai tué la femme que j'aime? Quand c’est moi qui ai affaibli des villageois déjà éprouvés et conforté la reine dans ses projets d’asservissement et de dictature?


Je prépare la terre pour la prochaine récolte quand j’entends soudain un bruit en provenance des buissons. Je me retourne et un sourire fleurit sur mes lèvres. Je me penche en avant les mains posées sur mes genoux :


— Ah, te voilà toi !


Une panthère aux couleurs irisées allant du bleu au marron m’adresse ce qui se veut un sourire malgré de grands crocs blancs. Elle s’élance d’un bond sur moi en feulant, me renversant en arrière et me lèche le visage à grands coups de langue. Je la caresse et pose mes mains sur son poitrail pour la repousser.


— Sita ça suffit !


Je me suis pris d’affection pour cet animal quand je l’ai trouvé coincé dans un piège dressé par un des braconniers de la Reine. Depuis, elle vit avec moi et est ma plus farouche protectrice. C’est aussi la seule compagnie que j’ai.


— Allez viens canaille, il doit me rester un morceau de viande séchée dans la cuisine.


Les oreilles de Sita se dressent comme si elle avait compris le mot magique « viande » et elle me suit en agitant la queue.


******


Faute de pouvoir assurer ma subsistance seul, je pars au marché de Namanca une fois par mois. C’est chaque fois éprouvant de me confronter aux regards hostiles des villageois, c’est pourquoi je m’y rends le moins souvent possible.


Je franchis l’arche d’entrée du village, Sita sur mes talons. Mes bottes pataugent dans la boue et je dois faire attention où je marche pour ne pas me prendre les pieds dans des détritus divers et variés.

Je commence mes courses en allant chez l’apothicaire. J’ai à peine droit à un « bonjour » crispé puis suis poussé plus ou moins poliment vers la sortie mon sac de plantes attrapé au vol. Une fois dehors je le range précautionneusement dans ma besace.

Je poursuis mes achats et me rends pour finir à la boulangerie des cinq lunes. La personne qui tient le stand décharge des sacs de farine et ne peut pas me voir. J’attends patiemment qu'elle ait finit lorsque Sita se met à grogner, attirant les regards anxieux des passants. Le sourire qu’affiche le jeune homme pour m’accueillir s’efface instantanément lorsqu’il me reconnaît.


— Vous !

— Bonjour Aegan.

— Je n’ai rien pour vous.

— Pourtant il me semble que ton étal est encore rempli. Je voudrais du pain et un sac de farine s’il te plaît.

— Je n’ai rien pour vous j’ai dit !


La patience dont je faisais preuve jusqu’à présent s’effrite et je réponds sèchement :


— Écoute, ça suffit maintenant. Tu vends, j’achète, c’est aussi simple que ça.


Excédé, je pose bruyamment la monnaie sur la table faisant se retourner les passants aux alentours.

Aegan passe une main agacée dans sa chevelure, jette un coup d’œil à Sita qui tourne autour de moi et balance mes achats devant moi. Je jette la farine sur l’épaule et retourne sur mes pas.


— C’est toi qui l’as tuée ! Tu es un monstre.


Je m’arrête et me retourne pour lui faire face.


— Je sais.


Je vis avec cette idée depuis plus de cinq ans. Et même si le temps fait doucement son œuvre la culpabilité ne disparaît pas.

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9 commentaires

Laurie Lecler

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Il y a un an

Ah mais il me fend le coeur lui..

Siha

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Il y a un an

Je suis contente de retrouver Lucian, il s'est passé 5ans je n'en reviens pas ! Ceci dit, j'avais eu une bonne intuition concernant cette reine, elle est un vrai tyran...Pauvre Lucian, je suis triste pour lui et tout ce qu'il doit vivre. J'adore par contre qu'il ai trouvé Sita, elle a l'air d'un super compagnon de vie pour lui et ça fait plaisir de ne pas le savoir totalement seul. J'espère que la roue tournera pour Lucian, il ne mérite clairement pas ça.

eleni

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Il y a un an

oui il faut dire qu'il n'a pas eu une vie facile jusqu'à présent le pauvre...

steph09

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Il y a un an

Aïe, il se retrouve bien seul au monde notre héros…

Mary Lev

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Il y a un an

Comme prévu Lucian paie cher son acte. On se demande toutefois pour quelle raison la reine la laisse en vie et on se doute que tout ça a un rapport avec Adèle. Par contre on ne saisit pas très bien la temporalité des événements qui se passent dans chaque monde je ne sais pas si c’est voulu ? C’est la même époque et dans monde parallèle ou alors c’est le même monde mais à des époques différentes ? (Je ne sais pas si ma question est claire 😂)

eleni

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Il y a un an

oui oui très claire ne t'inquiètes pas! 😂 le temps évolue de la même manière c'est uniquement une histoire de monde parallèle. j'affinerai ça si ce n'est pas suffisament clair. merci beaucoup pour toutes tes remarques!

Miouchkia

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Il y a un an

Entre sa propre culpabilité et la colère des villageois, ça s'annonce compliqué...
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