Fyctia
LA CHINE (2)
Je prends, tablette, ordinateur, liasse de papier, qu’il m’a donné.
- Je vais voir Elliot et Ralph, à plus.
Et je pars, en le laissant seul face au vide de mon siège. Il me regarde la bouche ouverte et son café en suspens dans le vide.
Je passe la matinée à me familiariser avec le matériel high-tech. Elliot est un amour, il est d’une patience d’ange. Il me donne tous les codes nécessaires à mon nouveau travail, m’explique que toutes les réunions sont enregistrées et que je dois seulement les retranscrire mot pour mot dans mon ordinateur. Il me donne des écouteurs, m’explique le fonctionnement des divers logiciels, puis, comment les envoyer codés, au boss. Quand je pense pouvoir maitriser les choses, je m’attaque au contrat. J’y suis depuis une demi-heure, à raturer, réécrire certaines phrases. Ce contrat est un nouveau système d’esclavagisme. J’appartiens corps et âme à Monsieur Arthur Taner dit « petite nouille ». Mais, après quelques modifications, je pense qu'il me réintégrera dans mes anciennes fonctions.
Donc j’y ai apporté quelques changements, compensations et autres privilèges. Donc, j’ai triplet mon salaire, je me suis rajouté quelques semaines de vacances en plus. En contrepartie, il m’a à sa disposition nuit et jour, pour le travail, bien sûr, pas pour des parties de jambe en l’air. Pour cela, j’ai redéfini mon travail avec précision. Il doit respecter mes sept heures de sommeil journalier. D’après ce que j’ai compris, je serais amenée à me déplacer souvent. Mon travail consiste à lui faciliter la vie, à être la mémoire de son temps.
D’ailleurs, j’ai récupéré son planning, et je le trouve un peu trop rempli.
D’après mes calculs, nous arriverons à Hongkong à deux heures du matin, heure locale dès le lendemain, sept heures il est prévu une visite d’usine, puis un repas d’affaires, s’ensuit des rencontres d’inverses et varier. Si je dois retranscrire toutes ses réunions, je vais passer mon temps sur l’ordinateur. D’ailleurs en parlant de retranscription, je dois en faire une.
Je m’installe confortablement et mets les écouteurs, je commence à taper. Le début est un peu laborieux, mais la suite vient assez facilement et je me concentre sur cette satanée réunion. Quelques termes techniques me donnent du fil à retordre, mais avec l’aide d’Elliot, le problème est vite résolu. Je tape depuis une heure environ, quand une marée humaine me passe à côté. Je sursaute déconcentrée.
- Agathe, tu viens manger avec nous ? Tu continueras tout à l’heure.
Elliot, m’attend, un sourire aux lèvres. Mais une voix répond à ma place.
- Non ! Agathe vient avec moi, je dois lui expliquer quelques trucs encore.
Et mince, petite nouille ne m’a pas laissé répondre. D’ailleurs, cela ne me plait absolument pas qu’il prenne les décisions à ma place.
Je le fusille du regard, puis me tourne vers Elliot.
- Je viens pour le café.
Il regarde le grand manitou, afin que celui-ci lui confirme mes dires. Je suis assez grande pour prendre mes décisions toute seule quand même.
- Ok, je t’attends pour le café alors.
Je lui souris, puis me retourne vers mon futur patron.
- La prochaine fois que vous répondez à ma place je le prendrais moins bien qu’aujourd’hui.
Il lève les yeux au ciel.
- Nous avons besoin de mettre certaines choses au point et le repas est le seul créneau qu’il me reste, alors vous mangez avec moi, point.
- Peut-être, mais la prochaine fois, essayez de m’en faire la demande gentiment, et ne pas me donner d’ordres.
- C’est du pareil au même, vous mangez avec moi, point final.
Ce type à un esprit étroit, il ne comprend rien à rien.
- Pourquoi ne mangez-vous pas avec vos collaborateurs ?
- Parce que je suis le patron et eux les collaborateurs. Il faut instaurer une certaine hiérarchie, si l’on veut être respecté.
- Ha. Et moi je suis quoi ? Vous mangez bien avec moi.
- Vous, ce n’est pas pareil, vous êtes mon ombre. Et je dois vous briefer avant d’arriver.
Super, je suis élue, « ombre de petite nouille ». Je dois être la boulette de viande qui accompagne les spaghettis alors. Ou bien le basilic, cela dépend si je sens bon ou pas.
- Est-ce que je sens bon ?
- Quoi ?
Il me regarde complètement perdu, un peu énervé.
- Est-ce que je sens bon ?
Il fronce les sourcils, secoue la tête.
- Mais je n’en sais rien moi !
Puis, devant mon insistance il se rapproche, se penche et me renifle.
- Oui, vous sentez le savon.
Super, je suis le basilic. La boulette ne m’aurait pas enchanté en fait. Je préfère être une plante verte, plutôt qu’un morceau de viande pas fraîche. Toute ragaillardie, je lui lance :
- Bon ! On mange, j’ai la dalle.
Je l’entends grommeler des trucs dans sa barbe puis il se dirige vers les sièges que l’on occupait ce matin. Il s’y assied et me lance un regard électrique. Ses yeux bleus y sont pour beaucoup, je crois. Il me file les jetons tout à coup. Est-ce que je serais capable de ne pas me faire manger par lui et son caractère de grizzli ?
Je m’installe en face de lui, et attends sagement la suite. On nous apporte le repas et je salive devant mon assiette. Entre temps, son téléphone a sonné et il discute sans plus faire attention à moi. C’était bien la peine de m’obliger à manger avec lui !
Mon assiette finie, je repense à mon contrat et le sors de ma sacoche pour le poser à côté de son assiette. Puis je me lève et m’apprête à rejoindre Elliot pour le café promis.
- Où allez-vous comme cela ?
Je me retourne surprise qu’il se souvienne de moi.
- Je vais prendre mon café comme promis à Elliot.
- Nous n’avons pas fini, vous restez ici.
S’il pense que je vais l’écouter, il peut se brosser.
- Moi j’ai fini de manger, et je vais prendre un café avec mes collègues de travail.
- Non !
- Si !
- NON ! dans votre contrat il est stipulé que vous êtes mon assistante personnelle, pas celle d’Elliot.
Je secoue la tête, un air désolé sur le visage.
- Non, plus maintenant, article 10 paragraphe 2 je crois dans « exclusion et annulation d’ordres » c’est dans mon contrat.
Il est complètement sonné.
- Comment cela ? Quel contrat ?
- Celui que je viens de vous rendre. J’y ai fait quelques modifications, que vous êtes, malheureusement obligé d’accepter. Je vous suggère de le lire et de l’apprendre par cœur, il change légèrement par rapport un premier jet que vous m’aviez donné.
Voilà, je crois qu’il ne respire plus. Il me regarde avec incompréhension. Je pense que je suis la première personne qui ne s’exécute pas au premier ordre donné. Mais il m’a mise dans une rage folle. À cause de lui, je suis dans un avion en partance pour la Chine. Et le comble du comble, je viens de reprendre le boulot que j’exècre le plus, secrétaire. Alors il ne va pas falloir me secouer beaucoup pour que j’explose. De toute façon, les modifications que j’ai apportées à ce contrat sont faites pour qu’il les refuse et me renvoie à mon ancien travail, pénard et sans stress.
5 commentaires
FeizaBabouche
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Il y a 7 ans
Caro Handon
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Il y a 7 ans
WadeWilla
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Il y a 7 ans
Jeanne F.
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Il y a 7 ans
backtowrite
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Il y a 7 ans