Jeanne F. LA MULE ET LE HERISSON LA CHINE (1)

LA CHINE (1)

Mes fesses sont effectivement dans un avion, direction la Chine. Où exactement ? Je ne sais absolument pas. Apparemment, mon rôle consiste à répondre à un téléphone que je n’ai pas et réserver des tables dans des restaurants que je ne connais pas. Je sens que je vais être super utile. Pour passer le temps, je sors mon nécessaire à broderie, me déchausse et m’installe confortablement devant un film quelconque. Cet avion privé est très confortable, pas de voisin collé à soi, pas de bruits annexes qui perturbent votre concentration.

Petite nouille, et sa clique, sont au fond de l’avion en grande conversation sur je ne sais quel sujet. Mais vu que je n’ai pas été convié, je reste dans mon siège à regarder les nuages et le film en même temps. L’hôtesse de l’air m’a apporté un petit déjeuner, et je pense que finalement ce ne sera pas si mal assistante.


Une pichenette sur mon casque audio me fait lever la tête. Petite nouille est devant moi, la mine patibulaire. Un véritable bouledogue. Je soupire, agacée qu’il me coupe dans mon film et mon petit déjeuner. Je retire le casque et le regarde d’un air interrogateur.


- Quoi ?


- Vous êtes là, pour m’assister, pas pour vous étaler, dans la moitié de l’avion avec vos fils et tissus qui ne servent à rien.


- Je ne sais pas piloter l’avion et pour ce qui est de prendre rendez-vous chez votre esthéticienne, je n’ai pas de téléphone, alors je suis désolée, mais il faudra attendre d’arriver à bon port pour que je puisse vous programmer votre épilation du maillot.


Et sur ce, je remets le casque et me concentre sur Tom Cruise.


De nouveau, une pichenette. Je soulève un écouteur.


- Quoi encore ?


- Vous savez taper à la machine ?


Hou, là, je vois arriver les emmerdements.


- Non !


- Menteuse, sur votre CV, il est noté que vous avez fait des études de secrétariat, donc vous savez taper à la machine.


Je grimace, il s’est renseigné, ce n’est pas drôle.


- D’accord, je sais taper à la machine, mais il y a longtemps et je ne suis pas sûre de pouvoir y arriver encore.


Il me tend un ordinateur, un téléphone immense et une tablette.


- Voilà, vos outils de travail. Toujours les avoirs sur vous. Tout ce qu’il se dit ici ou en réunion doit être protégé par un mot de passe. Vous ne téléchargez aucun film, aucune chanson ou autre truc de fille, sur ce matériel. La sécurité avant tout. Ralph va vous briefer et Elliot, va-vous expliquer le fonctionnement de tout ceci.


Il me désigne tout le matériel qu’il vient de me mettre sur les genoux. Je le regarde un tantinet énerver.


- Vous avez remarqué que je suis en train de déjeuner ? Je suis en pause là ! Donc, vos directives vous me les donnerez une fois que mon estomac sera bien rempli, pas avant.


Je le vois ouvrir la bouche, la refermer, lever un sourcil, prendre son air de pas content.

- Vous n’avez rien foutu ce matin et vous prenez une pause, vous vous fichez de moi ?


Il commence à m’énerver et il va me gâcher mon petit déjeuner. J’époussette mes mains, repousse doucement mon plateau, puis me lève doucement, mais surement. Je me place face à lui et les yeux dans les yeux.


- Vous m’avez réveillé à quatre heures du matin, pour que je coure partout vous chercher une tenaille, que j’ai par miracle, réussi à trouver, car non, je ne fabrique pas ce genre d’article. Non content de cela, il a fallu que je prenne ma voiture pour venir couper des menottes que vous avez eues la bêtise de vous laissez passer par votre assistante, que vous sautez en dehors des heures conventionnées. Après cela, il a fallu que je me batte avec votre toutou, pour finir, par me retrouver, contre mon gré dans cet avion à neuf heures du matin. Donc j’estime que cette pose j’en ai besoin, elle est même vitale. Donc, pour résumer, je mange et après je vous écouterai me donner vos ordres. Et à ce moment-là, je verrais s’il est possible de vous assister ou bien, au contraire, vous vous débrouillerez tout seul comme un grand.


Il me fusille du regard, je le fusille du regard. Il est grand pour une nouille, mais je ne vais pas me dégonfler.


Tous les jours, je passe derrière lui pour nettoyer, ramasser et astiquer sa maison, je lui prépare ses repas, et maintenant il faudrait aussi que je sois au garde à vous, quand monsieur, le décide ? Hors de question. Il m’a voulu comme assistante et bien il va m’avoir, mais à mes conditions. Sa mâchoire se contracte de rage, puis je le vois réfléchir, pour enfin fléchir.


- Sandra, mon petit déjeuner, je vais le prendre avec elle. Comme cela, nous pourrons parler boulot pendant ce temps.


Il est impossible, je souffle et lève les yeux au ciel. Ce type aura ma peau. Je m’assieds et remarque que tout le monde nous regarde les yeux grands ouverts, la peur a envahi leurs visages. Je les fixe un peu perdue.


De nouveau en position assise, je continu mon petit déjeuner tranquillement, pendant que petite nouille arrête le film, et tourne son siège face à moi.


- Bon, pour commencer, je ne m’épile pas le maillot. Deuxièmement, vous allez retranscrire la réunion de ce matin et me la faire parvenir par mail. Elliot vous donnera tous les codes d’accès. Je veux le tout pour la fin de ce vol.


Mon croissant, entré dans ma bouche reste en suspens. Je lève les yeux vers lui, mais je constate qu’il est tout à fait sérieux. Je croque, mâche tout en secouant la tête.


- Et il me reste combien de temps avant la fin du vol ?


- Onze heures environ.


- Et je dors quand ?


- Quand vous aurez fini votre travail !


L’hôtesse arrive, pose sa tasse de café et son croissant à côté du mien.


- Il y aura deux réunions à retranscrire, celle de ce matin dans mes locaux et celle que nous allons avoir ici même avec mes collaborateurs. Vous pensez que vous y arriverez ?


Je hausse les épaules.


- Je ne sais pas, je vais essayer.


- Le mot "essayé" ne fait pas partie de mon vocabulaire !


- Ha ! dommage, parce qu’il fait partie du mien.


Il me lance un autre de ses regards hautain et prétentieux. Mais la seule chose que j’arrive à voir quand il a ce regard, c’est lui, attaché à un lit avec des menottes à se trémousser parce qu’il a une envie présente. Je lui souris et continue à manger.


- Elliot c'est lequel ?


Il me désigne un rouquin à lunette plongé dans son ordinateur.


- Il s’occupe de tout ce qui est informatique, donc si vous avez besoin, adressez-vous à lui.


- D’accord, et pour le reste, je m’adresse à qui ?


- Moi !


- OK.


Il me tend une liasse de papier,


- Votre nouveau contrat, vous le lisez et le signé. Toutes les règles doivent être respectées à la lettre.


- D’accord.


Il me regarde en plissant les yeux.


- Vous êtes bien conciliante tout à coup.


- Je ne suis pas conciliante, je vous écoute, je vais étudier tout cela à tête reposée et après je vous donnerais mon sentiment sur toutes ces nouveautés. J’ai environ onze heures ?


- Exact.


- Très bien, et bien à dans onze heures, monsieur.


Je prends, tablette, ordinateur, liasse de papier et toute la pagaille qu’il m’a donnée et pars direction Elliot.

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4 commentaires

FeizaBabouche

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Il y a 7 ans

Haha il est pas tombée sur une plante verte lui lol

WadeWilla

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Il y a 7 ans

J'adore le répondant qu'elle a et la répartie de petite nouille.
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