Fyctia
Chapitre 28.1
St Yves, novembre 2024, présent
Le sol vacilla sous les pieds d’Elena Benson, autour d’elle plus rien ne lui semblait palpable, telle une étreinte insaisissable. Son monde familier s’évaporait, tout ce en quoi elle avait cru s’écroulait, comme des vestiges évanescents de son passé. De toute sa vie de magicienne, on lui avait menti. Pire encore, elle avait été utilisée pour combattre Brack. Une marionnette de la Prophétie.
Et maintenant, cette femme évoquait Lévi, comme s’il était le grand méchant qu’elle devait combattre en tant qu’Élue. Elena tenta désespérément de raccrocher ses pieds au sol, de réajuster son esprit à la réalité.
— C’est n’importe quoi, dit-elle d’une voix faible. Pourquoi devrais-je affronter Lévi ? Il n’est pas une menace, contrairement à vous.
Elena serra les poings, ses ongles marquant sa peau de traces blanches. Lévi demeurait silencieux à ses côtés.
— Tout ce que je veux, lâcha Arabelle Parkes, c’est protéger mon fils.
— Je ne t’ai jamais rien demandé, grogna le concerné. Sans toi, rien de tout ceci ne serait arrivé.
Noah sentit une douleur lancinante le traverser, il se tint la tête entre les mains, des grognements étouffés s’échappant de sa gorge. Il était le dommage collatéral, perdu dans les méandres d’une histoire qui ne le concernait pas. Sa vie avait basculé, transformé en une créature monstrueuse, appelé sans cesse à se nourrir de sang frais. Tout ça pour une Prophétie qu’il ne comprenait même pas.
— Noah ? questionna Elena.
Tout à coup, un bruissement inquiétant s’éleva dans la forêt, rompant le silence qui avait enveloppé le bosquet. Des ombres sinueuses commencèrent à se mouvoir entre les arbres, un murmure mystérieux flottant dans l’air.
Lévi prit la main d'Elena et la tira vers l'arrière, loin de l'autel.
— Nous devons partir d'ici, maintenant, murmura-t-il alors que sa mère semblait distraite par les silhouettes voluptueuses qui émanait à l’orée du bois.
Elena jeta un regard peiné à Noah, replié sur lui-même, qui semblait toujours souffrir.
— Viens, insista Lévi en regardant le vampire à son tour. On trouvera un moyen de l’aider. Mais pour le moment, nous devons partir !
Tandis qu’ils atteignaient le seuil des arbres, une barrière magique s’éleva derrière eux, empêchant quiconque de les suivre. Les murmures mystérieux se transformèrent en une mélodie douce à leurs oreilles. Elena échangea un dernier regard avec Noah. Enveloppées par les ombres protectrices de la forêt, elle et Lévi disparurent dans la lueur du soleil déclinant.
Les contours du cottage se dessinaient dans la lueur du soir, et Lévi guida Elena jusqu’à l’intérieur. Leurs mains demeurèrent entrelacées, un lien tangible face à l’océan d’incertitudes qui venait de déferler.
Une fois à l’intérieur, l’écho des révélations du bosquet persistait, infusant l’atmosphère de la pièce. Elena, submergée par le tumulte de ses pensées, sentit le monde tourner autour d’elle. La nausée la saisit et elle se libéra de Lévi, trouvant refuge sur le canapé du salon.
Tant de changements en si peu de temps. Arabelle Parkes, hier présumée morte, avait refait surface pour leur révéler que la Prophétie qu’Elena croyait réaliser, ne l’était pas en vérité. Et que Noah, ce matin encore humain, était en réalité un vampire. Elle laissa des larmes s’inviter sur ses joues à la pensée de son ami. Puis, les pleurs devinrent incontrôlables, les barrières cédèrent et Elena s’effondra. Immédiatement, Lévi vint s’installer près d’elle, son soutien silencieux. Le jeune homme lui aussi était fébrile, il avait l’impression que son corps ne lui répondait plus.
Dans l’éclat fugace du crépuscule, ils restèrent ensemble, partageant un silence d’émotions. Le temps s’étira jusqu’à ce que les larmes d’Elena se tarissent, et que le soleil achève sa descente derrière l’horizon.
Les paroles étaient vaines, ils conclurent seulement qu’ils chercheraient Noah le lendemain. Même si l’espoir était mince, même si le destin du jeune homme semblait inévitable, ils étaient déterminés à ne pas l’abandonner aux mains des parents Parkes.
La nuit engloutit le cottage, et Elena décida d’aller prendre une douche. L’eau chaude sur son corps fut salvatrice, mais elle ne put effacer les doutes qui la rongeaient. Arabelle Parkes leur avait dit qu’elle et Lévi étaient liés par la Prophétie. Était-ce pour cela qu’elle s’était toujours senti proche de lui ? Ce lien qui l’attirait à cet homme, envers et contre tout. Ce manque pendant des années, puis ce tout qu’il avait rempli. Tous ses sentiments en ébullition, ses frissons à son contact, cette sensation d’être complète. Est-ce que tout cela n’était qu’illusions créées par une prophétie ?
Elena ne pouvait s’y résoudre, elle n’avait jamais douté de ses sentiments pour Lévi, hors de question de le faire maintenant. Il était la pièce manquante de son puzzle, sa lumière dans les années de ténèbres. Jamais, elle ne renoncerait à lui.
4 commentaires
Catherine Domin
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Il y a un an
Siha
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Il y a un an