Fyctia
Chapitre 23.1
Londres, janvier 2020, cinq ans auparavant
Après les festivités de fin d’année, Lévi Parkes était retourné au Château. Cependant, quelques jours à peine s’étaient écoulés avant que ses parents ne l’appellent de Londres, lui enjoignant de revenir au manoir familial. Bien qu’il ait initialement résisté, sa volonté avait été écrasée sous la pression parentale. Malgré ses dix-huit ans, il n’avait guère de pouvoir sur ses propres choix. Une voiture l’attendait devant le Château, prête à le ramener à la vie citadine.
En sortant de la berline, le froid le fit frissonner et il dissimula son visage dans la large écharpe qu’il portait. Lorsqu’il franchit les portes du manoir des Parkes, un sentiment de familiarité l’envahit. Les vastes couloirs étaient ornés d’antiquités, de tableaux et de lustres étincelants qui reflétaient la richesse et la puissance de la famille. Des tapis moelleux étouffaient le son de ses pas alors qu’il avançait vers le hall principal, où les générations de Parkes avaient pris des décisions qui allaient bien au-delà des murs de cette demeure.
Le jeune garçon fut accueilli par ses parents, tandis qu’une petite femme vint le débarrasser de son manteau, son bonnet et son écharpe. La froideur de l’accueil contrastait avec la chaleur du décor.
Arabelle Parkes était une femme d’une beauté frappante. Ses cheveux blonds encadraient délicatement son visage et ses yeux bleus regardaient son fils avec fierté. Elle arborait une robe élégante, son port altier et sa démarche assurée témoignaient d’une grande force intérieure.
Morbius Parkes, légèrement en retrait, avait les épaules larges et une stature imposante. Ses cheveux grisonnants étaient soigneusement coiffés en arrière, et son costume impeccable lui donnait une élégance intemporelle. Les lignes de son visage racontaient l’histoire de nombreuses responsabilités, et dans ses yeux gris, Lévi devina une pointe d’inquiétude.
Ils lui annoncèrent rapidement que Leif Brack était en chemin pour le manoir. Lui et ses partisans les plus proches seraient hébergés ici pour une durée indéterminée. Les parents de Lévi semblaient jouir d’une excitation qu’il ne comprenait pas.
— Nous devons être présentables, insista sa mère. Tu devrais aller te changer.
Elle évoqua l’importance de l’image que la famille devait projeter. Brack étant, selon elle, une opportunité qu’ils ne pouvaient pas négliger. Lévi soupira, ses pensées s’embrouillaient, partagées entre la loyauté envers sa famille et son rejet viscéral de la magie obscure.
— Je ne veux pas être complice de ça, murmura-t-il.
Mais ses parents étaient déjà loin, emportés dans le tumulte des préparatifs. Il monta précipitamment jusqu’à sa chambre au premier étage et claqua la porte dans un bruit sourd. Il ne pouvait s’empêcher de ressentir un sentiment de colère. Pourquoi sa famille s’était-elle alliée à ce fou de Leif Brack ?
Lévi avait été éduqué dans la conviction de la suprématie des mages. Au sein de sa famille, Le Pacte n’était qu’une formalité à laquelle il avait été préparé tout au long de sa vie. Chez lui, la magie était sujette de conversation du matin au soir et lui-même était convaincu que leurs pouvoirs les plaçaient au-dessus des non-mages. Cependant, il restait perplexe face au désir de Brack de plonger dans une magie de ténèbres pour accroitre davantage sa domination. Ses parents, une famille aisée et influente au sein de la communauté, avaient également été attirés par cette voie. Alors Lévi avait entrepris de se documenter sur cette magie, pour finalement découvrir qu’elle émergeait de la haine. Ce qu’il connaissait n’était pas cela, tout en son pouvoir reflétait la lumière. Il s’était alors juré de ne jamais toucher à cette sorcellerie.
À contrecœur, Lévi s’était mis sur son trente-et-un pour l’arrivée imminente de Leif Brack et de ses fidèles. Son désir de rester cloitré dans sa chambre à écouter de la musique avait été éclipsé par ses devoirs familiaux. Son père, sa mère et lui attendaient l’un à côté de l’autre dans le hall, comme une illusion d’un portrait de famille parfait. Une rangée de domestiques se tenait non loin d’eux, et Lévi ne put s’empêcher de trouver tout cela ridicule.
Lorsque Leif Brack fit son entrée, le pouvoir émanait de lui, et le jeune garçon aurait juré avoir vu sa mère faire une sorte de révérence. Le mage noir scrutait chaque détail avec intensité, et tous les gens présents semblaient captivés par cet homme. Tous sauf Lévi, qui faisait tout pour essayer de passer inaperçu.
— Quelle belle demeure, dit le mage noir à l’attention des Parkes. Je vous remercie pour votre hospitalité.
Arabelle Parkes lui répondit avec son plus beau sourire, puis les yeux de Brack se posèrent sur Lévi, un frisson le parcouru.
— Je suppose que c’est votre fils ?
Le blond ne répondit pas malgré ses parents qui le foudroyaient du regard.
— Comment t’appelles-tu jeune homme ?
Leif Brack se plaça très proche de lui, afin que son regard ne puisse être évité.
— Lévi, grommela le garçon.
Le mage sourit, et Lévi sentit un sentiment de répulsion monter en lui, même quand l’attention de Brack revint sur ses parents.
Un repas gargantuesque avait été préparé pour l’occasion. Dans l’immense salle à manger, une longue table était dressée avec élégance. Évidemment, les discussions tournaient autour de la magie, de ses nuances et son potentiel inexploré. Lévi se sentait observé, et il aperçut plusieurs fois Leif Brack jeter des regards dans sa direction, tentant de capter son intérêt. Il évita soigneusement d’entrer dans son jeu, sentant une boule se former dans le creux de son ventre, comme un mauvais pressentiment.
À la fin du dîner, le blond fut libéré de ses obligations et il ne tarda pas pour se retirer dans sa chambre. Le clic de la porte verrouillée résonna dans le silence, le cœur de Lévi palpitant avec une intensité presque douloureuse. Une intuition lancinante s’insinuait dans son esprit, lui murmurant que les jours à venir seraient pénibles.
1 commentaire
Kat_emerald
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Il y a un an