Fyctia

Leif Brack brisa le silence qui enveloppait l’endroit, sa voix profonde résonnant dans l’air comme un écho funeste :

— Bienvenue dans les ruines de ce château qui était autrefois celui d’un grand mage. Vous avez accompli une tâche que peu aurait osé entreprendre vu votre jeune âge. La Pierre d’Équilibre est entre vos mains à ce que je vois, dit-il en posant ses yeux sur Elena. Mais une question demeure : êtes-vous prêts à en payer le prix ?

Il fixait Elena comme s’il essayait de lire en elle.

— C’est donc toi, l’Élue ?

Aucun mot ne sortit de la bouche de la jeune femme, son seul réflexe fut de cacher la Pierre d’Équilibre derrière son dos, même si elle savait que c’était peine perdue.

— J’ai entendu parler de toi. Adrian Parkes, ce pauvre malheureux, a essayé de te tuer, ce n’était pas de mon fait. Il avait peur pour moi. Il pensait qu’avec cette histoire de Prophétie, tu mènerais à ma perte. Mais je suis joueur, j’attends d’en voir plus à ton propos.

Il ricana, tandis qu’Elena sentait une boule monter dans sa gorge.

— Bon, venons-en au fait. J’ai besoin de la Pierre d’Équilibre. J’attendais justement qu’ils envoient leur Élue en pâture pour la déloger à ma place. C’est chose faite, alors maintenant, donnez-la-moi.

— Vous savez que je ne peux pas faire ça.

Les mots étaient sortis tous seuls de la bouche d’Elena, malgré la peur qui lui faisait tourner la tête.

— Et tu comptes faire quoi ?

La confiance se lisait sur son visage, il leva son sceptre dont l’extrémité s’alluma de rouge.

— Vous savez que vous ne pouvez rien faire contre moi.

Elena porta la main au pendentif, il fallait qu’ils s’enfuient, c’était la seule solution. Les partisans de Brack, les Ombres, étaient nombreuses autour d’eux et le mage noir lui-même étaient sûrement plus puissant qu’eux tous réunis. La jeune femme ouvrit la bouche pour réciter l’incantation, mais seuls des gémissements en sortirent. Elle essaya une nouvelle fois, Elena n’arrivait pas à aligner deux mots.

Son regard exorbité accrocha Brack, elle porta la main sur sa gorge, les larmes au coin des yeux.

— Tu croyais vraiment que j’allais vous laisser partir avec la pierre ? Allons, ne rendez pas la chose plus difficile qu’elle n’est. Donnez-moi la Pierre d’Équilibre, je vous laisserai rentrer sains et saufs.

Durant ses mois au Château, la jeune femme n’avait pas encore appris à sauter, c’était un sort compliqué, il était impossible pour eux de partir d’ici sans utiliser le pendentif.

Noah fonça vers Elena pour s’emparer du pendentif à son tour, si son amie ne pouvait pas les téléporter, il le ferait. Cependant, il n’eut même pas le temps d’atteindre son but qu’il fut projeté en arrière. Elena regarda la scène, immobile et désemparée. Elle avait la nausée. Que pouvait-elle faire ? Lui donner la pierre sans se battre ? Elle en voulu à ses professeurs et aux Oracles de les avoir laissés partir seuls dans cette quête impossible.

— Tu n’aurais pas dû faire ça, gamin.

Leif Brack leva une nouvelle fois son sceptre, et un sort en jaillit, rouge et puissant. Le trio n’eut pas le temps de bouger que Tilly fut élevé dans les airs, et alla se fracasser contre un des rares murs en ruine du château.

— Tilly, hurla Noah !

Elena, toujours muette, sentit la colère monter en elle alors qu’elle observait son jeune ami courir vers Tilly qui semblait blessée. Elle ne pouvait pas les laisser mourir ici, si elle avait un quelconque pouvoir, il était temps de le révéler. Ses yeux se fermèrent, et des larmes coulèrent le long de ses joues.

Brack pointa son sceptre vers elle, et sans qu’elle ne puisse lutter, la Pierre d’Équilibre s’échappa des mains de la jeune femme pour voler vers le mage noir. Elena ne se laissa pas atteindre, ses pensées étaient tournées vers ses amis, il fallait les sauver.

Tout à coup, un cri retentit de sa bouche, déchirant l’air. Leif Brack écarquilla ses yeux, tout en regardant la lumière jaune qui s’était mise à envelopper Elena. Cette dernière bougea enfin, se précipitant vers Noah et Tilly. Bientôt la lueur les entourait tous les trois. Les mages autour d’eux tentèrent de lancer des sorts, mais la lumière semblait agir comme une barrière protectrice. Elena mit la main sur le pendentif une nouvelle fois.

— In loco novum !

Et le trio disparut, ne laissant sur leur passage qu’une faible étincelle et l’écho du cri d’Elena qui hanta un moment les vestiges du château.