Fyctia

Leur retour au loft de Lévi Parkes fut silencieux, le jeune homme fit chauffer de l’eau pour faire du thé tandis qu’Elena Benson s’éclipsa pour prendre une douche. Alors que l’eau brulante réchauffait son corps, elle repensa au moment où, avec Lévi, elle avait récité l’incantation en latin. Encore une fois, leur magie s’était pleinement accordée, une harmonie parfaite. Elena avait déjà ressenti son pouvoir évoluer quand elle avait découvert La Lumière vive, et elle avait également déjà pratiqué la magie en duo, cependant elle n’avait jamais rien éprouvé de tel.

Un lien indescriptible l’attirait vers Parkes, un lien qu’elle n’arrivait pas à comprendre et pour lequel elle avait de plus en plus de mal de résister.

Ses pensées se remplirent de ses amis ; elle aurait tant aimé pouvoir leur parler de ses préoccupations. Mais, bien que ça lui ait déchiré le cœur, elle avait décidé de laisser Tilly en dehors de ça. Et Noah n’était plus là. Un souffle de solitude, impitoyable, s’empara d’elle et s’infiltra dans chaque partie de son corps jusqu’à ce que sa tristesse la fasse tomber à genoux dans la cabine de douche. Les larmes se mêlèrent à l’eau qui coulait sur elle. Elle avait toujours pu compter sur ses deux amis, inséparables, unis pour toujours. Pourtant, quand elle ferma les yeux, c’était le visage de Lévi qui apparu au fond d’elle, et elle s’en voulut pour ça. Par moment, elle avait envie de laisser ses sentiments exploser et les laisser la consumer, mais elle s’obligeait à se concentrer sur leur mission. C’était tout ce qui comptait.

Quand elle retourna à la cuisine, deux tasses de thé fumant étaient sur le plan de travail en bois. À côté, se trouvaient des dizaines de photos venant du téléphone d’Elena, que Lévi avait imprimé pour étudier la Carte des Lignées. Le jeune homme était debout, pencher sur les photographies, le regard concentré, avec des cernes qui trahissaient sa fatigue. Elena l’observa un moment. Invisible à ses yeux, tant il était perdu dans son observation, elle prit le temps d’examiner chacun de ses mouvements, et de deviner la courbure de son corps caché derrière le tissu de sa chemise blanche. Ses cheveux, d’habitude ramenés en arrière, retombaient sur son front.

Lévi releva la tête, sentant la présence d’Elena, et lui jeta un regard rapide.

— Ah, tu es là, dit-il en fixant de nouveau les photos. J’ai fait du thé. Et j’ai tout imprimé, on pourra prendre le temps d’examiner.

Sans un mot, la jeune femme s’empara d’une tasse et s’installa sur un des tabourets hauts. Elle souffla sur le thé trop chaud, Lévi leva de nouveau la tête et, abandonnant son analyse, fit quelques pas vers elle.

— Mais ça peut attendre un peu. Tu as faim ?

Elena fit un mouvement de la tête pour dire non, ses yeux noisette accrochés à la fumée de son thé.

— Tu peux aller te reposer, continua doucement Lévi.

Puis n’ayant aucune réponse, il s’approcha un peu plus près, si bien qu’une agréable odeur d’agrumes s’infiltra dans les narines d’Elena.

— Benson, tu vas bien ?

Elle le regarda et sourit. Sa plus grande envie à cet instant était de se blottir contre Lévi Parkes pour sentir la chaleur de ses bras lui insuffler une dose de vie.

— Je m’excuse, dit-elle. Je vais bien. J’avais juste besoin d’une minute. C’était intense au manoir.

— Oui, désolé de t’avoir embarqué là-dedans.

Il passa la main dans ses cheveux pour les ramener en arrière, comme il le faisait souvent. Il soupira.

— Mais au moins, nous avons trouvé la carte, affirma Elena. Elle doit être vraiment importante pour que ton père la protège comme ça.

— Il ne reste plus qu’à l’interpréter.

Lévi retourna devant les photographies étalées et posa les deux mains sur le plan de travail pour se pencher de nouveau au-dessus.

— Je peux m’en occuper si tu veux aller dormir quelques heures.

Elena s’était déjà levée pour s’approcher du jeune homme, elle regardait aussi les photos.

— Je dormirai plus tard, déchiffrons cette carte.

Au bout d’un moment, ils étaient venus à la conclusion que les points sur la carte étaient des lieux, et Lévi remarqua que ceux-ci avaient tous un rapport avec le passé de son père. C’était comme si la carte des Lignées reliait différents endroits qui avaient compté dans la vie de Morbius Parkes.

— Tous ces emplacements se trouvent dans les Cornouailles. C’est là que mon père a passé son enfance et une partie de sa vie avant de rencontrer ma mère. Il m’en a déjà parlé, mais je ne m’y suis jamais rendu.

— Alors, on ne pourra pas utiliser la magie pour s’y rendre.

— Je crois qu’un petit séjour dans les Cornouailles s’impose !

Lévi s’enquit de la réaction d’Elena. L’idée de partir dans un autre comté avec Parkes lui semblait étrange, mais la situation s’imposait à eux. Ils risquaient d’avoir plusieurs endroits à visiter dans le coin, et ils ne pouvaient pas faire le voyage à chaque fois. Elle accepta, et avant même qu’elle ne le réalise, Lévi avait réservé un cottage sur internet. Il préparait à présent un sac à dos avec des vêtements.

Elena sauta jusque chez elle pour faire de même, et remplit un sac de voyage avec des habits chauds. Les températures commençaient nettement à baisser en cette première semaine de novembre.

Quand elle retourna à l’appartement de Lévi, une question lui traversa l’esprit.

— Et comment allons-nous y aller si on ne peut sauter ? En train ?

— J’ai mieux que ça, dit Lévi en lui faisant un signe de tête de la suivre.

Ils se dirigèrent vers l’entrée pour descendre au rez-de-chaussée. Là, derrière une porte de garage, Elena découvrit une moto d’un bleu métallique.

Lévi ne put s’empêcher de sourire en voyant la tête d’Elena.

— Pas vraiment fan à l’idée de faire un tour à moto ?

— Je…je n’en ai jamais fait.

— Ça se passera bien, rigola le jeune homme. Il te suffira de bien t’accrocher à moi.

Il lui fit un clin d’œil avant de tourner le dos pour sortir du garage. Et Elena le suivit en essayant, sans grand succès, de cacher le rouge de ses joues.