Fyctia
Chapitre 15.6
Luther congédia Arthus et entraina ses hommes à l’écart. Lorsqu’il leur apprit la nouvelle, et qu’il vit leurs regards horrifiés, il se sentit libéré d’un poids. Sa détresse trouvait un écho dans la lueur meurtrière qu’il vit dans le regard noir de Jared, dans l’expression glacée et résignée de Calhoum, et enfin dans le visage suspicieux et effaré de Thomas, qui en oublia de balayer ses boucles cuivrées de la main.
— C’est étrange, lança ce dernier, les sourcils froncés. Loth est peuplée de Nassin. Les Goumis auraient massacré leurs propres frères ?
—Les Goumis les considèrent peut-être comme des traitres à leur peuple, hasarda Jared.
— Par Loren, ces gens sont des barbares de la pire espèce, renchérit Calhoum. Ne cherchons pas à percer les secrets de leur âme noircie par le vice.
—Je suis étonné de tes paroles, Calhoum ! lança Thomas avec ironie. Toi qui es d’habitude si enclin à sauver les âmes de tous ceux qui t’entourent, tu penses donc qu’il n’y a rien à sauver pour le compte de Loren chez les Nassin ?
— Le message de Loren ne pourrait être compris par des animaux sauvage, articula Calhoum du bout de ses lèvres pincées. Il faut être un Homme pour en apprécier la teneur et la grandeur. Les Nassin ne savent que brûler, piller et tuer.
— Et nous allons leur rendre la pareille avec joie ! renchérit Jared, un sourire cruel aux lèvres.
— Quels que soient les responsables de ce massacre, intervint Luther, je veux qu’ils soient traqués et massacrés jusqu’au dernier. Préparez les hommes. Nous partons demain dès les premières lueurs de l’aube. Avisez également le chevalier qui a porté le message à sa majesté. Je veux qu’il fasse partie de l’expédition. Il pourrait nous être utile.
Les hommes se dispersèrent. Luther se retira dans sa chambre qui lui parut plus lugubre que jamais. Le jour mourait peu à peu, et le soleil étalait sa lumière rouge sur la ville qui résistait malgré tout, luttant par les cris des marchands et les pas des citoyens pressés de rentrer chez eux après une dure journée de labeur. Le sang appelle le sang, songea-t-il. Les cinq années qu’il avait passées à asservir ce peuple se retournaient désormais contre lui. Ses propres actions avaient causé, d’une manière ou d’une autre, la destruction et la mort d’innocents que son oncle avait placés sous sa responsabilité. Une sensation d’échec allait et venait en lui comme une nausée, lui tordant le ventre et le faisant trembler par moment.
Demain matin, il serait sur les routes, traquant les responsables de ce massacre comme les bêtes qu’ils étaient. Après cela il devrait anéantir tout un peuple. Dieu seul savait quand il serait en mesure de revenir à la civilisation. Mais la guerre tant voulue par la reine trouvait désormais sa justification aux yeux de tous, y compris de ses propres officiers.
Il ne parviendrait jamais à convaincre qui que ce soit du bien-fondé de son projet désormais. Personne ne le soutiendrait dans sa volonté de prendre le pouvoir. Même le Temple ne pourrait rien pour lui. L’attaque de Loth était une déclaration de guerre, et tous étaient d’accords pour y apporter une réponse ferme et immédiate. La question de la légitimité de Tiago à monter sur le trône paraissait risible et dépourvue de la moindre importance. On pourrait même le soupçonner de vouloir affaiblir le royaume dans un moment crucial, le conseil se retournerait contre lui et la vengeance de la reine s’abattrait sur lui, terrible et précise comme un couperet. Aucun de ses hommes ne soutiendrait son action, et il périrait en traitre de la Couronne sous les applaudissements de ses frères. Puis, Jared ou Thomas le remplacerait à la tête des chevaliers, et le cycle infernal recommencerait encore et encore.
Il réalisa qu'une part non négligeable de son être voulait tout cela, et appelait la guerre de ses voeux. Loth devait être reprise. Grégori et les autres devaient être vengés, c’était une absolue priorité. Tout à coup, il vit rouge, la colère palpita dans ses veines, annihilant toute autre pensée rationnelle. On l’avait attaqué au cœur, il répondrait de même. Un désir de violence et de destruction s’empara de son âme enflammée. Son départ prévu à l’aube s’étira tout à coup très loin de lui, trop loin. Il aurait voulu parti immédiatement, son arme au poing, les yeux rougis par la colère et la soif du sang ennemi.
Des coups timides à sa porte le firent sursauter.
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camillep
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Il y a un an
Mary Lev
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WildFlower
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clecle
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