Fyctia
Chapitre 11.7
Il se regardèrent dans les yeux. Elle sembla lutter contre quelque chose. Puis, elle finit par dire d’une voix étouffée :
— Je ne veux pas mourir sans avoir connu l’étreinte d’un homme.
Sa vulnérabilité le toucha. Il caressa les pommettes qui avaient pris une délicieuse teinte rosée. Il y déposa des baisers passionnés.
— Tu ne mourras pas ici, murmura-t-il, je te le promets.
Il s’écarta d’elle pour la laisser s’assoir. Il la prit dans ses bras et respira le parfum de ses cheveux. Une tendresse inconnue emplissait son cœur, tandis que son désir intact le faisait frémir.
— Même vous, mon Seigneur, n’avez pas le pouvoir de tenir une telle promesse.
Elle leva le visage vers lui pour croiser son regard brûlant et des larmes coulèrent sur ses joues. Il les essuya du bout des doigts. Son cœur se serra.
— Je te l’ai dit : tu es sous ma protection.
— Je vous suis déjà redevable par deux fois.
—Tu n’es redevable de rien. Je suis ton maître, et c’est mon devoir de te veiller sur ta sécurité.
—Ce que vous avez fait pour moi à Loth, cela vous coutera cher… Votre frère est désormais votre ennemi, par ma faute.
—Il est mon ennemi depuis des années. S'il t'avait prise, cela n'aurait rien changé.
—Vous avez pourtant attisé sa colère. Quel sera le prix à payer pour l’apaiser ?
—Ce n’est pas à toi de payer ce prix. Laisse moi me charger de lui. Tu n’as pas te préoccuper de cela.
—Comment le pourrais-je ? Je vois dans ses yeux posés sur moi son désir de vengeance… Je sens dans ma chair que le prix à payer pour l’empêcher de vous nuire sera le prix du sang.
—Il n’a aucun droit sur toi. Jamais je ne le laisserai t’atteindre, à aucun prix. Tu dois me faire confiance.
—Dans votre monde, tout se monnaie, et tout se paie, d’une manière ou d’une autre. Vous achetez une confiance, un secret, des vies humaines, la peur dans les yeux d’un enfant. Je ne peux pas payer pour votre frère. Mais je peux payer ma dette envers vous. Voilà la raison de ma présence ici.
Elle le dévisagea avec une intensité glacée, dépourvue de passion. Luther était sans voix. Il caressa sa joue. Elle frissonna lorsqu’il effleura le discret hématome sur sa joue.
Maudite brute, pensa-t-il. C’est à se demander qui sont les véritables sauvages sur cette terre.
Sa main poursuivit son trajet le long de son cou pour venir se poser sur son épaule, à l’endroit même où elle avait été brulée au fer. La réalité de leur situation le frappa alors de plein fouet. Il ferma les yeux un instant avant de lâcher prise et de s’écarter d’elle :
— Ta dette est payée, fille du désert. Laisse-moi, à présent.
Aenid recula, sonnée. Ses grands yeux exprimaient une totale incompréhension. Il reprit d’un ton plus ferme :
— Retourne auprès des autres.
Le moment intime qu’ils venaient de partager vola en éclat. Luther se releva et saisit le bras d’Aenid. Elle se dégagea. Son regard exprimait un mélange de colère et de peur.
— Pardonnez-moi, j’ai …
— Je t’interdis désormais de venir me trouver dans ma couche sans ma permission. Tu as bien compris ?
Il ressentait une colère sourde. Une colère dirigée contre lui-même, réalisa-t-il. Aenid de son côté semblait tout aussi furieuse.
— Je ne recommencerai pas, soyez tranquille.
A ces mots, elle fit volteface et prit congé.
Luther étouffa un cri de rage. Aenid n’oublierait pas de sitôt l’humiliation qu’il lui avait fait subir. Mais elle avait brisé son illusion. La perfection de ses traits avait pénétré son âme. Sa douceur et son courage avaient amadoué son cœur peu enclin aux sentiments. Sa grâce avait réveillé en lui une passion inconnue et insoupçonnée. Et il avait inconsciemment espéré être aimé en retour par elle. Il se rendait compte à présent de l’étendue de sa stupidité.
Pauvre idiot, pensa-t-il. Tu as beau jouer les protecteurs, au fond tu seras toujours l’ignoble monstre responsable de l’asservissement de son peuple. Rien de ce tu feras à l’avenir ne changera cela.
La culpabilité le tenaillait. Il n’avait jamais osé rêver d’une femme qui serait capable de le toucher de cette manière. Il se rendait compte à présent qu'Aenid était tout ce qu'il avait toujours recherché. Et lorsque Dieu l’avait enfin mise sur son chemin, il l’avait arraché à son pays. Il lui avait pris sa liberté, et il avait failli prendre sa vertu par-dessus le marché.
Je me rachèterai, songea-t-il. Je me rachèterai, auprès d’elle et des autres, si je deviens Roi. Je le jure devant l’Eternel.
Il ferma les yeux. Il n’avait jamais prié auparavant, mais il ne pouvait imaginer un moment plus opportun.
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