Fyctia

Trois femmes vêtues de noir rejoignirent la cérémonie. Elle se déplaçaient de manière étrange, comme une danse venue d’un autre temps. Leur visage et leur corps étaient entièrement drapés de noir. Seul leurs mains et leurs pieds nus sur la terre mouillée de la cour étaient visibles, des formes blanches et floues qui bougeaient dans la nuit. Luther était impressionné. Faire venir des danseuses de la mort dans un temps aussi court relevait de l’exploit.

Ces danseuses, bien qu’officiellement non reconnues par le Temple, étaient tolérées. La croyance que leur danse accompagnaient les morts dans leur voyage était ancienne, mais toujours ancrée dans l’esprit du peuple. Lucius ne sembla pas perturbé outre mesure par leur présence, et se contenta de les ignorer.

Les femmes se frappèrent la poitrine de manière tragique. Sans prononcer la moindre parole, elles exprimèrent le chagrin des hommes avec leur corps en mouvement. C’était vision étrange, teintée de ridicule. Luther avait assisté à plusieurs représentations des prêtresses de la mort, notamment lors de la mort de son père. Il fut une fois de plus capturé par l’étrange rituel.

Lucius prit à nouveau la parole :

— Que le Seigneur de Lorient s’avance, afin d’allumer le feu sacré.

Luther se ressaisit et s’avança. Quelqu’un lui tendit une torche et l’embrasa.

— Que le feu sacré le lave de ses péchés avant son dernier voyage ! clama Lucius.

Luther se trouvait désormais à quelques centimètres du corps de Déménor. Une partie du linceul avait glissé, révélant ses mains croisées sur sa poitrine. La peau de ses bras était aussi pâle que la lueur de la lune. Une bague brillait à son doigt. Il était mort sans héritier. Sa chevalière, frappée des armoiries de la famille Nuir, brulerait avec lui.

Luther sentit ses entrailles se contracter douloureusement. Il leva la torche.

Adieu mon oncle, pensa-t-il, tandis que le feu dévorait le bucher.