Fyctia
Chapitre 4.1
Quoi de plus grand que le silence du désert ? L’immensité du divin qui s’y cache.
Proverbe Nassin
Les hommes marchaient depuis plusieurs jours déjà, mais la plaine aride s’étendait toujours à perte de vue.
Hormis quelques buissons secs ici et là, tout n’était que sable et désolation. La terre pâle était lézardée par la sécheresse. Le soleil brillait intensément dans le ciel, brulant les peaux rougies, sans distinction de classe. Tout le monde marchait la tête baissée, les yeux somnolents, la respiration saccadée, à pas lents et réguliers.
Son Excellence le prince héritier Tiago de Lorient, prétendant au trône d’Amundir, poussa un soupir d’irritation. Il étouffait de chaleur. Les mouvements irréguliers des porteurs lui donnaient la nausée. L’épais tissu drapé autour de sa chaise à porteur le protégeait des rayons du soleil, mais il augmentait la température intérieure de plusieurs degrés, et il suait à grosses gouttes dans son délicat costume en soie. Il n’avait aucun moyen de se rafraichir de manière convenable. Son frère, irritant mais pragmatique, avait décrété qu’il fallait économiser la moindre goutte d’eau. Il ne fut même pas autorisé à prendre des bains rafraichissants, qui lui auraient permis de se débarrasser de la sueur et du sable accumulés.
Maudit soit Luther et cette expédition qui n’en finissait pas !
Tiago ne comprenait pas pourquoi leur mère avait tenu à ce qu’il accompagne son frère cette fois-ci. Il ne supportait pas la compagnie de ces soldats grossiers et crasseux. Il ne s’intéressait nullement aux jeux de la guerre. Sa mère lui avait alloué dès son plus jeune âge des hommes chargés d’assurer sa protection. Il n’avait jamais ressenti le besoin de manier une arme. Il trouvait cela inconfortable et lourd, indigne d’un homme raffiné. Ce qu’il aimait, c’était agir dans l’ombre. Il adorait susurrer les pensées les plus perfides à des oreilles peu averties, puis d’observer les conséquences de ses méfaits plusieurs mois plus tard au cours d’un duel, d’un tournoi ou d’un mariage. Il avait eu tout le loisir de s’exercer aux côtés de la reine. A eux deux, ils étaient parvenus à s’assurer la loyauté de presque toutes les familles nobles du continent. Peu importait le côté immoral de la chose.
A la guerre comme à la guerre ! pensa-t-il en esquissant un sourire mauvais.
La sueur collait les mèches brunes de ses cheveux sur ses tempes. Il tira le rideau qui lui cachait la vue. Devant l’horizon désespérément plat, il pesta : maudite plaine !
Il aperçut son frère qui chevauchait en compagnie de ses officiers. Il examina sa stature colossale, sa chevelure châtain dorée par le soleil et sa peau tannée. Sa barbe mal rasée en permanence lui donnait un air de mercenaire. Son regard gris était aux yeux de Tiago la seule chose à peu près noble chez son frère. Et pour cause, c’était celui de leur défunt père. Tiago se remémora l’expression douce du Roi Magnus. Il frémit, se rappelant à quel point il haïssait ce regard mou et triste posé sur lui.
Luther ne semblait pas souffrir de la chaleur malgré son imposante armure. Impassible, il fixait l’horizon, échangeant parfois des paroles brèves avec ses hommes. Tiago plissa les yeux. Sa présence au sein de l’expédition n’avait qu’un seul but : se familiariser avec les chevaliers de l’ordre Royal et gagner leur confiance, afin d’éviter qu’ils ne suivent Luther à Loth. Sa Majesté avait besoin de recourir à toutes les forces armées du continent afin de mener à terme la guerre de purification des territoires du Sud. Tiago soupira ; il ne pouvait pas dire qu’il avait mené sa mission avec succès. Les officiers de Luther étaient loyaux. Ses tentatives pour percer leurs rangs avaient lamentablement échouées. Les rares hommes qu’il avait pu atteindre n’avaient ni position, ni influence. La perspective de décevoir sa mère lui conféra une légère contrariété. L’expédition était loin d’être terminée. Une occasion se présenterait peut-être.
Soudain, les mouvements saccadés des porteurs s’interrompirent. Tiago s’en étonna : le soleil était encore haut dans le ciel, et ils avaient fait une halte quelques heures plus tôt pour se restaurer. Les pans de tissu s’écartèrent et un soldat s’adressa à lui d’un ton bourru.
— Votre Excellence ! Le commandant vous fait savoir qu’une oasis se trouve à quelques kilomètres de notre position. Il souhaite remplir les réserves d’eau et faire boire les chevaux. Il demande votre permission.
Tiago haussa un sourcil.
— Cette oasis Yvan, est-elle ombragée ?
L’homme marqua un temps d’arrêt.
— Certainement, votre grâce.
Tiago sourit.
— Alors dites à mon frère que j’accepte sa requête. Que les porteurs m’y amènent le plus rapidement possible.
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Le Mas de Gaïa
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Mary Lev
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