Fyctia
Chapitre 7 (1/2)
Est-ce que j’aime lire, désormais ?
Bien sûr que non.
Lorsque des effluves marines m’ont fait bondir du lit aujourd’hui, il n’y eut que du calme pour accueillir mes angoisses provoquées par ce réveil iodé. C’est là je crois, après avoir vérifié qu’aucune sirène susceptible d’à nouveau m’entraîner dans le fond de l’océan n’était dans ma chambre, que le contre-coup des deux jours qui ont précédé m’a frappé.
C’était presqu’aussi fort et violent que ce soporifique bouquin que la bibliothèque de cuivre a eu la bonne idée de me jeter à la figure la veille. Ma joue me fait toujours souffrir, d’ailleurs.
J’ai pour habitude d’être tirée du sommeil grâce au doux son des vociférations de ma mère, hurlant à mon petit-frère de se dépêcher de quitter la salle-de-bains. Ce petit rituel qui est d’attendre que mon père tambourine à ma porte pour me dire de sortir du lit me manque déjà.
Car aujourd’hui, je n’avais personne pour me réveiller.
Avant de les perdre, je n’avais jamais réalisé à quel point ces détails d’une matinée, que je trouvais trop chargée par moments, étaient importants à mes yeux.
À l’instant où la porte de la salle de bains commune avait claqué contre le mur, Naïa débarquant dans notre espace de vie commun et charriant avec elle une odeur qu’en temps normal j’aurai sans doute trouvée rafraîchissante, mes souvenirs s’étaient étiolés sans que je ne puisse les rattraper. J’eu alors la certitude que c’était d’elle que provenait ce mélange d’ambre et de sel marin m’ayant donné l’impression d’à nouveau me noyer.
Comble de l’horreur ? Moi aussi maintenant, je sens le sapin magique senteur algue marine.
Est-ce que j’ai l’impression que Naïa fait tout ce qu’elle peut pour me garder hors des cours ?
Tout à fait, puisque depuis le matin, je suis « enfermée » pour mon bien en sa compagnie, puisqu’elle affirme que je dois me préparer à l’épreuve de ce soir. Pour l’occasion, elle m’a même sélectionné trois ouvrages qu’il me faudrait une vie entière pour lire.
Actuellement, mes yeux lorgnent le numéro de la page dix du premier, intitulé : « Encyclopédie des créatures sonores » alias : « Encyclopédie des créatures les plus bruyantes du Monde. »
Il va sans dire qu’il s’agit là du Monde de l’Invisible car je n’ai pas trouvé les perruches ondulées dans le sommaire, que j’ai littéralement mis la matinée à déchiffrer.
Un premier coup contre la porte fait (enfin) se détourner le regard réprobateur de Naïa de la piètre lectrice que je suis, tandis qu’une salve de plus petits coups la fond bondir de sa chaise pour aller ouvrir.
— Ce n’est pas trop tôt, maugrée Alina qui se faufile dans notre chambre dès que l’espace entre le chambranle et le battant le lui permet.
Ses prunelles éternellement tristes effectuent une rapide inspection des lieux, s’attardent sur le monticule de peluches que Naïa a eu le temps de déplacer de son côté sans que je ne m'en rende compte, puis se posent sur moi :
— Prête ? me lance-t-elle, d’un sérieux à couper le souffle.
— Euh...
— Tu parles. On est parties pour trois jours de silence, toutes les trois. Toi tu n’as aucune chance, moi je suis beaucoup trop stressée pour me concentrer, et Lucie n’en a clairement rien à faire.
Je lève les yeux vers Naïa et referme le livre sans ménagement alors qu’Alina vient de faire un pas vers elle. Je vais jusqu’à pousser avec virulence l’ouvrage jusqu’à l’extrémité du bureau. Alors que mon regard est pourtant vissé sur ma cible, Naïa, je l’imagine sans mal tanguer, au bord du précipice, pour enfin entendre son fracas final contre le sol.
Je m’en fiche royalement, de tous ces tas de poussières remplis d’encres et de dessins tous plus horribles les uns que les autres.
— Ce n’est pas que je n’en ai rien à faire. Essaye un peu d’être catapultée dans un monde où les gens font irruption dans leur bureau par la fenêtre, ressemblent à des vampires, ou sont susceptibles de t’arracher la tête si tu réponds mal à une question. Le tout, alors que le truc le plus bizarre que tu aies vu jusque-là, c’est ta tante tourner autour d’un feu en baragouinant un charabia sorti de je ne sais pas quel livre obscur. Après ça, si tu veux, on en reparlera.
Naïa jette une œillade à Alina avant de ramasser le gros tas de feuilles que j’ai envoyé valser par terre.
— Je... je ne suis pas un vampire.
Je rejette la tête en arrière et me cale dans le fond de ma chaise qui, je dois l’admettre, est bien plus confortable que celles de mon bahut.
— Désolée, je ne sais pas ce que sont les Moroï, Alina.
— Que sais-tu des vampires ?
— C’est immortel et ça brille au soleil ? Du coup j’étais un peu étonnée quand j’ai vu que ce n’était pas le cas pour toi.
— Les vampires ne brillent pas au soleil.
— Ils existent ? m’estomaqué-je.
— Bien sûr.
Je cligne des yeux et déglutis.
— Ici, chuchoté-je presque.
La bouche d’Alina se déforme en un demi-sourire.
— Non, c’est impossible. Quant à savoir ce qui nous différencie : seuls les Moroï sont mortels. Contrairement aux vampires, nous n’avons pas besoin de sang pour survivre.
— Ça change quoi de moi, ça ? Moi aussi je suis mortelle.
— Nous avons des capacités que les humains n’ont pas…
— Comme ?
Elle se retourne vers Naïa, qui lève les mains devant elle en guise de protection.
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Livia Tournois
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