Fyctia
Chapitre 4 (1/2)
Ai-je menti en affirmant que je ne voyais rien d’inhabituel ?
Peut-être.
Bon d’accord : bien sûr que j’ai menti. Mais d’un autre côté, je me voyais mal dire qu’il y a une boule lumineuse insaisissable (car oui, j’ai essayé de l’attraper), qui virevolte autour de moi par intermittence.
Le tout sans que je ne puisse avoir mon mot à dire, sinon ce ne serait pas marrant. Elle vient, mon frère manque de s’étouffer avec le dernier petit gâteau, puis elle repart. Elle vient, la pimbêche du lycée qui m’a fait un croche-pied se mange les escaliers qui mènent au labo sur les dents, puis elle repart. Elle vient, tout prend feu, puis elle repart.
Enfin, vous avez compris j’espère.
Ah par contre quand je me fais enlever par des sirènes, là, il n'y a plus personne !
D’ailleurs, est-ce que ça lit dans les pensées, un Péri ?
Contre toute attente, Naïa était postée au garde à vous derrière la porte de la direction avec une pile de vêtements dans les bras. Cette fille est un insupportable pot de colle qui respire la joie de vivre.
— Change-toi et on y va, j’adore le cours de l’après-midi ! Tu vas voir que ce ne sera pas du luxe pour toi d’en apprendre plus sur les créatures magiques que tu vas côtoyer.
— Ashkan t’a demandé de m’aider ? questionné-je de but en blanc.
— Quoi ? Mais non, pas du tout. Tu sais, j’ai cru que je n’allais jamais avoir de colocataire, ça fait quand même trois ans que je suis toute seule.
Ah oui, quand même.
— Comment tu le trouves ? Il est à tomber par terre, non ?
— Euh, le directeur ?
— Qui d’autre ?
Elle se retourne et ses paupières papillonnent tandis qu’elle s’engage dans l’escalier sans même regarder ou elle pose le pied.
Il est presque aussi flippant qu’il n’est beau, oui.
Nous dévalons les marches un peu trop vite à mon goût. Je tente de la suivre et mon cœur s’emballe quand je réalise que l’arrivée peut-être très compliquée. Une fois en bas, je la percute lorsqu’elle s’arrête brusquement. Son corps ne bouge pas d’un iota, comme un mur. Mais un mur tendre, pas de la pierre sur laquelle j’aurai très bien pu me briser quelques côtes ou le crâne.
— Les humains sont décidément bien fragiles, je viens de t’éviter d’aller rencontrer le mur d’en face.
Force surhumaine, personnalité solitaire... Cette fille est forcément un loup-garou.
— Dis je me demandais, il y a des loups-garous dans le coin ?
— Bien sûr, mais ils sont un peu sectaires sur les bords. Au fait, le Directeur m’a demandé de te donner des livres qui pourraient t’être utiles. Tu sais des choses que l’on voit dans les années inférieures.
— Oui donc… Il t’a bien demandé de m’aider.
Elle se mord encore la lèvre inférieure et ralentit sa course vers ce que je devine être des toilettes pour que je puisse me changer et penche la tête sur le côté.
— Écoute, les Péris sont des créatures qui débordent de sagesse. Quant à moi, je suis littéralement la plus ancienne élève du Purgatoire. Par conséquent, je suis la plus à même de te garder en vie cette année. Alors garde tes pavillons grands ouverts à chaque fois que je dis quelque chose, parce ça pourrait être une information qui te permettra de survivre. On n’appelle pas cet endroit le Purgatoire pour rien.
Toute trace de candeur a quitté son visage. Ma colocataire est bipolaire. Choquée, j’acquiesce.
— Du coup, quand je te dis que les loups sont des créatures sectaires assez agressives, tu dois comprendre que les coller aux basques n’est pas une bonne idée. Tu reconnaîtras assez vite leur alpha de toute façon puisqu’il sent le chien à trois kilomètres. Aussi, quand je t’inviterai à mes soirées jeux de société lors d’une pleine lune, ton instinct de survie devra prendre le relais et te faire accepter que te faire des amis soit mieux que de te faire dévorer.
— Comment ils font, dans le monde des humains ?
Enfin… s’ils y vivent.
— Parmi ceux qui sont ici, il y a ceux qui ne se sont pas enchaînés correctement. Il y a aussi ceux ont voulu jouer aux plus malins et se sont offert une virée nocturne, au prix de la vie d’un humain.
Sympa.
— Pourquoi est-ce que tu es l’élève la plus ancienne ?
Un sourire s’esquisse sur son visage alors qu’elle s’arrête devant une porte d’où sort une élève qui nous juge de haut en bas avant de détaler.
— Une sirène.
— Ah oui, elle était très jolie...
Naïa ferme les yeux et inspire.
— Je suis ici depuis toute petite parce que je suis un projet raté de ma communauté, les sirènes.
— Un projet raté, c’est-à-dire ?
— Je suis une hybride, vous les humains, vous parlez de métissage je crois.
Je cligne des yeux et peine à réprimer mon hilarité naissante. Elle se rembrunit.
— Ça t’amuse ?
— Ben, c’est que moi aussi je suis métisse. Pourtant, on ne m’a jamais vu comme un projet raté.
— Mais tu es humaine. Moi je suis le résultat de deux créatures dont les chemins n’auraient jamais dû se croiser.
— Tu n’as donc plus tes parents ?
Elle secoue la tête.
— Je suis désolée, Naïa.
La jeune fille hausse les épaules.
— Ne t’inquiète pas va, j’ai une grande famille ici.
Elle me fait un clin d’œil et son visage s’illumine lorsque la porte des toilettes s’ouvre de nouveau. L’adolescente qui en sort est pâle comme la lune, les yeux noisette injectés de sang et semble vouloir faire demi-tour tout en reniflant dès qu'elle aperçoit Naïa.
Mais c’est trop tard, Naïa lui a déjà sauté dessus.
— Alinaaaaa, je suis tellement désolée pour toi.
C’est la Moroï dont Naïa m’a parlé.
Ladite Alina lève les bras et tapote du bout des doigrs le dos de ma colocataire la demi-sirène. Sans demander mon reste, je me glisse dans l’entrebâillement de la porte et laisse Alina à son triste sort.
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Gottesmann Pascal
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