Fyctia
Chapitre 3 (1/2)
Mes mollets endoloris protestent. C’était long et c’était dangereux.
Le pire dans tout ça ? Alors que toute mon attention était rivée sur l’étroitesse des marches et que je m’appliquais à ne pas en rater une seule, Naïa les gravissait deux par deux, comme si elle désirait se rendre le plus vite possible au sommet.
Après une interminable rangée d’escaliers en colimaçon, c’est un long couloir et une porte à double battant faite d’un bois noir parcourut de stries gris foncé.
Au vu de l’allure qu’avait la porte d’entrée, je me suis conditionnée à découvrir un endroit dont la décoration serait similaire à celle de l’infirmerie. Rideaux noirs, statues flippantes, plafond gris et moulures blanches jurant avec absolument tout le reste.
Or, les apparences sont souvent trompeuses.
L’endroit est lumineux, et même si l’absence de vitre me laisse perplexe, la verdure que je contemple depuis la seule grande baie, et qui s’étend à perte de vue avec, au loin, une colline entourée de terre brûlée me captive tout entière.
D’où je suis, c’est-à-dire de la plus haute tour de cet endroit dont je n’ai vu que deux pièces, il m’est dorénavant possible de noter que chacun des jardins a l’air aménagé de manière différente.
Pour tenter d’en observer plus, je pose les mains sur la rambarde de la majestueuse arche de cette somptueuse pièce remplie de lumière et une brise légère me caresse le visage.
Je souris, car je me sens vivante.
Quitte à attendre un vieux croulant qui va se jeter sur son fauteuil pour m’expliquer le règlement de ce qui m’a tout l’air d’être d’un centre de redressement pour créature magique, autant prendre du bon temps !
Je laisse l’air frais emplir mes poumons, sensation que je ne pensais plus jamais retrouver lorsque j’ai été emportée dans le fond de l’océan. Je me demande si je vais revoir cette furie rousse et, aussi, si j’aurai l’occasion de l’informer que c’est une incroyable garce.
L’instant est rompu, tout à coup assaillie par un torrent de doutes et d’images que j’aimerai à jamais oublier, je m’écarte de l’arche et me dirige vers la bibliothèque.
La pulpe de mes doigts frôle les couvertures des ouvrages qui la composent. Je lis les titres à la volée et découvre qu’il y en a pour tous les goûts : Sirène, Gorgone, Phénix, Simurgh… Plus j’avance dans les noms, et plus je m'y perds.
Combien de temps faudra-t-il avant qu’ils ne réalisent que je suis juste une adolescente mal dans sa peau, qui ne parvient pas à entretenir une seule relation amicale ? Ils me renverront enfin chez moi, et je pourrais reprendre le cours de ma vie.
Ou pas. Parce que je n’oublie pas que je suis quand même accusée d’avoir mis le feu à mon Lycée. Au vu de mon âge, on pourrait même me juger comme une adulte et ce serait un aller simple pour la prison.
Mon attention glisse sur l’immense bureau, situé dans le fond de la pièce. Le choix du positionnement est douteux. Ça en jetterait beaucoup plus s’il se trouvait juste derrière la fenêtre !
J’ambitionne de devenir décoratrice d’intérieur. Si ce directeur est sympa, je lui en ferai la proposition . Naïa m’a souhaité bon courage en me laissant derrière la porte… Mais elle avait l’air tout excitée. Je crois que c’est un de ses traits de caractère. J’avais l’impression qu’elle voulait que je lui demande de m’accompagner, et a eu l’air déçue quand je lui ai dit qu’elle pouvait y aller, que je me débrouillerai toute seule. À mesure que je m’approche du bureau, une réalité me frappe alors que la surface m’arrive à hauteur de poitrine.
Qui que soit le propriétaire de ce mobilier : il est grand. Très grand.
C’est peut-être un gentil géant, qui sait ?
Je m’apprête à revenir devant l’arche sans vitre (il doit faire froid, en hiver), quand un éclair passe à travers et qu’une chose non identifiée fait irruption par cette dernière. Des feuilles prennent leur envol tandis que je vois ma courte vie défiler devant mes yeux.
La masse, posée en boule sur le sol, reste immobile un moment et ce que je prends dans un premier temps pour un bout de papier virevolte devant moi. Je suis son mouvement jusqu’à ce que ça se pose au sol, léger comme une… Plume. Peut-être justement parce que c’en est une.
Sa couleur verte est chatoyante et arbore de reflets bleus. Je relève les yeux et découvre l’objet non identifié devant moi est non seulement plumé, mais aussi de la même couleur que ce qui se trouve à mes pieds.
Le directeur est une perruche ?
Je secoue la tête, histoire de connecter les derniers neurones fonctionnels qu’il me reste. Le directeur ne peut pas être une perruche, réveille-toi, Lucie.
Lorsque ce qui m’a tout l’air d’être un oiseau géant entame son redressement, je recule, prête à courir vers la porte d’entrée.
Des ailes, une tête d’humain, une taille incroyable, un profil taillé à la perfection, des boucles d’ébènes qui tombent en cascade à peine plus bas que les épaules.
— Je ne savais pas que les anges avaient des ailes vertes, lâché-je.
Mais qu’est-ce qui m’a pris de dire ça ?
Sa bouche, toujours vue de profil, s’ourle vers le haut et ses yeux se plissent. Il me fait face et semble se retenir d’éclater de rire.
— Très flatteur, mais les péris ne sont pas des anges, Lucie Aziz.
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