Fyctia
Le départ pour Khizaan
L’aube naissante, Anna et Kahina rejoignirent la cour des invités et eurent à s’étonner de voir que les trois guerriers Awsir semblaient les attendre depuis un certain temps déjà, la longe de leurs chevaux dans leurs mains, prêts à prendre le départ. Malgré l’appréhension presque palpable qui marquait les traits d’Anna, celle-ci n’avait pas manqué de se préparer. Elle avait fait le choix d’une superbe tunique noire brodée d’arabesques argentées et un long fouloir semi-transparent lui était assorti, enroulé délicatement autour de ses épaules et de la moitié de sa chevelure brune cendrée. Kahina se pencha légèrement pour vérifier que sa sœur avait au moins pris la peine d’opter pour un vêtement lui assurant la liberté de ses mouvements. Absolument tout, dans cette tenue, était voué à faire ressortir son teint et ses yeux, dont le maquillage donnait à ces derniers la beauté de ceux d’une gazelle pourvue d’iris de couleur bleue. On leur amena leurs montures dont elles saisirent également la longe.
Ifrin était la cité la plus densément peuplée de la Terre d’Adhamra. Les voyageurs venant quelques fois de contrées encore inexplorées arrivaient de partout, attirés par une force qu’aucun d’entre eux n'était jusqu’alors parvenu à expliquer. Celle que l’on surnommait la ville aux mille civilisations avait traversé les âges, aux pieds de Celle qui était quant à elle, et selon la légende, appelée à perdurer : La Citadelle du savoir.
Sa population, principalement composée de commerçants, d’artisans et d’intellectuels, vivait majoritairement des exportations de différentes matières premières provenant de la ville de Khizaan et de ces carrières. Sur leur passage, les locaux et les connaisseurs prenaient naturellement la peine de s’écarter, conscients de la réputation de ceux à qui ils faisaient ainsi honneur. Tous, sans exception, respectaient cette renommée qui n’était plus à faire, mais dont personne ne se souvenait vraiment de l’origine.
Ils parvinrent aux abords de la ville, là où dorénavant la fréquence des habitations se ferait de plus en plus rare. Déjà se dessinait plus nettement le début du désert : brûlant et dangereux. Une fois franchies les ruines du mur de ce qui avait jadis été d'imposantes fortifications, il leur fut annoncé qu’il était alors temps de monter en selle. Et force fut de constater qu’elles étaient, aussi bien l’une que l’autre, de pitoyables cavalières. Kahina avait dû s’y reprendre à deux reprises, et Anna avait fini par diriger sa rage contre les ruines.
« Mais pourquoi ne restaure-t-on pas ce fichu mur ! » Finit-elle par s’emporter.
« Allons, ce n’est pas ça qui t'empêche de montrer sur ton cheval, Anna » Répliqua sa sœur, à deux doigts de céder à une certaine hilarité, avant de se reprendre et d’ajouter :
« Et puis, pourquoi ? Voilà des siècles que nous sommes en paix ! D’ailleurs, à part le Conseil, personne ne sait plus pourquoi ces murs furent autrefois construits.
— Et bien parce que c’est vraiment très laid ! » Continua de maugréer Anna, éreintant son cheval à force de tentatives plus mal avenues les unes que les autres. Il était à noter que l’animal faisait montre d’une patience exemplaire à son égard.
Kahina entreprit d’apaiser sa sœur afin de s’éviter à elle-même d’éclater de rire, se forçant ainsi à éprouver de l’empathie pour son aînée. Et tandis qu’elle conseillait Anna, son regard se posa sur la Citadelle, magnifique bâtiment dont la blancheur laiteuse contrastait avec la couleur carmin des autres constructions les plus nobles de la ville. La pierre utilisée pour la construire n’existait plus, ou du moins, il n’était pas encore fait état à ce jour, d’une quelconque carrière exploitable.
« Il faut que ton mouvement soit assuré et rapide, Anna ! » Reprit-elle, détournant son attention de la Citadelle.
Les Awsir assistaient au spectacle, impassibles. Le plus âgé d’entre eux fit remarquer à Zahrédine, non sans humour, que la décision de partir à l’aube relevait peut-être d’une erreur d’appréciation. Leurs chevaux se mirent à s’impatienter, jouant de leurs sabots sur le sol sablonneux. Ce fut au bout de plusieurs tentatives infructueuses qu’Anna parvint finalement à monter sur son cheval.
Zahrédine prit alors la parole, le timbre de sa voix se faisant aussi agacé que menaçant :
« Tâche de ne pas nous rendre cette première partie de voyage pénible. Si tel était le cas, je t'abandonne à Khizaan, et tu n’auras plus qu’à trouver une caravane pour revenir ici, auprès de ton promis. »
À ces mots et d’un geste assuré, il dirigea son magnifique étalon noir en direction du désert tandis que ses hommes firent emboîter le pas de leurs montures à ceux de la sienne. Alors qu’ils passaient devant les deux sœurs, ces derniers firent tour à tour peser leur regard sur elles. Kahina et Anna se regardèrent, avant de chacune baisser les yeux, les suivant en silence.
Cette première partie de voyage s’annonçait morose. Kahina, intimidée par l’aisance des cavaliers qui les devançaient, ne prononça pas un mot et se contenta de les envier secrètement du coin de l'œil. Anna l’imita dans son mutisme, paraissant quant à elle sombrer dans un ennui de plus en plus profond à mesure que les structures construites de la main de l’homme se faisaient rares. Les dunes s’étendraient bientôt à perte de vue, et Kahina se plairait à contempler ce que lui offrirait cette étendue désertique sauvage, d’une splendeur qu’elle trouverait sans pareil avec ce qui lui avait déjà été donné de voir.
59 commentaires
Camille Jobert
-
Il y a 3 ans
Merixel
-
Il y a 3 ans
La Plume d'Ellen
-
Il y a 3 ans
Suelnna
-
Il y a 3 ans
Mélodie.O
-
Il y a 3 ans
Elona Mitis
-
Il y a 3 ans
Atheen Crédule
-
Il y a 3 ans
Gottesmann Pascal
-
Il y a 3 ans
Suelnna
-
Il y a 3 ans
Laeti Bay
-
Il y a 3 ans