Hiurda La Bête de la Terre des Rois Défi - Partie 2

Défi - Partie 2

Ses jambes endolories protestèrent à chaque marche et ses chaussons de soie mouillés glissaient sur le bois huilé. Sa cape traînant par terre et s’emmêlant dans ses pieds n’aidait pas, mais la retirer maintenant mettrait à nu son blason non fini. Elle n’était pas prête à dégringoler tout en bas de l’échelle sociale aussi vite. Et le plus tard serait le mieux. Elle était soulagée de voir que les vêtements chauds des femmes présentes couvraient leurs propres blasons. Si elle s’y prenait correctement, personne ne verrait le sien avant qu’elle n’ait un minimum d’autorité. 

Toumet et ses suivantes commencèrent à s’activer autour d’elle dans la grande pièce, allant du lit caché derrière une cloison de bois vers différents coffres sous les fenêtres. Parfois, l’une ou l’autre déposait des bijoux ou des accessoires sur la table, discutant joyeusement d’un tissu ou d’une paire de chaussures. À bien y regarder, entre la différence d’âge et les traits en commun, ce devait être les filles de Toumet. Ses petites sœurs peut-être, mais le lien de famille était clair. L’épouse du chef de la grande armée barbare n’avait donc pas de servantes, qu’elle devait parler vêtements avec ses propres filles ? 

Et à qui appartenait tout ça ? Ce ne pouvait être la chambre de Toumet, il n’y avait même pas de porte. L’escalier donnait directement sur la salle principale du bâtiment et n’importe qui pouvait y entrer à tout moment. Mais alors qui portait toutes ses affaires ? Elle ne voyait pas quelle femme saine d’esprit accepterait de vivre ici à la merci de tous. Sûrement n’avait-elle pas son mot à dire sur la situation. Peut-être était-elle là précisément pour être à la merci des hommes qui se réunissaient l’étage d’en dessous. Au vu des tissus et bijoux que Toumet et ses filles manipulaient, elle n’était pourtant pas pauvre. Ishta n’y comprenait rien. 

Alors qu’elles s’occupaient encore des vêtements, l’une des filles se plaça à côté d’Ishta et entreprit de rassembler ses longs cheveux frisés en une grande tresse qu’elle noua avec une lanière de cuir. Elle la fit passer par-dessus l’épaule de la jeune femme en lui souriant doucement, puis repartit farfouiller avec ses sœurs.



Au bout de quelques minutes, Toumet vint la chercher, un grand sourire aux lèvres, et la prit par la main pour l’emmener devant le lit. Là, bien étalée et disposée joliment, se trouvait une tenue Íbúan complète. Un jupon en laine épaisse blanche, une sous robe en lin d’un vert profond, une sorte de tabard rouge carmin brodé élégamment de fil argenté et maintenu en place par deux broches finement ouvragées en bronze et reliées entre elles par une multitude de fils chargés de petites perles colorées. La tenue était complétée par un manteau de fourrure noir bien chaud et plusieurs colliers et bracelets de bronze et d’argent.

Le style était bien loin de ce dont Ishta avait l’habitude, mais elle devait admettre qu’en plus d’être bien mieux adaptés, ils étaient superbes dans leur simplicité. Et ils lui paraissaient tellement pratiques. S’il y a bien une chose que l’on peut dire sur les vêtements féminins du Saam’Raji c’est qu’ils n’étaient pas prévus pour être commodes. Après tout, les femmes ne sont rien de plus que des décorations à embellir et exposer. 

Toumet ramassa la jupe et la lui tendit en souriant. Ishta ne savait trop que faire, cette femme avait-elle le droit de donner des habits comme ça ? Sans en discuter avec personne ? Quand bien même serait-elle celle qui les porte, son mari n’appréciera sûrement pas d’apprendre qu’elle les ait cédés sans autorisation.

Ce pouvait également être un stratagème de Toumet, ne parlant pas la langue, il serait facile de faire croire qu’elle s’était servie seule. La punition lui tomberait dessus plutôt que sur Toumet. La pousser à fauter était encore le meilleur moyen de se débarrasser d’une concubine trop encombrante. Mais refuser un cadeau de la première femme pouvait tout aussi bien signer son arrêt de mort. Un problème à la fois, dans l’instant elle se devait de gérer la menace immédiate.

Le geste de Toumet devint plus pressant et Ishta prit le jupon entre ses doigts. 

« Merci, Madame, pour votre générosité. »

« Te prege. »

Visiblement Toumet avec quelques notions en langues étrangères. Bien qu’un merci ne soit pas bien difficile à comprendre. Ishta attendait d’avoir un peu d’intimité pour enlever sa cape, mais aucune des femmes ne bougea. Elles se trouvèrent toutes figées, incertaines, se regardant les unes et les autres.

Ishta ne savait comment se sortir de ce mauvais pas. Elle ne pouvait pas refuser de porter les vêtements offerts par Toumet et elle ne pouvait rester habillée comme elle l’était plus longtemps. Mais pour enfiler le jupon, il lui fallait retirer sa tenue et donc dévoiler son blason. Elle ne pouvait s’y résoudre.


Tu as aimé ce chapitre ?

4

4 commentaires

Ordalie

-

Il y a un an

Je suis de retour et j'ai dévoré les nouveaux chapitres avec immense plaisir \o/ la pauvre Ishta est en train de se faire un scénario à 17 embranchements sur la manière de se comporter alors que tout le monde est juste en mode "bonjour bienvenue voici des fringues est-ce que ça va" la pauvre

Hiurda

-

Il y a un an

C'est tout à fait ça ! 😂 Tu m'as bien fait rire !
Vous êtes hors connexion. Certaines actions sont désactivées.

Cookies

Nous utilisons des cookies d’origine et des cookies tiers. Ces cookies sont destinés à vous offrir une navigation optimisée sur ce site web et de nous donner un aperçu de son utilisation, en vue de l’amélioration des services que nous offrons. En poursuivant votre navigation, nous considérons que vous acceptez l’usage des cookies.