Fyctia
Fiançailles - Partie 4
Il lui fallut plusieurs jours pour reprendre pleinement conscience. Les soins apportés par Nishka ne la soulageaient que très peu et n’avaient rien pu faire contre la fièvre qui l’avait rendue délirante. Allongée sur le ventre depuis près d’une semaine, la jeune fille regrettait de ne pouvoir sombrer à nouveau dans l’inconscience. Éveillée, elle ne pouvait échapper ni à la douleur, ni aux pensées qui l’assaillaient. Qu’est-ce qu’elle n’avait pas compris ? Qu’avait-elle manqué ? Elle devait forcément avoir raté une information... Quelle erreur avait-elle commise ? Quelque chose n’était pas logique mais la douleur l’empêchait de se concentrer assez pour trouver quoi. Chaque fois qu’elle questionnait la mère des futures femmes, celle-ci répondait plus ou moins la même chose, sur un ton dur mais avec un visage plein de tristesse.
« Ne vous préoccupez pas tant, Pétale du Sha. C’est une affaire d’homme et votre père est le plus compétent d’entre eux. Contentez-vous de guérir et de reprendre des forces. Vous en aurez besoin… »
Alors Ishta mettait ses pensées parasites de côté. Sûrement que son père lui expliquerait tout quand elle le verrait. Nishka lui avait promis qu’il viendrait s’assurer de son état. Elle ne doutait pas que tout prendrait alors sens.
Elle avalait laborieusement quelques cuillerées de bouillon de poule que lui donnait Nishka quand Ishvar, Rois des rois, entra dans la pièce sans même s’annoncer. Aussitôt la vieille femme déposa le bol de soupe et se prosterna au sol. Le roi ne fit même pas mine de la voir et se dirigea vers sa fille qui tentait péniblement de se redresser.
« Ne te lève pas, fille de moi. » dit-il de sa voix grave.
Il posa une main fraîche sur la partie intacte du dos d’Ishta pour la forcer à se recoucher. Prise de court, elle ne savait si elle devait lui donner les salutations ou bien se taire. Ses lacérations profondes la ramenèrent à l’ordre, s’il voulait l’entendre parler, il devra le demander. La leçon était apprise.
Elle entendit son père fouiller dans un coffre à côté du lit. Il en sortit un petit pot d’onguent qu’il ouvrit aussitôt. Une douce odeur de fleur se rependit dans la pièce et le roi se mit à appliquer délicatement la crème sur les blessures de sa fille. La douceur qu’il employa était aux antipodes de la violence avec laquelle il avait manié le fouet. Malgré tout, une sensation de brûlure la fit gémir chaque fois que l’onguent touchait la chair à vif. Elle retint ses larmes mais presque aussitôt la douleur diminua et bientôt elle ne sentit plus du tout la peau de son dos aux endroits où la crème avait été apposée. Le soulagement la fit sangloter. Elle pria de tout son cœur pour que son père ne prenne pas ses pleurs pour une transgression mais ne put rien faire pour les retenir. Pourquoi Nishka ne lui avait-elle pas appliqué cette crème plus tôt ? Comme s’il avait lu dans ses pensées, le Roi des rois prit la parole.
« La fleur utilisée pour cet onguent s’appelle Suun’dima. Ce n’est même pas une jolie fleur, elle est petite, toute ronde et d’une vilaine couleur vert-de-gris mais elle est très difficile à faire pousser et n’est administrée que par les Grands Saints du Saam’Raji. Cette pâte supprime la douleur, assainie les plaies et les aide à guérir plus vite. »
Sa voix était aussi douce que ses gestes.
« C’est un des produits les plus chers du monde civilisé, continua-t-il. »
Mais Ishta se fichait bien du prix du produit en l’instant, tant que son père continuait de le lui appliquer.
« Les dirigeants du monde entier tentent d’en percer les secrets, tu n’imagines pas le nombre d’espions que j’ai mis à morts pour sauvegarder ce savoir faire… »
Sa voix s’éteignit sur la fin et, presque en chuchotant il ajouta :
« Mais rien n’est trop cher pour mon plus beau Pétale du Sha... Si tu savais comme je souffre de te voir dans cet état… »
Son père l’aimait donc... Et, de toute évidence, il ne souhaitait pas sa douleur. Mais alors, pourquoi ? Cette pensée faillit jaillir de sa bouche, elle la retint de justesse. Elle s’était promis de ne plus recevoir un seul coup de fouet pour avoir parlé sans autorisation.
7 commentaires
moiettoi833
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Il y a un an
Anna Cesari
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Il y a un an
Hiurda
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Il y a un an
Mélanie Nadivanowar
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Il y a 2 ans
Hiurda
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Il y a 2 ans