Fyctia

Le cœur battant soudain la chamade, j’avançai une main tremblante et saisis mon téléphone. Numéro inconnu. J’ouvris le message.

• Salut, c’est Louis. J’espère que tu t’es bien remise de la soirée d’hier. Je ne trouvais pas juste d’être le seul à avoir ton numéro alors comme ça, tu as le mien. A bientôt ?
• PS : le remboursement du taxi, c’est pas la peine. Je t’invite.

Et voilà. Mes belles résolutions et mon courage tout neuf s’effondrèrent comme un château de cartes.

Tout calme envolé, j’étais prise dans un maelström d’émotions impossibles à contrôler. Mes mains tremblaient, j’avais le souffle court, mon cœur s’emballait.

Les larmes me montaient aux yeux sans que je puisse dire si c’était de l’impuissance, de la joie, de la tristesse ou de la rage. Et surtout, surtout, je n’avais aucune idée de ce que je devais faire.

Je fus tentée de retourner sous la douche. Mais avec de l’eau glacée cette fois.

De l’eau, bonne idée. J’en avalai un grand verre d’un trait, comme s’il se fut agi d’un alcool destiné à me donner du courage. Si le geste et l’intention étaient similaires, l’effet fut loin d’être semblable. J’avalai de travers.

Lisa entra pile au bon moment pour avoir droit à la magnifique image d’une Emily rouge tomate, toussant et crachant comme si j’avais bu la tasse au lieu d'un simple verre d'eau.

- Bah alors Emily, qu’est-ce qui t’arrive ?

- …

- Ok, humour débile mais… tu te noies dans un verre d’eau là en fait, non ? rigola-t-elle.

Je la foudroyais du regard. Puis, après une dernière quinte de toux pendant laquelle Lisa se tint gentiment à mes côtés, sans pouvoir rien faire de plus, je repris enfin mon souffle.

- Salut Lisa. Désolée, j’ai avalé de travers.

- Sans blague ? dit-elle avec un sourire moqueur.

Je devais faire une drôle de tête car elle redevint brusquement sérieuse et me demanda :

- Ça va Emily ? Tu n’as pas reçu une mauvaise nouvelle tout de même ? Tu fixes ton téléphone comme s’il te faisait peur.

- Hein ? Ah, non. Oui. Il me fait peur. Enfin, je crois. Je ne sais pas trop en fait. Regarde.

Je lui montrais le message de Louis. Elle le lut très attentivement puis me rendit le téléphone en souriant :

- Sérieux ? C’est ça qui te fait peur ? Mais il a l’air adorable ton Louis. Et il se sort très bien de l’épreuve du premier message. Tu l’as rencontré hier soir ?

J’acquiesçais.

- Donc il ne suit pas la règle stupide des trois jours. C’est un bon point pour lui. Il n’a même pas attendu 24 heures en fait. Tu as dû lui plaire. En tout cas il te montre clairement qu’il s’intéresse à toi. Et en plus il te donne le contrôle en te donnant son numéro. Il t’indique son envie de te revoir mais sans te l’imposer, en le formulant comme une question. Il a tout juste ce gars. Qu’est-ce qui ne va pas ?

- Je ne sais pas quoi faire, répondis-je d’une petite voix plaintive.

- C’est simple. S’il t’a plu, écris-lui. Sinon, tu effaces son message et on n’en parle plus. Il t’a plu oui ou non ?

- Oui.

Je murmurai cet aveu si bas que je pensais que Lisa n’entendrai pas. Elle dû deviner plus qu’elle n’entendit d’ailleurs. Mais elle réagit aussitôt :

- Ok. Et bien on va lui envoyer un message à ton Louis. Voyons voir. Qu’est-ce que tu penses de ça ?

Tout en parlant, elle avait pianoté furieusement sur le petit écran de mon smartphone. Elle me le tendait à présent enrichi d’une réponse :

• Salut Louis. Merci pour le taxi. Je t’offre un verre en échange. T’es dispo quand ?

- Non ! Non, articulais-je difficilement.

- Hein ? Pourquoi ?

- Ce n’est pas moi. Je n’écrirais jamais ça.

- Justement, tu n’oses jamais. Il faut que tu te lâches un peu.

Lisa me regardait avec un air de défi. J’hésitais. Mais un sursaut de fierté me secoua.

- Non. Je vais lui écrire. Moi. Merci pour ton aide.

Je la poussais doucement mais fermement vers la porte.

- Ok, ok. Je te laisse en tête à tête avec ton amoureux, railla-t-elle. Mais tu me tiendras au courant si ça marche ?

- Promis. Bonne soirée.

Je fermais la porte brusquement.