Fyctia
5. Marie elle danse
- MARIE -
"Elle danse Marie, elle danse
Elle adore quand ça balance
Et elle danse Marie, elle danse
Pour oublier qu'elle a pas eu d'chance..."
Mon bras cherche mon radio-réveil avant de s'abattre violemment dessus. Je dois être maudite... Pourquoi faut-il constamment que des chansons mentionnant mon prénom viennent me réveiller ou hanter mes nuits? Pas plus tard que la nuit dernière, j'ai eu la sensation qu'on me chantonnait "Petite Marie" de Francis Cabrel. Encore faudrait-il que la personne chante juste !
D'ailleurs ça me fait penser à mon nouveau voisin... Certes, nous avons des goûts musicaux similaires mais alors par contre... Daz serait capable de faire déclencher une tempête tropical sur Camden tant sa voix sonnait faux ! Ce type chante réellement comme ses pieds... Enfin je n'ai jamais vu ses pieds, mais c'est moche des pieds de toute façon, non ?
Je m'assieds machinalement sur le bord de mon lit. Je me demande comment j'arrive encore à me lever tous les matins pour faire face à tous mes problèmes. La poissonnerie, c'était le rêve de mes parents. Jusqu'au jour où ils ont décidés qu'ils en avaient marre et se sont barrés au Pérou...
Maintenant, ils sont fermiers. Ils élèvent des lamas pour leur lait et fabriquent ainsi du fromage dont l'odeur nauséabonde me détruit les naseaux dès que j'ouvre mon frigo. Pourtant, je n'ose leur dire que le fruit de leur travail empeste, tout comme je garde pour moi les dettes qui s'accumulent au fil des mois pour leur ancienne poissonnerie.
Ce matin, je dois m'y rendre et comme à chaque fois, je traine des pieds. Heureusement pour moi, le capitaine Zack à la gentillesse de m'emmener la marchandise directement de son chalutier. Il travaillait déjà avec nous du temps de mes parents. Ce vieux loup de mer m'aide beaucoup et sa gentillesse me donne envie de me battre alors trêve de rêvasserie, Marie, bouge-toi les tresses !
Je me lève pour me diriger vers ma petite salle de bain et ...
- Arrrrgh !
BOUM
Je trébuche et me vautre comme une merde sur mon tapis à poils longs. Je. Suis. Maudite ! Je relève la tête et vois la coupable de mon étalage.
- Chocolatine ! Tu veux ma mort ?! Mais qui va te nourrir en sardine si je meurs, hein, tu peux me le dire ?!
Je la houspille pour le principe mais la prend immédiatement dans mes bras. Ma petite Chocolatine... Je l'ai trouvé bébé en train de faire les poubelles derrière le magasin. Elle égaye ma vie au quotidien et est bien ma seule compagnie. Ma mine affreuse et mes dettes ont eu raison de tous les beaux pêcheurs de la ville. Daz est attirant lui à y réfléchir... Quand j'y pense, je me dis même que sa beauté semble carrément irréelle.
Je chasse d'un revers de main ses idées saugrenues qui viennent encombrer mon esprit. Je n'ai pas besoin d'un mec maladroit dans ma vie et Dieu sait qu'il en tient une couche ! Je vais pouvoir récupérer mon fourgon dans la journée mais ce n'est pas lui qui l'aura réparé, ah ça non ! Enfin, il a malgré tout voulu bien faire, ce n'est pas de sa faute si j'ai la poisse.
Après une douche, rapide pour ne pas utiliser trop d'eau, je me prépare et nourris Chocolatine avant de partir vers ma poissonnerie à pieds. Sur le chemin, qui me mène jusqu'à la boutique, je me demande ce que je vais bien pouvoir faire pour redresser la barre. Chaque jours, je bataille contre vent et marées mais le résultat n'est pas là.
Je tourne au coin d'une rue et repère déjà ma devanture avec les grandes lettres en fer forgé qui y trônent: "Au Bain Marie"... Encore un coup du sort je crois. Le jeu de mot était acceptable jusqu'à ce que mes parents décide de me nommer ainsi. Mais que leur est-il passé par la tête ?!
Etant petite, le sourire des gens m'amusait mais en grandissant... C'était le calvaire chaque jour, entre les moqueries et les remarques. A l'école, c'était les brimades de mes camarades et adolescente n'en parlons même pas ! Aujourd'hui, ce sont les problèmes d'adulte qui me collent à la peau, sans parler de l'odeur de poisson sur les mains.
En m'approchant de ma boutique, je me rends compte que le vieux Moraïce est déjà en train de faire le pied de grue. Mon voisin du dessous est un monsieur à la retraite et habitué qui ne peut s'empêcher de venir dès l'ouverture. Ce qu’il peut être agaçant !
- Ah, vous voilà jeune Marie, ce n'est pas trop tôt !
- Je suis même en avance mon cher monsieur, la cloche de l'Eglise n'a pas sonné les huit heures.
Heureusement que je ne suis pas en retard, je me ferais presque gronder dans mon propre magasin ! Sans oublier que je l'ai vu hier nous observer avec ses grosses loupes en guise de lunettes. Il sait donc pertinemment que mon véhicule est en panne. Ce vieux schnock aurait pu m'emmener...
Comme chaque jour, il va devoir attendre que je prépare mes étales, il va m'observer et me demander quel poisson serait le mieux pour avoir du fer ou du magnésium, lequel serait le plus goûteux pour déguster avec des petites pommes de terre vapeur, bla, bla, bla...
Au bout de trois quart d'heure, le vieux fini par me prendre un lieu noir, après que je lui ai proposé du cabillaud, cela va de soi ! Je pensais en être débarrassée lorsque, manque de chance, je vois Daz qui pousse la porte de ma poissonnerie.
- Bonjour Daz, comment tu vas ?
- Bien Marie, je te remercie et toi ?
- Comme un mardi... Tiens, tant que tu es là, je te présente Moraïce, l'un de nos voisins.
Daz lui tend une main que ce vieux fripé ne daigne même pas serrer. D'un petit haussement d'épaule accompagné d'un pointage de menton vers l'avant et d'un petit cri de souris, notre retraité aigri s'en va, comme ça. Vieux con va ! Je sais que je ne devrais pas réagir comme ça car il est l'un des seuls à venir encore ici, mais je ne le supporte pas, c'est plus fort que moi.
- Il doit être mal luné, ne te formalises pas Daz.
- Eh bien, heureusement que toi tu n'es pas comme ça !
- Oh tu es un ange de dire ça...
L'attitude de Daz change soudainement, il paraît gêné, il rougit et ressemble à un enfant qui a fait une grosse bêtise. Etrange... Il ne me semble pas avoir dit quelque chose de mal pourtant.
- Tu venais pour quelque chose en particulier ?
- Oui, je voudrais quelques sardines s'il te plaît...
- Bien, je te prépare ça.
Pendant que je m'affaire, heureuse de pouvoir le servir, je continue la discussion car mes parents m'ont toujours dit: "Ma fille, c'est ça aussi le commerce ! "
- Alors Daz, que penses-tu de notre jolie ville?
- Eh bien, je crois que je vais m'y plaire et aussi profiter du port pour aller me balader.
- Bonne idée ! C'est agréable de s'y promener.
- Tu viendrais avec moi ? Je veux dire, pour me servir de guide ?
- Volontiers ! Que dis-tu d'en discuter autour d'un café une fois que j'aurais fermé la boutique ?
- J'accepte avec grand plaisir Marie.
- Eh bien le rendez-vous est pris alors, chez moi vers 18h.
Daz récupère sa pochette et sort de ma boutique avec un grand sourire. Il est vraiment bel homme...
Oh merde !
Je ne lui ai pas demandé de payer !
21 commentaires
Mirabella
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Il y a 7 ans
Fanny, Marie Gufflet
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Laureline Maumelat
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maioral
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zélia louise
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BbyBarbie
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Marjy Noname
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Caro Handon
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Il y a 7 ans