Fyctia
Chapitre 2 - Théodore
Amy se fait désirer. Et j’aime ça. Elle me fuit, et, pourtant, son attention est totalement tournée vers moi. Au moindre de mes mouvements, elle réagit, interagit, réajuste sa position. Sûrement de façon inconsciente. Je sais le feu que peut provoquer un seul de mes regards chez elle. Je le sens. Quoiqu’elle tente de me faire croire, je ne la laisse pas indifférente.
Nerveuse, Amy joue avec sa bague. Étrange qu’elle n’ait pas pensé à la retirer. En même temps je dis ça, mais la mienne est dans la poche de ma veste. Si j’ai pensé à l’enlever, je n’arrive pas à m’en éloigner.
Je sors le grand jeu et lui offre une coupe de champagne.
— Je pensais que nous prendrions un café. Pas que vous tenteriez de m’enivrer ?
— Avec une seule coupe ? je me moque.
— Vous apprendrez vite que je suis du genre à ne pas supporter l’alcool.
Elle joue avec le feu. Me laisse croire que quelque chose m’attend à la sortie de l’avion avant de se tendre et de se détourner à nouveau.
Les consignes de vol sont annoncées, je lui murmure une blague dans l’oreille lorsque l’hôtesse fait sa présentation et je ne suis pas peux fier de lui voler un rire. Un rire que j’aime. Clair et sincère.
Je ne sais pas si c’est de me savoir en vacances, loin de toute pression familiale et professionnelle, mais je me surprends à la détailler de nouveau. Ses cheveux légèrement auburn mettent sa peau diaphane en valeur. Son accent anglais est à tomber. Sa combinaison noire m’offre un décolleté délicat et ses formes finissent d’assécher ma bouche. Je respire profondément. Je l’ai rapidement remarquée dans la file d’attente. Je crois que je n’étais pas le seul. Déjà parce que c’était la seule petite maline à ne pas avoir mis de manteau malgré le froid. Et parce qu’il n’y avait pas plus belle qu’elle.
Lorsque j’ai croisé son regard vert, j’ai bien senti cette alchimie toute singulière. De ce lien nous unissant. Elle a beau feindre qu’il ne se passe rien, je sais combien c’est faux.
— Premier voyage en Sardaigne ? je demande pour tenter de la détendre.
— Ça se voit tant que ça ?
— Les guides de voyages vous ont dénoncés.
J’avoue que je suis plutôt du genre à rester au bord de la piscine.
— En réalité c’est pour faire croire au collègue de bureau que j’ai visité. Quelques noms bien placés sur deux ou trois photos récupérées sur Insta et le tour est joué.
Je ris en m’enfonçant dans mon siège. Faut reconnaître que c’est malin et ça évite toutes les justifications à la question de Sylvie, ma collègue, avec sa voix de crécelle : bah pourquoi t’es allé là-bas pour rester au bord de la piscine ?
— Je vous piquerai l’idée.
Je surprends son regard glisser dans ma direction tandis que j’allonge mes jambes.
Nous retrouver côté à côté n’est pas anodin. Ni dû au hasard. Je ne suis pas le genre de gars à croire au destin.
Les deux heures de vol passent bien trop vite. Perdu dans les iris émeraudes d’Amy j’en ai presque oublié de faire mon numéro de charme.
— Vous êtes à quel hôtel ? j’ose demander lorsque l’avion atterrit sur le tarmac.
Son sourire se pince. Elle n’est pas dupe.
— Écoutez, Théodore, je ne veux pas paraître impolie, mais je crois que nous ferions mieux de nous arrêter là.
Son vouvoiement me rend dingue.
— Je pourrais vous faire visiter l’île ?
— Vous comptiez visiter ?
— Je suis déjà venu. Je connais deux ou trois endroits vraiment sympas.
— Vraiment ? s’étonne-t-elle. Je serai curieuse de voir ça.
Ce n’est pas vrai. Je ne suis jamais venu. L’étirement de sa bouche m’indique qu’elle n’est pas dupe.
— Et quel endroit est à visiter en premier, selon vous ?
J’ai bien envie de lui répondre ma chambre, mais j’ai la sensation que plus je vais insister, plus Amy va se dérober. Je louche sur son guide.
— Je connais quelques plages sympas.
Je trouverai l’info sur internet au pire.
— Lesquelles précisément ?
Elle me pousse dans mes retranchements. Un frisson me parcoure.
— Je vous invite à descendre de l’avion, s’immisce une hôtesse au sourire avenant.
Nous regardons tous deux autour de nous. Nous sommes les derniers. Amy et moi nous dépêchons de récupérer nos affaires et descendons.
Dans le couloir, je tente de lui voler la promesse de nous revoir.
— Une plage de sable chaud, Amy. Rien que vous et moi. Ne me dites pas que ça ne vous tente pas ?
Moi, en tout cas, ça me tente. Pour la première fois, je suis motivé pour visiter. Ses doigts jouent sur sa bague qu’elle fait rouler.
— Je vous assure que votre mari n’en saura rien, je la rassure d’un sourire envoûtant.
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Fezana Osly
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Adele Maine
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Carl K. Lawson
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Gwenaële Le Moignic
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Il y a un an