Mapetiteplume Joyeux Noël Clara Benjamin (1/4)

Benjamin (1/4)

Vendredi est une grande journée pour tout le monde, nous sommes toujours présents de bonne heure au sein du cabinet. Claudine et son professionnalisme ne font pas exception à cette règle.

Sa présence dans mon bureau à 8h ne m’interpelle pas tout de suite. Non, l’indice qui m’a fait tiquer est bel et bien son chargement. Le plateau composé d’un café et de viennoiseries entre ses mains me met la puce à l’oreille. La connaissant, elle essaye de faire ressortir le meilleur de moi en m’achetant par ma gourmandise.

Tout en la remerciant, je prends la tasse et attends donc la sentence avec méfiance. Dans mon esprit, une petite lumière grésille, car je redoute d’avoir trouver la réponse.


Cette histoire met complètement sortir de la tête ! Non rectification, tu as fait l'autruche dans l’espoir que ça lui passe !


— Bonjour, bien dormi ? me questionne-t-elle.

— On a connu mieux que des cartons comme compagnie !

— Elle….

— Il faut croire, je la coupe pour éviter toutes effusions inutiles.

— Est-ce que tu te souviens du jour que nous sommes ? questionne-t-elle d’une petite voix.

— Je pense que tu n’attends pas à « vendredi » comme réponse ! Je m’exclame comme un enfant qui fait semblant de ne pas comprendre.


Je la vois fermer les yeux d’exaspération et souffler un grand coup avant de les rouvrir. Ancrant son regard dans le mien, elle pose ses mains sur ses hanches en fronçant les sourcils, faisant ainsi apparaître sa ride du lion. Elle adopte l’habitude d’une mère s’apprêtant à réprimander sa progéniture.

Sans explication, à notre première rencontre, un lien s’est construit instantanément entre nous. Ayant perdu mes parents très jeune, elle est devenue ma maman de cœur au fil du temps. Cette femme est l’incarnation même de la bienveillance. Elle est donc la seule personne que j’autorise à employer ce ton sur moi. Et elle en est tout à fait consciente. D’où le fait qu’elle se permet des choses que bon nombre n’essayeraient pas. Et moi, je la laisse faire sans broncher!


— Tu m’avais promis de faire un effort, Benjamin ! râle-t-elle.

— Tu parles de quoi ? Je fais semblant d’ignorer.

— Ne fais pas l’enfant. Si les autres années, j’ai cédé, cette année, je ne le ferais pas !

— On est vraiment obligé de remettre cela sur le tapis ?

— Oui, parce que c’est aujourd’hui qu’ils viennent et je veux que tu sois gentil pour une fois.

— Mais je suis toujours gentil ! je m’offusque exagérément.

— Si tu crois que je n’ai pas vu ton manège avec tous ceux que je choisis ! Tu te mets le doigts dans l’oeil. Ils partent tout au bout de quelques jours ou semaines pour les plus téméraires parce que tu es un véritable tyran avec eux.

— Ce n’est pas de ma faute s’ils ne savent pas gérer la pression tes poulains.

— Je pars pour six semaines et je ne veux pas que tu te retrouves seul. Alors tu vas me faire le plaisir d’être gentil et aimable avec les trois personnes qui viendront.


C’est aussi pour ce détail que je n’aime pas cette période de l’année. Pendant six semaines, ma secrétaire part en vacances. Quarante-deux jours, bien méritée, je vous l’accorde, mais interminable pour moi.

Me retrouvant ainsi seul, je me replonge dans mon enfance où le sentiment d’abandon ne me quittait pas. Quand vous êtes orphelin, les gens vous évitent, à croire que votre état est contagieux. La solitude devient alors votre seul ami. Le cœur lourd et les yeux envieux vous regardez les autres gens autour de vous partager une joie qu’on vous refuse.


— Très bien, je vais bien me tenir ! je lui accorde en levant les deux mains en signe de résilience.

— Bien. Le premier arrive d’ici quelques minutes maintenant, je compte sur toi.


Avec un regard en coin, elle tourne les talons pour sortir du bureau, me laissant à ma lecture du dossier. Depuis quelques années, elle me rabâche les oreilles avec cette histoire d’assistant. Soi-disant pour me faciliter un peu la vie en son absence. N’ayant confiance qu’en elle, jusqu’ici, j’avais réussi à mettre en place un stratagème les faisant déguerpir de leur plein gré. Je crois que cette fois-ci, il va falloir que je redouble d’imagination pour en arriver au même résultat !


La journée risque d’être plus amusante que je ne le pensais finalement !


Il est 8 h 30 lorsque je vois sur ma caméra du hall afficher les images du premier candidat. Mon sourire fleurit tout seul à la vue de cet homme. L’affaire va être facile à conclure pour mon plus grand bonheur. Je ne suis pas homophobe, loin de la même, mais je sais aussi que notre clientèle a pour certains ou certaines des idées bien conçues.

Comment le décrire ?! Il doit faire à peu près ma taille, un mètre quatre-vingts, constitué de plus d’os que de muscle à en juger sa taille très fine. En soit jusque-là tout pourrait aller, mais c’est son style vestimentaire qui le trahit de trop. Pantalon serré en velours, chemise bariolée, le tout souligné par un petit foulard en soie. L’ensemble est dans les ton camel et rouge.

Toute à ma contemplation et à l’élaboration d’un plan, je ne perçois pas l’arrivée de mes deux collègues et amis. Quand j’entends la voix de Philippe s’adressant à Marie, je relève la tête de mon écran de surveillance. Tous les deux ont pris place sur les fauteuils devant mon bureau. L’expression sur leur visages laisse penser une gravité dans l’instant que nous vivons, mais leurs yeux pétillant de malice les trahissent. Mon comportement ainsi que les suites à venir les amusent beaucoup.


— Tu vois, c’est ce que je t’avais dit, il va encore faire des siennes ! se marre-t-il.

— Je ne sais pas du tout de quoi tu parles ! je réponds avec mauvaise foi comme un enfant pris la main dans le sac.

— Alors c’est quoi le plan pour celui-là ? me demande-t-il sans prêter attention à mon ironie.

— Tu n’en as pas marre de faire l’enfant avec tous ces assistants qui veulent travailler avec nous ? Tu es en train de te coller une étiquette de tyran tout seul. Tous les avocats te surnomment déjà « le pitbull » et tremblent rien qu’en entendant ton nom. Mais le plus grave est que j’ai commencé à l’entendre aussi de la part des assistants, commente-t-elle exaspérée.


Extrêmement fier de sa remarque, je lui souris de toutes mes dents. Je travaille d’arrache-pied depuis mes études pour avoir une réputation dans mon domaine. La fierté d’être reconnu de tous me booste. Moi, le petit orphelin qu’on mettait dans un coin pour qu’il ne prenne pas de place, je suis devenu celui qu’on regarde, qu’on admire et même qu'on idolâtre.


— Il en est fier en plus ce con ! reprend-elle en s’adressant à Philippe.

— Je rejoins Marie sur ce point, mon pote. Je sais que tu n’as pas confiance en grand monde, mais je pense que tu devrais faire un effort cette fois. Cela ne pourra que t’aider à passer ce moment difficile. Tu ne peux pas tout affronter tout seul sous peine de t’effondrer.

— Elle a fait ses cartons, je les informe pour couper court à leur leçon de morale.


Ils échangent un regard avant de reporter leur attention sur moi.


(à suivre...)

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15 commentaires

Bérengère Ollivier

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Il y a 6 jours

Il est vraiment insupportable le Benjamin lol. Je me demande comment Clara va chan,ger tout ça

Mapetiteplume

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Il y a 6 jours

Mais non il n'est pas si terrible que cela😉ce n'est qu'une carapace

Natia Kowalski

-

Il y a 8 jours

Légèrement arrogant le monsieur 😂💖

Mapetiteplume

-

Il y a 8 jours

😉C est ce qui fait son charme🤣
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