Fyctia

— Alessandro !!! crie Astrid en courant dans ses bras.

Nous attendons nos amis à la gare, et dès qu’Astrid a vu son amoureux descendre du train, elle n’a pas perdu une seconde pour courir à toute vitesse. Je la rattrape quelques minutes après, et enlace mon ami à mon tour.

— Tu m'as manqué, je murmure dans ses bras.

— Je te rappelle qu’il n’est plus célibataire depuis dix ans, affirme mon amie.

Je lui souris avant qu’elle ne retourne dans les bras de Alessandro pour l’embrasser un peu trop passionnément. Je détourne les yeux, même après toutes ses années, les voir s’embrasser me met mal à l’aise. En fait, l’amour en général me met mal à l’aise. Je n’ai jamais ressenti quoi que ce soit pour n’importe qui, donc je conclus que ça n’est pas fait pour moi. Ou que je n’intéresse personne. Après qu’ils aient terminé leurs petites affaires, je leur propose d’aller attendre le train de Gabriel sur l’autre quai.

— Je vais prendre un peu d’avance, je les informe, en plissant les yeux pour qu’ils comprennent la situation.

— Sissi tu abuses là, on a rien fait ! riposte Astrid.

— C’est vrai que ça pourrait être pire… chuchote Alessandro, juste derrière mon amie avec un sourire aux lèvres.

Je n’ai pas le temps de répondre qu’ils sont de nouveau collés ensemble. L’amour…

— C’est bien ce que je disais, je vais aller devant.

Nous nous baladons dans les rues de Paris après avoir cherché Gabriel, les valises des garçons à la main pour rentrer à l’appartement. Voilà un avantage d’habiter au centre de la ville, nous n’avons pas besoin d’appeler un taxi pour faire le trajet de chez nous à la gare.

— Je suis trop dégoûtée que Sacha ne puisse pas venir, dit Astrid, une légère pointe de tristesse dans sa voix, alors que nous sommes installés sur le canapé.

— D’ailleurs, Astrid, j’ai une bonne nouvelle à ce sujet ! s’exclame son copain.

— Tu vas me demander en mariage ? demande-t-elle toute joyeuse.

— Pas encore, mon ange. Mais j’ai un ami qui est chanteur et je lui ai proposé de nous rejoindre pour le road-trip.

— Quoi ? m’étranglé-je.

— Ça te dérange ? m’interroge Alessandro.

— Tu as oublié les règles du groupe ?

Je me lève et cours jusqu’à la chambre avant de revenir, un papier un peu froissé à la main. Je le plante devant le visage de mon ami, les joues rouges de colère.

« Si un membre ne peut pas être présent pour n’importe qu’elle raison, nous ne devrons en aucun cas le remplacer par une personne extérieure dans le groupe. »

— Sissi, commence Alessandro, on avait dix-sept ans quand on a signé ce contrat…

Je me tourne vers mes deux autres amis pour qu’ils me soutiennent, mais aucun d’eux ne daigne répondre. Ils se mordent les lèvres, et n’ont pas besoin de parler pour que je comprenne ce que cela signifie. Ils sont d’accord avec le guitariste.

— J’hallucine, je marmonne en secouant la tête avant de sortir de l’appartement.

— Sissi, attends, crie Astrid.

Je ne l’écoute pas et me dirige vers les escaliers, pour descendre au sous-sol. A chaque fois que je suis contrariée je me réfugie là-bas, je ne sais pas pourquoi, mais ce lieu me permet de me sentir reposée et détendue. Je m’assois contre le mur et pose ma tête sur mes genoux. Pourquoi personne ne me comprend ?

— Sissi, es-tu là ? murmure Astrid.

Je n’ai pas besoin de dire oui car elle sait déjà la réponse. Quand elle me voit, elle me rejoint et prend ma tête dans ses bras, sans dire un mot. Elle sait que c’est difficile pour moi de parler avec de nouvelles personnes, elle connait ma timidité et mon combat contre moi-même. Elle sait tout.